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Cannes 2015 : le guide de tous les films en compétition

THE LOBSTER

<strong>De Yorgos Lanthimos</strong>Cadrage millimétré, mise en scène proche de la chorégraphie, ton sarcastique, mystérieux et pince-sans-rire : Canine et Alps avaient installé Yorgos Lanthimos comme le nouvel espoir d?une cinéphilie auteure ? tendance janséniste. Il passe pour la première fois en compétition avec un long-métrage plus ambitieux et encore plus fou. Le pitch déjà : dans un futur dystopique, les célibataires sont arrêtés, enfermés dans un hôtel et forcés de trouver l'âme soeur en moins de 45 jours sous peine de se voir métamorphosés en animal ou envoyés en exil en pleine forêt. Joli sujet de SF clinique qui semble creuser l?allégorie de la famille comme espace totalitaire qu?on retrouve dans toute sa filmo. Mais c?est le casting qui intrigue The Lobster, aussi radical soit-il, accueille John C. Reilly, Colin Farrell, Rachel Weisz et Léa Seydoux? La plus belle montée des marches pour un film grec sans concession ?Grèce. Avec John C. Reilly, Colin Farrell, Rachel Weisz.P.L.  

MON ROI

<strong>De Maïwenn</strong> Deuxième sélection pour Maïwenn qui, avec Polisse, avait filé un grand coup de latte au cinéma français. Après le quotidien de la brigade des mineurs la réalisatrice change de registre et filme une histoire d?amour entre une fille normale et un séducteur fabuleux. Elle, c?est Emmanuelle Bercot parfaite. Lui, c?est Vincent Cassel phénoménal. Oscillant entre l?amour fou et la haine folle, leur passion devient un conte de fée moderne et trash. Animal, instinctif, tendre et carnassier, d?une immense sensiblerie et d?une violence brute, le film est déjà l?une des claques d?un festival qui pourrait faire de Maïwenn? sa reine.France. Avec Emmanuelle Bercot, Vincent Cassel, Louis Garrel. 

MIA MADRE

<strong>De Nanni Moretti</strong> Et si, pour la première fois, Nanni Moretti se cachait derrière une femme ? Même dans Bianca (1984), il restait le centre du récit à travers son alter ego de cinéma Michele Apiccella. Le "héros" de Mia Madre s?appelle Margherita (Buy). C?est une réalisatrice en train de diriger un acteur italo-américain (Turturro) dans un long métrage qui lui échappe. <em>"Ils pensent tous que je suis capable de comprendre, d?interpréter la réalité. Mais je ne comprends plus rien"</em>, dit-elle. On croirait entendre Nanni? Lui qui ne s?offrit le rôle de réalisateur à l?écran que dans Sogni d?oro (1981) joue ici le frère de Margherita, qui veille leur mère mourante, la "madre" du titre... Mais à qui appartient le "mia" ?Italie. Avec Margherita Buy, John Turturro, Nanni Moretti.I.D. 

LE FILS DE SAÜL

<strong>De Laszlo Nemes</strong>A treize ans, Laszlo Nemes tournait des films d?horreur dans la cave de ses parents. Son père Andras Jeles était un cinéaste hongrois qui a réalisé <em>Dream Brigade</em> - le dernier film banni par la censure hongroise. On a découvert Lazslo au Festival Premiers Plans d?Angers avec <em>Türelem</em> (2007), un court de dix minutes tourné en un seul plan et multiprimé. Il fait son entrée en compétition avec ce premier long, un drame situé en 1944 au camp d?Auschwitz-Birkenau. Thierry Frémaux a déjà promis que le film risquerait de relancer le débat sur la représentation de la Shoah.Hongrie. Avec Geza Röhrig, Levente Molnar, Urs Rech.I.D.

LA GIOVINEZZA (YOUTH)

<strong>De Paolo Sorrentino</strong>Le trailer est un micro chef-d??uvre : en quelques plans le plus grand formaliste italien de tous les temps imprime son ambition démesurée et ses marques de fabrique - maîtrise obsessionnelle du cadre, goût de la décadence, insoutenable mélancolie? Après La Grande Bellezza où un écrivain lucide et mélancolique observait de vieux modernes s?abîmer dans un luxe vide et des fiestas décadentes, La Giovinezza regardera deux artistes octogénaires (Michael Caine et Harvey Keitel) s?accrocher (ou pas) à la vie quand elle touche à sa fin.Italie. Avec Michael Caine, Harvey Keitel et Rachel WeiszV.A.C.  

