Lorsqu’il reçoit le Prix du film Bavarois en 1982 pour son film Ange de fer, sorti une année auparavant, Thomas Brasch prononce un discours qui ne va pas manquer de créer une vive polémique dans l’assistance. Brasch y tient en effet des propos pleins de gratitude vis-à-vis de la RDA qui l’avait formé, occultant complètement le fait que le financement du film et le prix qui lui est attribué, provenaient eux, de l’Allemagne de l’Ouest. La fracture était encore vive en cette période, sept ans avant la chute du Mur de Berlin.Une scission qu’a vécue l’écrivain, cinéaste et dramaturge allemand Thomas Brasch dès son enfance, puisqu’il voit le jour le 19 février 1945, soit trois mois seulement avant la fin des combats en Europe et quatre ans avant la partition de l’Allemagne. Toutefois ce n’est pas sur le sol de ce pays qu’il naît, mais en Angleterre, à Westow plus exactement, dans le comté du Yorkshire. Ses parents de confession juive avaient choisi de s’y installer pour fuir le régime nazi. Le petit Thomas est âgé de deux ans lorsque sa famille décide enfin de rentrer en Allemagne, dans zone d’occupation soviétique. Son père, Horst Brasch, fut employé au ministère de la culture de l’Allemagne de l’Est. Quant à sa mère, elle était journaliste et poétesse à ses heures perdues.Thomas Brasch s’est fait un nom en écrivant une grande quantité de pièces de théâtre et de scénarios de films qui ont souvent pour cadre l’Allemagne divisée des années cinquante aux années soixante-dix. Il est à la tête d’une œuvre de plus d’une vingtaine de comédies, de drames et de pièces radiophoniques, et sa carrière s’est étalée sur près de trente années.Il écrit sa première pièce de théâtre en 1970, alors qu’il a vingt-cinq ans et l’intitule Sie geht, sie geht nicht (littéralement : elle va, elle ne va pas ). Il crée également, avec l’aide de Lothar Trolle, Das beispielhafte Leben et Der Tod des Peter Göring (littéralement : L’amour exemplaire et La mort de Peter Göring ) en 1971, suivies de Galileo Galilei – Papst Urban VIII l’année suivante. A partir de là, il n’aura de cesse de produire un nombre important de pièces pour la scène et la radio, au rythme d’une œuvre par an. Les plus connues d’entre elles sont Lovely Rita en 1975, Die argentinische Nacht (La nuit argentine) adaptée d’Oswaldo Dragùn la même année, ou encore Frauen Krieg Lustspiel en 1989, l’année du décès de son père.Thomas Brasch publie également des recueils de poèmes et de prose, à l’image de Der schöne 27 September (Le beau 27 septembre) et de Mädchenmörder Brunke, en plus de livres pour enfants (Der König vor dem Fotoapparat) et d’adaptations à l’allemand d’œuvres étrangères (Pièces d’Anton Tchekov en 1985).A partir de la fin des années soixante-dix, Thomas Brasch se consacre plutôt au cinéma, écrivant tantôt des scénarios originaux ou adaptant parfois ses propres œuvres. Il signe donc en 1979 l’intrigue de Personnalité réduite de toutes parts (Allseitig reduzierte Persönlichkeit - Die Redupers), l’histoire d’une photographe de Berlin-Ouest qui part à la recherche de travail en laissant sa fille livrée à elle-même. Le film est réalisé et joué par Helke Sander. Joachim Baumann et Andrea Malkowsky en complètent la distribution.Thomas Brasch s’essaie ensuite à la réalisation avec Engel aus Eisen ou Les Anges de Fer. Sorti en 1982, le film raconte l’histoire d’un groupe de jeunes Allemands qui, à l’époque du pont aérien, avaient fait du vol leur activité quotidienne. Une fille, membre du groupe, se retrouve un jour en possession du butin amassé des années durant par la bande et disparaît. Les Anges de Fer, que Thomas Brasch réalise également, connaît un véritable succès, avec une participation au Festival de Cannes, sans compter le fameux Prix du Film Bavarois. Hilmar Thate, Peter Brombacher, Klaus Pohl et Katharina Thalbach en sont les acteurs principaux.Thomas Brasch poursuit dans cette dynamique et réalise en 1982 Domino, pour lequel il réengage Peter Brombacher et Katharina Thalbach.En 1988, il dirige Le Passager – Welcome to Germany en collaboration avec Jureck Becker. Il fait appel à l’acteur américain Tony Curtis et à son actrice fétiche Katharina Thalbach pour jouer dans ce film qui met en scène des juifs qui, au plus fort de la période de domination nazie, acceptent de jouer les figurants dans un film antisémite dans l’espoir d’être épargnés.C’est finalement dans un Berlin qui a beaucoup changé depuis la réunification, que Thomas Brasch s’éteint le 3 novembre 2001.