Claude Lanzmann

Considéré aujourd’hui comme un cinéaste unique et incontournable, Claude Lanzmann se fait rapporteur et acteur héroïque d'événements historiques majeurs, comme en témoignent ses nombreuses et prestigieuses distinctions : Médaillé de la Résistance, Officier de la Légion d’honneur, Commandeur de l’Ordre National du Mérite…Claude Lanzmann est né le 27 novembre 1925 à Bois-Colombes à Paris, d’un père décorateur et d’une mère antiquaire, issus de parents immigrés juifs de l’Europe de l’Est. Il est le frère du parolier et scénariste Jacques Lanzmann et de la comédienne Évelyne Rey. Pendant la Première Guerre mondiale, ils vivent à Paris, et le jeune pensionnaire du lycée Condorcet est déjà témoin de la montée de l’antisémitisme. Son père, résistant, lui enseigne la méfiance et le pessimisme actif. À dix-huit ans, Claude Lanzmann est l’un des fondateurs d’un mouvement résistant au lycée Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand. Il participe à la lutte clandestine, puis aux combats dans les maquis (Auvergne, la Margeride, le mont Mouchet) et aux embuscades (du Cantal et de la Haute-Loire). pagebreakMalgré la Libération, la peur ne quitte pas sa famille, et les Lanzmann envisagent même de quitter la France. Mû par le désir de voir « les Allemands en civil », Claude Lanzmann décide en 1947 de partir pour l’Allemagne afin d’y étudier la philosophie (à Tübingen). La lecture des Réflexions sur la question juive et sa rencontre avec les acteurs du mouvement existentialiste (durant le blocus) sont tous deux une révélation pour lui, alors lecteur de philosophie à l'Université de Berlin. En 1952, il décide de se consacrer au journalisme.Et c’est au cours de cette année qu’il rencontre Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre. Il devient leur compagnon de route et ami, et entre au comité de rédaction des Temps modernes. En outre, il tombe amoureux de Simone de Beauvoir ; leur union durera six ans (jusqu’en 1958), mais il demeurera à ses côtés jusqu’à sa mort en 1986, date à laquelle il prendra la direction des Temps modernes (jusqu’à aujourd’hui).Fidèle à son engagement anticolonialiste, il dénonce la répression en Algérie en 1957. Cette posture lui vaudra de faire partie des dix inculpés parmi les signataires du Manifeste des 121, et d’être confronté à la peine capitale. Son travail le fait voyager en Corée en mai 1958.Jusqu’en 1970, la vie de Claude Lanzmann est ponctuée entre ses activités de Directeur des Temps modernes et son métier de journaliste, écrivant et publiant de nombreux articles et reportages. pagebreakC'est à partir de 1970, année où il cosigne le scénario d’Élise ou la vraie vie de Michel Drach, qu'il se consacre exclusivement au cinéma. En 1973, il sort son premier film Pourquoi Israël, une enquête sur l'État d'Israël, alors qu'éclate la guerre du Kippour. Presque trente ans après les Réflexions sur la question juive de Jean-Paul Sartre, Claude Lanzmann invite à un nouveau questionnement à la lumière de l’extermination des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale, et de la naissance d’Israël. Mais il s’est déjà lancé dans son grand chef-d'œuvre, Shoah, qui aura nécessité douze ans de travail. À sa sortie en 1985, ce documentaire fleuve de plus de neuf heures est d’emblée considéré comme une œuvre fondatrice, un monument incontournable du septième art, et reçu comme un choc par le monde entier. En 1994, Claude Lanzmann signe Tsahal, un film sur l’armée israélienne ; en 1997 et 2001, il développe la thématique de Shoah avec Sobibor, 14 octobre 1943, 16 heures et Un vivant qui passe, en poursuivant son témoignage sur l'horreur des camps. En 2006, il est récompensé pour son travail de mémoire d'utilité publique : il est fait Chevalier de la Légion d'Honneur. En 2008, il préside à l’ouverture officielle du Festival de Cannes, et rend un vibrant hommage à la richesse du cinéma.En mars 2009, Claude Lanzmann publie un livre de souvenirs, pour lequel il refuse l'appellation de mémoires : Le Lièvre de Patagonie (Gallimard). Encensé par la critique, le livre est d’emblée un succès de librairie.