LOUDER THAN BOMBS

<strong>De Joachim Trier</strong>Joachim Trier a explosé internationalement avec Oslo, 31 août, son adaptation norvégienne et comateuse du <em>Feu Follet</em>. Glaçante comme du Drieu la Rochelle avec de l?héro dans les veines. Le titre de son nouveau film - son premier tourné en anglais - est emprunté à un disque des Smiths (qui l?avaient eux-mêmes piqué à un poème d?Elizabeth Smart). Dans une intrigue à la <em>Rashomon</em>, Louder than bombs raconte l?histoire d?une photographe décédée, dont le mari et les deux fils vont découvrir le secret à l?occasion d?une rétrospective de son ?uvre. Le sujet est chic, le casting itou.Norvège-Danemark-France-USA. Avec Jesse Eisenberg, Isabelle Huppert, Gabriel Byrne.  

SEA OF TREES

<strong>De Gus Van Sant</strong>Dans Sea of trees, qu?il décrit  comme une histoire de survie, Matthew McConaughey joue un Américain qui a perdu ses repères. Echoué au Japon dans la forêt dite des suicides, il rencontre un Japonais perdu, Ken Watanabe. Leurs discussions vont les emmener sur des chemins inattendus qu?il appartiendra aux spectateurs de décrypter, entre rêve et réalité.USA. Avec Matthew McConaughey, Naomi Watts, Ken Watanabe.G.D.  

Cannes 2015 : le guide de la compét'

THE ASSASSIN

<strong>De Hou Hsiao-Hsien</strong>Huit ans après Le voyage du ballon rouge, Hou Hsiao-Hsien revient avec un film d?arts martiaux dont la gestation aura duré une dizaine d?années, le tournage proprement dit ayant commencé en 2010, avant de connaître plusieurs interruptions. Entretemps, il sera passé par Taïwan, la Chine continentale et le Japon. Inspirée d?une nouvelle, l?histoire a lieu au IXe siècle, pendant la dynastie Tang. On y suit une exécutrice (Shu Qi, une habituée de HHH), dont la loyauté est mise à l?épreuve quand elle tombe amoureuse de celui qu?elle doit tuer.Plusieurs raisons expliquent la durée inhabituelle de la production du film. D?abord, il a fallu chercher auprès de plusieurs sources différentes un budget d?une quinzaine de millions de dollars. La documentation a pris aussi beaucoup de temps, tout comme la construction des décors authentiques. Il a fallu aussi compter avec la façon très particulière de filmer du cinéaste, qui arrive sur le plateau sans storyboard ni shotlist. C?est le décor et l?atmosphère qui lui dictent où placer la caméra, et comment préparer le plan dans les meilleures conditions. Enfin, arts martiaux obligent, l?ajout d?effets spéciaux en postproduction a pris beaucoup de temps.Visuellement, on peut s?attendre à être éblouis, à en juger par la présence de collaborateurs fidèles comme Huang Wen-ying, sa chef décoratrice et productrice depuis 1995, et Mark Lee, le légendaire chef op. Celui-ci reste fidèle à la pellicule parce que pour lui, <em>"tourner en numérique serait comme peindre avec un stylo bille plutôt qu?avec un pinceau."</em>D?après James Udden, le biographe du cinéaste, qui était présent sur le tournage, The Assassin sera un film de Hou avant d?être un film d?arts martiaux.Taiwan. Avec Shu Qi, chang Chen, Satoshi Tsumbaki, Jiang Wen.  

DHEEPAN - L’HOMME QUI N’AIMAIT PLUS LA GUERRE

<strong>De Jacques Audiard</strong>Dheepan, c?est le nom d?un immigré srilankais qui tente de refaire sa vie en France, avec une fausse femme et une fausse fille. La violence de la cité où il échoue fait ressurgir ses démons d?ancien combattant tamoul? Le réalisateur français, qui se réinvente à chaque film, s?est entouré d?une jeune équipe : son coscénariste Noé Debré (La crème de la crème) est une valeur montante ; la directrice de la photo Eponine Momenceau, jeune promue de la Femis, s?est distinguée par son travail plastique expérimental. Réussiront-ils à insuffler une énergie nouvelle au cinéma d?Audiard fait de fulgurances visuelles et de patient travail sur le réel ?France. Avec Antonythasan Jesuthasan, Kalieaswari Srinivasan, Claudine Vinasithamby, Vincent Rottiers, Marc Zinga.C.N. 

