- Fluctuat
Mode d'emploi : invitez des amis à dîner dans un restaurant chinois du XIIIème arrondissement. N'hésitez pas à boire un peu trop d'alcool de riz et à vous charger le bide de substances grassouilles, en prenant soin d'en garder le rendu et le fumet sur le bout des doigts et dessous les ongles (évitez les serviettes chaudes et autres rince-doigts).
Sur les coups de 22 heures, prétextez un début de migraine ou une maladie sexuellement transmissible mortelle d'origine vaginale et laissez les en plan. Si vous êtes marié(e) ou vivez en couple, abandonnez lâchement votre moitié aux mains des chinois. N'espérez pas avoir de rapports sexuels ce soir.Avec un certain aplomb, vous devriez même réussir à quitter l'assemblée sans vous faire remarquer (pourquoi pas sans payer), ce qui, pour vous, être timide et avec une forte conscience morale, représente un acte d'héroïsme significatif.Une fois dehors, vérifiez qu'il fait nuit et que le temps est à la pluie. Regardez chaque passant dans le blanc des yeux sans toutefois risquer de paraître se foutre de leur gueule. Un coup de boule est si vite arrivé. Dirigez vous vers le cinéma le plus proche. Insinuez-vous dans une queue qui ne saurait être bien longue à cette heure en examinant, comme avec les passants, attentivement le visage de vos camarades cinéphiles. Arrêtez-vous plus particulièrement sur les jeunes qui viennent mater le film en groupe. Ils ne plaisantent plus.Achetez maintenant un billet en prononçant très fort le nom de l'hôtesse d'accueil que vous aurez, préalablement, repére sur son badge d'identité, puis celui du film :eXisTenZ.N'ayez pas peur si vous ne prononcez pas bien les X majuscules, ni même si vous dites simplement " existence ", comme si vous n'aviez pas repéré que le mot s'achevait sur un Z - la dernière lettre de l'alphabet, notez-le.N'hésitez pas à réclamer une réduction quelconque, surtout si vous n'y avez pas droit pour créer autour de vous un climat d'hostilité.Entrez dans la salle, sans être allé(e) aux toilettes. Il faut que vous vous sentiez proche de l'explosion. Votre panse est énorme et votre sexe moite sous vos bourrelets abdominaux.Appréciez les bande-annonces. Un film avec Thierry Lhermitte. Un autre avec John Travolta. Les publicités maintenant. Vous vous rendez compte que l'héroïne de Carte Noire (celle qui descend du train en marche) ressemble à quelqu'un que vous connaissez. Fondu. Le film commence.Vous le regardez. Vous vous dites que les films de Cronenberg, c'est vraiment n'importe quoi, mais que vous ne supporteriez pas d'en manquer un. Cette bouffe chinoise est vraiment difficile à digérer. Ces histoires de biopodes sont écoeurantes. Jennifer Jason Leigh a une super cHemiZ. Evidemment, la réalité n'est qu'une fiction qui a réussi. Vous aimeriez bien bouffer le biopode d'Allegra. Willem Dafoe est méchant comme une vieille dame. Cette histoire n'est pas crédible mais vous savez qu'il vous faut patienter parce qu'elle est VrAie.Vous sortez. Rentrez seul(e) chez vous sans passer par le métro ou le bus. N'empruntez pas non plus un véhicule personnel. Fumez une cigarette dans l'air frais. Regardez les ombres courir autour de vous. Posez votre MaIn sur deux ou trois objets (une rampe d'escalier, une auto, une FillE, une gaufre) qui vous entourent et assurez vos arrières.Vous êtes incapable de dire si le film vous a plu. Non. C'était un mauvais FiLm. Vous êtes perturbé(e). Si c'est le cas, c'est que c'est un bon film après tout. Vous prenez une douche. Une amie vous appelle. Vous dites : Bonsoir.Elle répond :
- Bonsoir. Tu dormais ? Tu as une drôle de voix.
Vous dîtes :
- Oui. Je dormais mais je ne m'en souviens plus.Cela dure deux minutes à peine. Couchez vous. Demain, vous irez voir Romance, pour voir le biopode de Rocco. Votre BioPodE est MalADe CoMmE uN ChiEn. Crash était un film si sexy....eXisTenZ
De David Cronenberg
Avec Jennifer Jason Leigh, Jude Law, Ian Holm
Canada/France/Royaume Uni, 1999, 1h36.
- Biographie de David Cronenberg
- Lire la chronique de Spider (Cronenberg, 2001).
- Lire la chronique de Crash (Cronenberg, 1996).
- Lire la chronique d'eXIsTenZ par Brett.