Première
par Sophie Benamon
C’est un épisode méconnu de la vie de Luis Buñuel que l’Espagnol Salvador Simo a choisi de mettre en avant dans ce portrait d’un jeune homme, bon vivant et à l’humour cinglant, loin de l’icône sérieuse qu’il deviendra. Il est alors l’assistant de Jean Epstein, le compagnon des surréalistes, et faisait partie des artistes en vogue dans le Paris de la fin des années 20, où son Chien andalou lui avait apporté la renommée. Jusqu’à ce que, soudain, L’Âge d’or jette l’opprobre sur lui : on lance des bombes dans un cinéma où le film est projeté, les mécènes qui ont produit le film, Charles et Marie-Laure de Noailles, sont menacés. En 1930, Buñuel devient un paria à Paris. L’immigré espagnol retourne chez lui et retrouve son ami le sculpteur Ramón Acín. Ensemble, ils projettent de filmer l’Espagne des laissés-pour-compte. Cela donnera Terre sans pain, un court documentaire sur les paysans démunis. C’est ce tournage que s’applique à raconter le réalisateur Salvador Simo, spécialiste des effets spéciaux et de l’animation, dont Buñuel après L’Âge d’or est le premier long. Terre sans pain sera un tournant dans la carrière du jeune Buñuel, façonnant sa vision d’artiste comme ses convictions politiques. Il va redécouvrir le sens de son travail dans sa terre natale. Simo intègre avec délicatesse des extraits du documentaire à son film. L’ensemble, très réussi, ravira les cinéphiles comme ceux qui connaissent mal Buñuel. Prix du jury au Festival d’animation de Los Angeles, il révèle un futur grand de l’animation espagnole.