LA LOI DU MARCHE

<strong>De Stéphane Brizé</strong>Quatrième film de cette belle sélection française en compétition, ce nouveau drame social de Stéphane Brizé (Je ne suis pas là pour être aimé) permet au réalisateur français de retrouver son acteur fétiche Vincent Lindon qu'il a déjà dirigé dans Mademoiselle Chambon (2009) et Quelques Heures de Printemps (2012), et le plonge cette fois en pleine crise : après presque deux ans de chômage, Thierry, la cinquantaine, retrouve un emploi mais la situation sociale fait qu'il se retrouve face à un dilemme : pour garder le job, est-il prêt à tout ?Un film dans l'air du temps qui permet au cinéaste français de connaître sa première sélection cannoise.France. Avec Vincent Lindon.  

MARGUERITE ET JULIEN

<strong>De Valérie Donzelli</strong><em>"Je ne suis pas allé à Cannes depuis</em> Mon Oncle d?Amérique en 1980. J?ai le souvenir d?une cuite carabinée à la vodka avec Marina Vlady !", se remémore Jean Gruault, 90 ans, scénariste de Truffaut (Jules et Jim, Les deux Anglaises et le Continent) et de Resnais (La Vie est un roman, L?Amour à mort) est visiblement enthousiaste à l?idée de re-fouler le tapis rouge de la Croisette. Mais il prévient : il faudra aménager sa venue. <em>"A l?époque, ils m?avaient trouvé un fauteuil roulant pour le vernissage de l?exposition Truffaut. Alors là?"</em>. Toujours actif, Gruault écrit, produit, bref <em>"gamberge"</em>. Et ne tarit pas d?éloges sur Valérie Donzelli qui est venue le chercher pour adapter son <em>Julien et Marguerite</em> (belle inversion des prénoms pour le film), un script écrit en 1973 pour Truffaut, mais jamais tourné. <em>"Truffaut, puis Brialy, avaient renoncé pour tout un tas de raisons. La télévision aussi, à cause du sujet."</em> Récit de la passion - vraie - entre Julien et Marguerite de Ravalet, exécutés en 1603 pour adultère et inceste, le scénario original a été remanié par Gruault, Donzelli et Jérémie Elkaïm. <em>"Ça empoisonnait Valérie de tourner de façon classique. Le résultat est une sorte de mise en abyme avec l?histoire de Marguerite et Julien racontée par une fille dans un pensionnat. C?est bourré d?anachronismes, j?aime beaucoup ça !"</em>France. Avec Anaïs Demoustier, Jérémie Elkaïm, Frédéric Pierrot.C.N.  

THE TALE OF TALES

<strong>De Matteo Garrone</strong>En adaptant les contes de Giambattista Basile (le <em>"Shakespeare napolitain déformé"</em>, dixit Italo Calvino), Matteo Garrone investit le domaine de la fantaisie. Il y a trouvé <em>"un mélange de réel et d?irréel qui a toujours caractérisé ce qu[?il] recherche en tant qu?artiste"</em>. Les thèmes abordés sont familiers : quête de la beauté éternelle, souffrance d?une femme qui voudrait un enfant, conflits de générations et appétit du pouvoir. Gorgée d?images fortes et prometteuses, la bande-annonce évoque un croisement improbable entre Pier Paolo Pasolini et Guillermo del Toro.Italie. Avec Vincent Cassel, Salma Hayek, John C. Reilly, Toby Jones.G.D.   

CAROL

De Todd HaynesIl y a deux ans, Kechiche mettait Cannes à ses pieds en filmant une histoire d?amour, de manque et d?obsession saphique et brûlante. Todd Haynes arrivera-t-il à susciter autant d?émotions avec Carol, récit de l?amour fou d?une riche new-yorkaise, mariée et mère de famille, pour une jeune et fragile vendeuse ? Adapté du roman controversé de Patricia Highsmith, cette passion qui faisait scandale en 1952 ne suffirait plus aujourd?hui à faire lever un sourcil. On compte sur le goût pour la provoc et la subversion de l?égérie du cinéma queer - primé à Cannes en 98 avec Velvet Goldmine - pour faire monter le thermomètre. On compte surtout sur l?alchimie entre ses deux interprètes principales Cate Blanchett et Rooney Mara.USA. Avec Cate Blanchett et Rooney Mara.V.A.C.  

