L’acteur a collaboré avec les deux réalisateurs, sur Full Metal Jacket et The Dark Knight Rises.
Malgré des différences marquantes dans leur approche du cinéma, Stanley Kubrick et Christopher Nolan sont souvent comparés, le second étant considéré par certains comme l'héritier du premier. Un exerce périlleux auquel nous avons récemment soumis trois personnalités (Jan Kounen, Philippe Rouyer et Nicolas Boukhrief), à l’occasion de la sortie de Tenet, en leur demandant si Nolan était bel et bien le nouveau Kubrick. La question avait provoqué l’indignation de nombreux fans de cinéma sur les réseaux sociaux. Dommage, car si la réponse était évidemment non, l'analyse de nos interlocuteurs était très intéressante.
Tenet : Christopher Nolan est-il oui ou non le nouveau Stanley Kubrick ?Preuve que l’interrogation n’était pas si folle, Matthew Modine vient de remettre une (petite) pièce dans la machine. Interrogé par le Hollywood Reporter, l’acteur qui a été dirigé par Stanley Kubrick (sur Full Metal Jacket) et Christopher Nolan (il joue Peter Foley, l'adjoint du commissaire Gordon, dans The Dark Knight Rises) voit bien un point commun entre les deux cinéastes. Mais pas plus :
"Parfois sur Full Metal Jacket, il n’y avait pas plus de 10 ou 15 personnes sur le plateau. Et aussi grand qu’était le tournage de The Dark Knight Rises, avec tous les gens qui travaillaient dessus et l’ampleur incroyable du casting et des équipes, tout devenait plus petit, plus petit et plus petit à mesure qu’on se rapprochait du plateau où on devait tourner. Donc il y a une similitude entre Stanley et Chris. Tout le bruit et tous ces trucs étaient tenus au loin, très loin du plateau, et il n’y avait aucune raison d’avoir une chaise ou une moniteur de contrôle, ça aurait servi à quoi ? Tout le monde voyait ce qu’il se passait. C’était un environnement tranquille quand on faisait The Dark Knight Rises".
Christopher Nolan : "Ce serait fou de me comparer à Kubrick !"Au cours de cet entretien, Matthew Modine est aussi longuement revenu sur son travail avec Stanley Kubrick. Et il reste profondément marqué par le légendaire perfectionnisme du réalisateur, que l’acteur ne dément pas, bien au contraire :
"Stanley m’a dit un jour : ‘On me reproche toujours de faire beaucoup de prises. Tu sais pourquoi je fais autant de prises ? Parce que les acteurs ne connaissent pas leurs dialogues'", raconte Modine, précisant que Kubrick avait compris l’importance de la maitrise du texte en voyant les acteurs britanniques de Spartacus réciter leurs lignes sans relâche. "Le but est d’arriver au point où tu n’as plus besoin de réfléchir à ce que tu es en train de dire", estimait le réalisateur.
Toujours sur ce thème, Modine livre une autre anecdote savoureuse, précisément un dialogue entre Arliss Howard (qui jouait Cowboy dans Full Metal Jacket) et Stanley Kubrick. "Je vais te manquer", lui répétait le réalisateur. "Bien sûr que vous allez me manquer", répondait l’acteur. Ce à quoi Kubrick rétorqua : "non, tu vas te retrouver sur un autre tournage et je vais te manquer parce que quand le réalisateur va dire ‘coupez, c’est dans la boite’, je vais te manquer parce que tu sauras que ce n’était pas la bonne".
"Je repense souvent à ça quand je travaille et que le réalisateur, pressé par le temps, passe à la suite", poursuit l’interprète de l’engagé Guignol. "Ce n’est pas aussi bon que ça pourrait l’être, mais ils avancent. Ca ne s’est jamais produit sur un plateau de tournage de Stanley Kubrick". Et de ce point de vue là c’est David Fincher, bien plus que Nolan, qui est l’héritier de Kubrick.
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