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Avec Lemoine Man Show, l’artiste revient avec un tout nouveau spectacle dans lequel il passe à la moulinette de son esprit grinçant et pertinent sa vision de notre société.Propos recueillis par M.-Céline NivièreNous nous retrouvons dans un café, au charme authentique du vieux Paris, dans le 19e arrondissement, quai de Seine. En parlant de Seine, la scène est le lieu où il est heureux. Le sourire qui illumine son visage exprime tout le plaisir qu’il a d’exercer ce métier. « Cela fait vingt ans que je fais de la scène. J’en ai besoin pour me ressourcer. Je n’ai connu qu’un arrêt de deux ans pendant lequel j’ai écrit des scénarios pour le cinéma. Rien de plus volatile que de faire rire les gens. Il faut donc être à leur contact et cela passe par la scène. J’ai besoin de la sanction immédiate du public. Elle est simple : soit tu le fais marrer, soit tu prends un bide. » Puisqu’il aime les gens, comment se fait-il qu’il ait choisi de faire du seul en scène ? Il remet les choses au point. « C’est venu tard. Pendant dix ans, j’étais en groupe. Là, on partage tout, les succès et surtout les échecs… Je ne suis pas certain d’avoir l’ego pour être seul, mais le hasard a fait que je m’y suis retrouvé. J’avais écrit un duo, et mon partenaire m’a planté. Alors, plutôt que de faire un mariage raté avec un autre, j’ai tenté le coup. Et cela dure depuis dix ans. Le jour où j’ai commencé, j’ai eu beaucoup de belles surprises. Cela a été un accélérateur qui a déclenché plein d’aventures. » Avec sa dégaine d’adolescent, son œil pétillant, l’esprit vif et souvent potache, j’imagine que l’humour est depuis longtemps au bout de son stylo. « C’est ma véritable passion. Sous toutes ces formes. Que ce soit pour la radio, la télé, les scénarios. » Il s’est nourri à celui des Monty Python, du film Y a-t-il un pilote dans l’avion ? et ses déclinaisons. « Mon style, mon écriture ont changé en fonction de mon évolution. Il y a vingt ans, j’étais dans la parodie. Je pouvais arriver avec une peau de bête en acrylique. Avec le temps, j’ai eu besoin d’aller vers des choses plus personnelles. » Justement, son prochain spectacle va aborder un thème qu’il connaît bien puisqu’il a franchi le cap, la quarantaine. Cet âge défini comme étant celui de la maturité. « C’est l’heure des premiers bilans. J’avais 20 ans lorsque je suis arrivé dans le métier. Je ne me suis pas vu vieillir. Aujourd’hui des jeunes viennent me demander des conseils, alors que je me sens toujours débutant ! (Rire). Un jour, les jeunes se mettent à te vouvoyer. Tu penses qu’ils te charrient. Mais non, c’est parce que tu es vieux ! » En parlant de soi, le sujet devient les autres. « Bien sûr. Je pars toujours d’expériences personnelles. Après j’extrapole, cherchant l’universalité pour que les gens s’y reconnaissent. Donc, c’est surtout un bilan sur la société actuelle et les quadras d’aujourd’hui. Quand mon père avait mon âge, il demandait en cadeau un rasoir, une cravate, des choses sérieuses, moi ce serait plutôt un jeu pour ma console. Je me perçois moins mûr. » Nous rions en évoquant cette société qui a créé ce mutant qu’est « l’adulescent ». A quoi va ressembler son spectacle ? « Je l’ai conçu comme un voyage. Le point de départ est mon grand complexe. Voilà, il faut le savoir, je lis très peu. De là, j’explique comment cacher son inculture en société. De ce point de départ, je promène les spectateurs dans un long soliloque sans coupures, mais avec des digressions. » C’est du stand up ? « Je parle debout, mais ce n’est pas que ça ! C’est terrible, aujourd’hui, l’humour est entré dans une ère de marketing. Je me sens plus près de Jean-Jacques Vanier, de Rollin, de Demaison. » Grâce à son metteur en scène Etienne de Balasy, avec lequel il avoue s’entendre comme larrons en foire, il a pu se libérer scéniquement. « Avec lui, je reviens à la sobriété, sans lumière pouêt-pouêt. Du coup, entre la forme et le fond, il y a une cohérence. » Mais son humour est plus grinçant ! Il sourit à nouveau, amusé par les différentes étiquettes qu’on lui a collées sur le paletot. « Je ne sais pas si on peut définir mon humour. Dans la rue, il y a des petites mamies qui m’embrassent, me disant que je suis le gendre idéal, et d’autres qui me traitent d’ordure ! Pendant longtemps on m’a classé humour noir. En réalité, c’est plus du mauvais esprit que du cynisme. J’ai un goût pour l’absurde. Au Carré Blanc, on me présentait ainsi : « Et maintenant voilà l’intello du café-théâtre ». Je ne le suis pas mais je préfère cette image à celle du « lourdingue ». Je cherche à faire des choses populaires, c’est-à-dire proches des gens. » Avant de nous quitter, je tiens à revenir sur la pièce qu’il a écrite, Amour et chipolatas, qui vient de dépasser sa 1000e représentation. Un record ! « C’est un cadeau inespéré. Cette œuvre de jeunesse, écrite en 1995, personne n'en voulait. Grâce à Michel Rougeron et Xavier Letourneur, elle a trouvé sa place au Mélo d'Amélie puis à la Comédie Caumartin. On ne peut pas imaginer qu’un spectacle puisse être à l’affiche aussi longtemps. Je suis très admiratif de Xavier Letourneur qui a mis en scène les deux pièces les plus jouées à Paris (l’autre étant J’aime beaucoup ce que vous faites). Il vient régulièrement voir si le spectacle a bougé, pour faire répéter un nouveau comédien. j’ai croisé un camarade à qui j’ai demandé ce qu’il jouait en ce moment. Il m’a répondu : « Ben ta pièce ! » On lui souhaite, une vie aussi longue avec son Lemoine man show.Lemoine Man Show au Théâtre de la Gaîté MontparnasseAmour et chipolatas à la Comédie Caumartin