MOUNTAINS MAY DEPART

<strong>De Jia Zhang-Ke</strong>Dans A touch of Sin, en 2013, Jia Zhang-Ke racontait la Chine contemporaine en quatre sketchs, quatre portraits d?opprimés (et repartait avec un prix du scénario remis par le jury de Spielberg). Dans <em>Moutains may depart</em>, il choisit une structure en trois temps pour se balader entre les époques (des années 90 à 2025, en passant par aujourd?hui). On retrouve sur le papier l?idée de la fresque sociologique et politique embrassant un horizon immense. Mais, comme toujours chez Jia, c?est surtout pour la puissance et la splendeur plastique sidérante de ses visions qu?on sera au premier rang du Théâtre Lumière.Chine-France. Avec Tao Zhao.  

NOTRE PETITE SŒUR

<strong>De Hirokazu Kore-Eda</strong>Le plus beau titre de la compétition. Avec Notre petite s?ur, Hirokazu Kore-Eda (le cinéaste nippon en activité le plus présent en compétition) reprend une fois de plus son thème fétiche, la famille. Ici, trois s?urs apprennent, à la mort de leur père, l?existence d?une demi-s?ur de 13 ans, désormais orpheline. Elles décident de l?accueillir dans la grande maison qu?elles occupent. On peut déjà vous le dire : douceur, maîtrise (du sujet, du cinéma, des sentiments), dignité, ne cherchez plus le film-émotion de la quinzaine. C?est celui-là.Japon. Avec Haruka Ayase, Masami Nagasawa, Suzu Hirose.C.N. 

MACBETH

<strong>De Justin Kurzel</strong>Monument dramaturgique, la pièce de Shakespeare inspira à Orson Welles une ?uvre mortifère et expressionniste et à Roman Polanski une débauche de sauvagerie et de grandiloquence. Quelle sera la tonalité de l?adaptation de Justin Kurzel ? Sans doute très sombre. Remarqué pour le violent et dégénéré Les crimes de Snowtown, le réalisateur australien a le profil et les acteurs (Cotillard et Fassbender en couple diabolique) pour accoucher d?un drame majuscule aux résonances contemporaines. Fassbender interpréterait ainsi un Macbeth brisé par la guerre et sa violence, qui développe ce qu?on n?appelait pas encore le trouble de stress post-traumatique.GB. Avec Marion Cotillard, Michael Fassbender, Jack Reynor, David Heyman.C.N. 

THE VALLEY OF LOVE

<strong>De Guillaume Nicloux</strong>Première sélection en compétition cannoise pour Guillaume Nicloux.Avec sa très attendue Valley of Love, le réalisateur des récents L'enlèvement de Michel Houellebecq et La Religieuse, "gonfle" la présence française à cinq films dans la course à la Palme d'Or. Un film poignant sur la perte d'un enfant et le trajet salvateur de ses parents esseulés - campés par Gérard Depardieu et Isabelle Huppert - jusqu'au c?ur de la vallée de la mort. France. Avec Gérard Depardieu et Isabelle Huppert. 

CHRONIC

<strong>De Michel Franco</strong>L'ultime film sélectionné pour la compétition n'est autre que Chronic, du brillant cinéaste mexicain Michel Franco, qui plonge la star Tim Roth (que nous retrouverons prochainement dans The Hateful Eight de Quentin Tarantino) dans la peau d'un infirmier qui suit des patients en phase terminale.Ce travail douloureux stimule une introspection chez lui, et il va alors essayer de renouer contact avec ses proches dont il s'est éloigné il y a déjà de nombreuses années. A noter que Michel Franco, 35 ans, sera le benjamin de cette compétition décidément très relevée. Mexique/USA. Avec Tim Roth et Bitsie Tulloch. 

Le mercredi 13 mai, le 68e Festival de Cannes s'ouvrira sous la présidence des cinéastes américains Joel et Ethan Coen, habitués de la Croisette où ils avaient été couronnés par la Palme d'Or en 1991 avec leur formidable Barton Fink.S'il manque encore quelques films à la sélection officielle (qui seront annoncés dans les prochains jours), avec les informations de la conférence de presse tenue il y a quelques jours nous avons désormais une vision claire de ce qui nous attendra sur la Croisette pendant une douzaine de jours, où nous retrouverons des habitués du festival comme Jacques AudiardMatteo GarronePaolo SorrentinoMaïwennNanni Moretti ou encore Gus Van Sant, pour ne citer qu'eux.Dix-sept films (pour le moment) qui seront projetés aux frères Coen et à leur prestigieux jury (connu depuis hier soir) entre le 13 et 24 mai, date de la cérémonie de clôture et donc du verdict.A moins d'un mois du début des festivités, et pour voir un peu plus clair dans cette nouvelle édition très excitante et prometteuse du plus grand festival de cinéma du monde, une seule solution : suivez le guide.