"Je n'aurais peut-être pas dû le faire à l'époque..." ou comment le projet a été transformé en film Disney en cours de route.
"Balance man... Cadence man..." Tous ceux qui ont grandi dans les années 1990 connaissent cette rengaine venue de Rasta Rockett. Le feel good movie a célébré son 30e anniversaire en octobre 2023 et son réalisateur, Jon Turteltaub, en a profité pour dévoiler la vérité sur la production.
Nous repartageons ses propos pour patienter jusqu'à la rediffusion du film familial, ce soir sur W9.
Dans une interview avec The Independent, il raconte comment il a été en bataille constante avec Disney à propos des personnages, le studio ayant des réserves sur l'accent jamaïcain marqué des héros du film. Ce qui n'était pas un souci au départ. Car Rasta Rockett n'était, à l'origine, pas un film Disney !
Et si le script parlait toujours de l'arrivée improbable de l'équipe nationale jamaïcaine de bobsleigh aux Jeux olympiques d'hiver de 1988, il comportait aussi "plein de drogues, parlait de racisme et les personnages s'envoyaient beaucoup en l'air", se souvient l'acteur Rawle D. Lewis. "J'ai pu voir le projet se transformer petit à petit et devenir le film que tout le monde connaît aujourd'hui. C'était une histoire unique, que personne n’avait jamais raconté auparavant : des Jamaïcains en collants ? Du coup, tout le monde s'interrogeait et se demandait ce que Disney allait en faire..."
Jon Turteltaub raconte dans la foulée avoir lutté contre les dirigeants de Walt Disney Studios à propos des accents. Et l'acteur Just Leon confirme : "Ils voulaient que je ressemble à un Aladdin noir ! Ils voulaient une version Disney lisse. C’était difficile à encaisser, parce que je voulais que ça reste authentique. Mais en même temps, je suis un professionnel et il fallait que je fasse mon boulot". Son camarade Malik Yoba confirme : "Ils nous disaient que les gens en Amérique centrale n'allaient pas nous comprendre. À cette époque, les gens avaient moins accès aux différences culturelles et ne savaient pas vraiment à quoi ressemblait le jamaïcain."
Turteltaub révèle ainsi avoir reçu un appel téléphonique de Jeffrey Katzenberg, alors président de Disney. Il était 1 heure du matin et le patron du studio s'est fait plus cinglant :
"Il a dit : 'Si vous ne parvenez pas à ramener ces accents vers quelque chose que je peux comprendre clairement, je trouverai un réalisateur qui y arrivera...' Du coup, le lendemain, j’ai dit aux acteurs : ‘Je vais me faire virer si vous ne parlez pas tous comme Sébastien le Crabe de La Petite Sirène. S’il vous plaît, ne me faites pas virer !' Nous en avons plaisanté mais ils ont compris. Ils ont compris et m'ont promis : 'Nous n'allons pas faire Sébastien le Crabe mais nous allons faire une version américanisée du film que les gens du monde entier pourront comprendre.'"
Est-ce que les choses seraient différentes en 2023 ? Est-ce que Rasta Rockett aurait pu garder son identité jamaïcaine jusqu'au bout ?
"Les temps ont beaucoup changé en 30 ans", répond Jon Turteltaub. "Il n’y a aucune chance que je fasse ce film aujourd'hui. Et je n'aurais peut-être pas dû le faire à l'époque. Je suis du côté de ceux qui pensent que je n’aurais pas dû accepter de réaliser Rasta Rockett... Et pourtant nous avons fini par faire un très bon film à l'arrivée. Donc c'est complexe."
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