Élevé en Russie, il débute sur scène puis à l'écran en Angleterre. Parti pour Hollywood en 1936, il est le détective débonnaire de deux séries policières de la RKO (The Saint et The Falcon), mais il incarne avec la même autorité le maître chanteur de Rebecca (A. Hitchcock, 1940) ou le haut dignitaire nazi de Chasse à l'homme (F. Lang, 1941). Il doit à Albert Lewin ses premiers rôles marquants, tous placés sous le signe du dandysme et de l'immoralisme fin de siècle : le peintre égocentrique de The Moon and Sixpence (1942), le dandy pervers du Portrait de Dorian Gray (1945) et l'infâme roué de The Private Affairs of Bel Ami (1947). Sa vaste culture, son ironie cinglante, son masque hautain en font l'interprète de prédilection des cinéastes européens immigrés, tels Renoir (Vivre libre, 1943), Brahm (Jack l'Éventreur, 1944 ; Hangover Square, 1945), Siodmak (l'Oncle Harry, id.), Ulmer (le Démon de la chair, 1946), Preminger (Ambre, 1944 ; The Fan, 1949). Habile à suggérer l'ambivalence, voire la schizophrénie, de ses personnages, il se coule admirablement dans l'univers décadent de Sirk : il est, tour à tour, le juge suicidaire de l'Aveu (1944), l'escroc Vidocq de A Scandal in Paris (1946) et le faux coupable de Des filles disparaissent (1947). Dans Ève (J. L. Mankiewicz, 1950), qui lui vaut un Oscar (best supporting actor), il compose, sous les traits du critique dramatique, un portrait définitif de cynique retors et venimeux. De la suite de sa carrière, beaucoup plus inégale, partagée entre l'Europe et les États-Unis, on retiendra : Voyage en Italie (R. Rossellini, 1953), les Contrebandiers de Moonfleet (F. Lang, 1955), la Cinquième Victime (id., 1956), Une espèce de garce (S. Lumet, 1959) et enfin la Lettre du Kremlin (J. Huston, 1970), qui le travestit en espion homosexuel. Avant de se donner la mort dans un hôtel de Barcelone, il nous laissa une autobiographie (Memoirs of a Professional Cad, 1960). Figure au nombre des époux de Zsa-Zsa Gabor.