Zacharias Mavroeidis nous a confié les coulisses de tournage de son premier long, irrésistible comédie queer meta située à Athènes
The Summer with Carmen met en scène deux amis homosexuels grecs, Démos et Nikitas, qui consacrent leur été à écrire un scénario inspiré par un film qu’ils avaient tenté de développer deux ans plus tôt à cause de l’impossibilité de l’un d’eux de se remettre d’une rupture. Comment en avez- vous eu l’idée ?
Zacharias Mavroeidis : J’ai écrit ce film avec mon meilleur ami Xenofon Chalatsis. Il se trouve que je connais une chienne qui s’appelle Carmen (le nom de celle de l’ex de Démos dans mon film) et qui appartient à un de mes ex ! (rires) Et tout démarre le jour où alors que nous sommes sur une plage avec Xenofon, on tombe sur une chienne qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Carmen ! Donc, comme vous le voyez, l’inspiration du film et le cœur de celui- ci ne font qu’un.
Quelle a été la plus grande difficulté pour vous dans toute la phase d’écriture ?
Le jeu avec les temporalités, les aller- retour entre présent et passé. Mais aussi le jeu avec les différentes tonalités du film. On peut facilement se laisser emporter, quand on écrit de la comédie, à en rajouter, à glisser une réplique ou un bon mot en plus juste parce qu’il nous fait marrer et qu’on le pense efficace. Sauf que, dans le cas de The Summer with Carmen, trop de comédie risquait de nous empêcher de revenir vers l’émotion qu’on souhaitait aussi insuffler. De créer une trop grande distance entre nos personnages et les spectateurs. Et on a dû prendre garde au respect de ce double équilibre jusqu’à la table de montage.
The Summer with Carmen développe une histoire d’amitié entre deux homosexuels, ce qu’on a finalement très peu l’occasion de voir au cinéma…
Vous avez raison mais ce n’est pas pour autant quelque chose de prémédité. Cette place prise par l’amitié n’a cessé de grandir au fil de l’écriture au point de devenir le cœur du film. Je crois que j’en ai vraiment pris conscience au moment du montage où on a pris la décision de ne pas réduire son importance car c’est en effet un moyen de parler de la communauté queer sous un autre angle. D’ouvrir le spectre des récits qu’on peut faire et ne pas se contenter d’une variation sur ce qui a déjà été dit et montré
Et vous le faîtes dans une ambiance colorée, lumineuse qui habite votre film de bout en bout. Avec une manière rafraîchissante de filmer les corps dénudés sur les plages d’Athènes. Comment vous y êtes- vous employé ?
C’était pour moi une partie cruciale de ce projet. Je devais épouser la façon dont ces hommes aiment exposer leur corps de manière naturelle et donc ne surtout pas être prude. Mais par ce choix, je savais que je demandais beaucoup à mes comédiens. Je pense notamment à mon acteur principal, Yorgos Tsiantoulas qui, s’il avait déjà joué nu sur scène, ne l’avait jamais été au cinéma. Or ce sont deux expériences différentes. Là, il devait jouer que la nudité était au fond un des costumes de son personnage et donc trouver une manière naturelle et jamais provocatrice de le faire. De juste faire profiter de sa beauté car il incarne un personnage qui aime son corps, aime le montrer et aime qu’on le trouve beau
On dit souvent que le pire cauchemar pour un réalisateur est de se retrouver à diriger des enfants et des chiens… Comment ça s’est passé pour vous avec la petite chienne Carmen ?
Cette petite chienne est, dans la vie, celle d’un couple de lesbiennes. Donc la grande difficulté a été de l’habituer à être dans les bras d’un homme aussi costaud que Yorgos : elle était terrifiée ! (rires) Et ma méthode pour toutes ses scènes ont été les mêmes, pour s’adapter au fait qu’il était impossible d’anticiper ses réactions : commencer la prise avec elle et demander aux acteurs de s’adapter à ce qu’elle faisait, quitte à modifier l’action de la scène
Savez- vous déjà quel sera votre prochain film ?
Je travaille sur deux projets aux antipodes l’un de l’autre. Un film d’animation pour enfants et un polar, une histoire de meurtres située dans les montagnes grecques.
The Summer with Carmen. De Zacharias Mavroeidis. Avec Yorgos Tsiantoulas, Andreas Labropoulos, Roubini Vasilakopoulou… Durée : 1h46. Sorti le 19 juin 2024
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