Star de films aussi cultes que La fèvre au corps, A la poursuite du diamant vert, ou L'honneur des Prizzi, Kathleen Turner a aujourd'hui disparu des écrans radars.
Il existe de nombreux artistes qui connaissent un immense succès pendant une courte période. Ce succès peut se caractériser par exemple par quelques films qui ont triomphé en une courte période, une couverture médiatique énorme à un moment donné, ou un Oscar de la meilleure actrice pour un rôle isolé. Et puis soudain, plus rien, ces artistes tombent subitement dans l'oubli aussi vite qu'ils ont attiré la lumière. Ils disparaissent de l'écran radar sans rien laisser d'autres que des souvenirs plein la tête, des souvenirs nostalgiques de cinéphiles.
Parfois dû à un retrait voulu et provoqué, tout simplement pour changer de vie, élever des enfants, ou évoluer vers d'autres sphères. Parfois à cause du vieillissement, du temps qui passe, et donc, du manque d'intérêt des studios et des productions. Ces disparitions soudaines sont d'autant plus surprenantes qu'elles se développent d'une façon exponentielle avec le temps. En effet, aujourd'hui, combien de Mary Elizabeth Mastrantonio, de Meg Ryan, ou de Rebecca de Mornay presque oubliées pour une Meryl Streep toujours au sommet ? Une carrière est un travail de longue haleine, un investissement perpétuel. Et il faut compter sur une bonne dose de chance aussi.
A travers cette nouvelle rubrique baptisée "Mais qu'est devenu(e)... ?", nous vous proposons régulièrement de vous replonger dans une époque, une période, une filmographie, une histoire. Celle d'un comédien ou d'une actrice qui aura marqué le septième art de son empreinte avant de disparaître aussi vite qu'il ou qu'elle était venu(e).
Mais qu'est devenue... Kathleen Turner ?
Démarrée sur les chapeaux de roue au début des années 80 et l'imposant comme l'une des actrices hollywoodiennes majeures de cette période, la carrière de Kathleen Turner aura déraillé dans les années 90 pour n'être plus que l'ombre d'elle-même dans les années 2000.
C'est effectivement par la grande porte que Kathleen est entrée dans nos vies en 1981, se dévoilant corps et âme (au sens propre) dans le sulfureux La Fièvre au Corps de Lawrence Kasdan. Le rôle de Matty Walker, séductrice démoniaque et irrésistible, l'a en effet imposée dès son premier rôle et redessiné les contours de la femme fatale au cinéma, jouant de son physique et de sa sexualité comme autant d'armes dévastatrices.
S'appuyant sur un jeu instinctif et dévoilant une présence charnelle explosive, Kathleen entre avec brio dans les années 80 et dans l'industrie hollywoodienne - décrochant une nomination aux Golden Globe Awards et aux BAFTA -, et on lui prédit alors le meilleur pour le futur.
Des prédictions qui allaient se vérifier rapidement, notamment grâce à sa rencontre avec Michael Douglas et Danny DeVito qui allait déboucher sur plusieurs succès commerciaux et artistiques.
Ainsi, l'aventure du trio débute en 1984 avec A la poursuite du diamant vert, film d'aventure efficace qui voit une romancière sans histoire être catapultée dans la jungle colombienne à la recherche d'un trésor. Le triomphe est immédiat : Kathleen en citadine pépère perdue au bout du monde, Michael Douglas en Indiana Jones vénal, et Danny DeVito en escroc à la petite semaine portent vers les sommets ce film signé Robert Zemeckis qui offre à Kathleen le Golden Globe de la meilleure actrice. Elle a alors 30 ans.
Par la suite, comme pour se rappeler au bon souvenir des fans de La Fièvre au Corps, la sculpturale blonde tourne un nouveau rôle sulfureux et dénudé dans Les Jours et les nuits de China Blue du brillant et barré Ken Russell, l'histoire d'une jeune femme styliste le jour et prostituée la nuit, qui traîne dans les bas fonds de Los Angeles où elle vend son corps, notamment à un prêtre psychopathe.
