Le comédien lève le voile sur le processus de création d’un des plus beaux rôles de sa carrière.
Romain Duris est en couverture du nouveau numéro de Première pour Eiffel, un biopic original réalisé par Martin Bourboulon (Papa ou maman). Voici un extrait de notre dossier spécial consacré au film, dans lequel le comédien nous raconte comment il s'est glissé dans le costume de Gustave Eiffel.
Sommaire de Première n°517 : Romain Duris, Eiffel, Steve McQueen, Louise Bourgoin, Daft Punk, Joe Carnahan..."Tout commence par la proposition de Martin [Bourboulon]. J’aime l’énergie qu’il déploie quand il me parle de ce projet fou mêlant la construction de la tour Eiffel et l’histoire d’amour qui l’aurait inspirée. Ça me parle immédiatement. D’abord parce que, depuis l’enfance, la tour Eiffel me fascine, mais surtout parce que j’adore cette idée de l’ingénieur précurseur. Eiffel, c’est le Steve Jobs de l’époque, il est au coeur d’un récit puissamment romanesque et moderne.
Je commence à travailler sur Gustave Eiffel en lisant énormément de choses sur lui. Et ce qui me frappe, c’est que tous ces ouvrages parlent de ses créations mais assez peu de sa vie intime. Le scénario d’Eiffel va m’inciter à suivre la même voie. En créant mon personnage, je me fiche de savoir s’il avait un ego démesuré ou non. Je suis la logique de ce que montre le film : un fonceur,
un homme capable de haranguer les foules, d’aller au bout d’un projet aussi dingue que cette tour, tout en ayant au fond de lui cette fragilité liée à un amour impossible. En faisant ces recherches, j’ai conscience que je me crée un bagage dont, sur le plateau, je vais devoir me libérer pour suivre la dynamique forte qui découle du scénario. Lâcher les chevaux pour jouer un film qui avance à toute allure. S’enfermer dans une construction trop puissante du personnage aurait gâché tout ça. Le but est, à l’inverse, de rester spontané, dans l’instant.
Le fait que Martin n’aime pas les répétitions me convient donc parfaitement. Le numérique permet de tenter des choses directement sur le plateau. C’est essentiel de s’autoriser à avoir des accidents dans ce type de film historique à gros budget. Martin permet cette liberté-là car il en est client. Et son expérience en comédie lui donne une expertise en matière de rythme. Et puis il y a Emma [Mackey] ! Elle représente tout ce que j’aime chez une comédienne. Aussi à l’aise dans l’énergie physique de la gaieté que dans les scènes les plus dramatiques où elle délivre une émotion pure et belle.
Quand tu joues avec elle, tu es porté. Dans tout ce processus, les costumes jouent un rôle important : on a tout de suite été d’accord avec Martin pour ne pas se laisser enfermer par l’obsession de la crédibilité de la reconstitution historique. Rester libres dans la coupe des vêtements et la manière de les porter. La chemise ouverte parfois, les cheveux pas forcément peignés… Il ne faut jamais perdre de vue qu’Eiffel est un artiste. Donc s’il est chic quand il se retrouve en représentation, il faut s’autoriser à le déstructurer dès qu’il travaille. Je n’avais pas envie d’être guindé.
Le tournage s’est déroulé en deux parties, la deuxième juste à la fin du premier confinement. Vanessa van Zuylen avait fait ce pari qu’on soit prêts à repartir dès que tout allait rouvrir. On ne savait pas précisément quand, mais comme acteur, dans ces moments suspendus, il faut toujours se mettre dans la tête que l’on va jouer. Cette pandémie a encore renforcé notre motivation : exercer son métier même avec les tests, les gels… était un luxe à ce moment-là. Pour créer Eiffel plus jeune, il faut faire confiance à la situation, à la fougue de ces moments où il débarque chez les parents d’Adrienne réclamer du bois pour la construction du pont de Bordeaux. C’est comme un nouveau film qui redémarre sans besoin d’aller-retour dans ma tête avec ce qu’on a déjà tourné. Ce film a été une épopée et j’ai été comblé de retrouver à l’écran le souffle qui a accompagné sa création."
Je m'abonne à Première J'achète ce numéro
Commentaires