Première
par Damien Leblanc
Charlotte et Micha forment un jeune couple heureux. Pourtant, Charlotte trompe depuis peu son conjoint avec Mélodie, qui n’est autre que leur meilleure amie ! Ignorant l’existence de cette relation, Micha trompe à son tour Charlotte avec… la même Mélodie, qui se retrouve alors au cœur d’un vertigineux dilemme. Spécialiste du sentiment amoureux "(Le Chignon d’Olga", "Le Temps de l’aventure"), Jérôme Bonnell s’impose définitivement comme un grand romantique avec ce sixième long métrage. S’attaquant au thème éculé du triangle amoureux, le cinéaste évacue d’emblée la jalousie pour mieux rendre compte de la fragilité de ses protagonistes. Le comique de situation (résumé par la séquence de vaudeville où Charlotte et Micha miment chacun – et à l’insu de l’autre – à Mélodie de fuir au loin) traduit ainsi, sans la surligner, la vivacité des émotions qui submergent ses personnages. Cette tonalité burlesque n’exclut toutefois pas la gravité. Les détours par le tribunal où Mélodie (géniale Anaïs Demoustier) exerce son métier d’avocate rappellent en effet les conséquences possiblement tragiques d’un désir mal contrôlé. Mais à travers ce portrait, électrique et solaire, d’une passion délibérément affranchie des barrières sexuelles, Jérôme Bonnell capte une modernité dans l’air du temps qui avait tendance à faire légèrement défaut à son cinéma jusque-là. Parfois rattrapé par ses envies de minimalisme (chassez le naturel…), le réalisateur n’hésite cependant plus à briser la glace. Et "À trois on y va" de s’abandonner dans ses dernières minutes à une sensualité inédite et quasi mystique qui confine à l’ataraxie. Cette éclatante épopée sentimentale affirme alors haut et fort que l’engagement amoureux constitue la meilleure façon de se révéler à soi-même.