L'année suivante, Kathleen Turner décroche son deuxième Golden Globe de la meilleure actrice pour son rôle dans L'honneur des Prizzi de John Huston, avant de retrouver Michael Douglas et Danny DeVito pour Le Diamant du Nil, suite de A la poursuite du Diamant Vert tournée en 1985, mais malheureusement réalisée par le tâcheron Lewis Teague.
Beaucoup moins efficace que le premier film, reposant plus sur un humour de situation au raz des pâquerettes que sur un scénario solide, ce second opus est malgré tout un succès tant les fans sont heureux de retrouver le fameux trio qui les avait fait voyager l'année précédente.
En 1986, l'actrice américaine, alors âgée de 32 ans, tourne Peggy Sue s'est mariée sous la direction du grand Francis Ford Coppola, et se trouve nommée aux Golden Globe Awards et surtout aux Oscars pour la première fois de sa carrière, avec le rôle principal de cette comédie qui compte aussi dans ses rangs Nicolas Cage, Helen Hunt et Jim Carrey, qui a cartonné un peu partout où elle est sortie.
Après avoir prêté sa voix à Jessica Rabbit dans Qui veut la peau de Roger Rabbit ? de Robert Zemeckis (1988), puis avoir retrouvé Lawrence Kasdan pour un rôle dans Voyageur malgré lui (1988), Kathleen reforme une troisième fois le trio de choc pour un film mis en scène par Danny DeVito dans lequel elle joue la femme de Michael Douglas : La Guerre des Rose. Cette comédie réussie et d'un cynisme inouï, propose de suivre l'histoire d'un couple du début de sa passion jusqu'à sa mort en passant par le mariage, les enfants et le quotidien insupportable pour les deux parties.
Si Kathleen ne le sait pas encore, cette grande réussite comique va sceller le sort de sa carrière, qui ne brillera plus de la même façon dans les années 90.
En effet, à cause de problèmes personnels, d'un succès rapide plutôt mal géré, et surtout d'une faiblesse pour la boisson, Kathleen Turner qui boit déjà beaucoup tombe rapidement dans l'alcoolisme. Les années suivantes, elle n'est ainsi que l'ombre d'elle-même - et son physique commence sérieusement à se détériorer- dans des films comme Un privé en escarpins ou Pas de vacances pour les Blues. Si le trublion John Waters lui offre un rôle démentiel avec lequel elle casse et ridiculise son image glamour dans Serial Mother, sa prise de poids et son sérieux changement physique - dus à des problèmes de santé (à cause de l'alcool, elle est atteinte de polyarthrite rhumatoïde) - la placent sur le bas côté dans l'esprit des décideurs hollywoodiens. Rideau.
Après quasiment dix ans à tourner uniquement des téléfilms pour le petit écran, Kathleen a fait un come-back réussi au cinéma en 1999 grâce à Sofia Coppola, la fille de son ami Francis Ford Coppola, qui lui a offert pour son premier film de jouer la femme de James Woods et la mère des quatre Virgin Suicides.
Après de nouveaux téléfilms sans saveur, l'actrice s'est finalement tourné vers les séries télé afin de rebondir et a fait quelques apparitions "très second degré" dans quelques shows à succès comme Friends (où elle campait dans trois épisodes le père transsexuel de Chandler), Nip/Tuck, ou Californication.
A cette même période, Kathleen fut admise au Marworth Hospital de Waverly, en Pennsylvanie, pour soigner son alcoolisme. Elle confiera au moment d'entrer en cure : "Je n'ai aucun problème avec l'alcool quand je travaille. Mais quand je me retrouve seule, à la maison, je suis incapable de contrôler ma consommation de boisson. Et je m'enfonce dans l'excès. Vraiment. Je veux dire : je perds complètement le contrôle."
Une carrière commencée au sommet et maintenue au top pendant une décennie, avant de décliner dans les années 90 et de disparaitre totalement ces dix dernières années. Mais à l'instar de bon nombre de stars hollywoodiennes qui, tel le phénix, renaissent de leurs cendres, Kathleen, 61 ans, a tenté un nouveau come-back au cinéma l'année dernière avec un petit rôle dans Dumb and dumber De, où elle était entourée des débiloïdes Jim Carrey et Jeff Daniels, pour la suite du film culte des frères Farrelly.
Les vraies légendes ne meurent jamais vraiment.
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