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Frank Miller, créateur et coréalisateur de Sin City, adapte pour sa première sortie en solo la BD séminale de Will Eisner, qui révolutionna le comic book en 1940. Les fans d’Eisner risquent de s’étrangler avec la cravate rouge de leur héros tant Miller impose son style à un matériau qui ne supporte pas la greffe... On se trouve en face d’un grand barnum numérique mixant film néonoir et cartoon, premier et quinzième degré, jusqu’à ce que les intentions finissent par nous échapper totalement. M.C.
Toutes les critiques de The Spirit
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
- Ellepar Helena Villovitch
On sautille de scène en scène et on trouve son rythme ... ou pas.
- Fluctuat
Avec The Spirit, Frank Miller rend hommage à son mentor Will Eisner, référence absolue du comics et du graphic novel américain. Comme Sin City, un film bourré de défauts, beaucoup trop bavard et écrit, mais en mieux. Pas mal. On ne sait encore trop par quel bout prendre ce cinéma digital inventé en Asie puis débarqué à Hollywood. Ces films mutants dont Sin City et 300 sont devenus les têtes de pont en même temps que le grand public prenait connaissance de l'existence de Frank Miller, père ou auteur des deux bidules qui en ont traumatisé plus d'un. Difficile de juger de ces oeuvres impures par essence, tentant la symbiose parfaite et idéale entre le cinéma traditionnel et le tout numérique pour respecter au plus près l'esthétique des graphic novel de Miller. La lumière est devenue crépusculaire, presque mortuaire. Ses reflets sur la peau ont quelque chose de morbide, comme si les corps, noyés sous un puissant vernis numérique, n'étaient plus que les pâles reflets des acteurs. Plus rien de vivant, de naturel, tout est artifice, jusqu'à l'excès. The Spirit, hommage au personnage inventé par Will Eisner, mentor de Frank Miller qui signe ici sa première réalisation en solo, ne change a priori pas la donne. Pourtant quelques éléments varient ou renforcent ce qui était déjà à l'oeuvre dans Sin City. Des détails qui nous font dire que Miller se situe à plusieurs frontières tirant ses films, et The Spirit en particulier, vers des zones en apparence contradictoires.Les premières images du film évoquent spontanément Sin City : son esthétique pulp archi saturée, laquée ; son ambiance fantasmatique de film noir dont Miller est resté traumatisé ; ses effets graphiques avec les touches de couleurs surgissant d'un noir et blanc tranché. L'atmosphère est nocturne, urbaine, brumeuse, ostensiblement clichée : succession de bribes balisées de New York, ses façades, ses toits, ses châteaux d'eau, et c'est tout - ce qui est peu pour une ville supposée être un personnage central de l'intrigue (sans doute la chose la plus ratée du film). Toujours à l'image de Sin City, l'espace est mort, sans perspectives, de profondeur de champ, tout est fabriqué, numérisé. Les corps des acteurs, héros ou femmes fatales, collent à leurs figures de papiers, comme dépossédés de leurs enveloppes. La mise en scène au sens classique a disparu. Elle devient une mise en image, une composition, arrangement de décors et de corps sur une série de plans construisant des bouts de scènes juxtaposées. L'image est pensée en deux dimensions, rarement en termes de volume, de verticalité ou d'horizontalité. Pourtant, The Spirit comme Sin City n'est pas un comics filmé, il est plus et moins que ça. Car Frank Miller, dieu vivant du graphic novel, invente autre chose.Le paradoxe qui frappait Sin City est accentué dans The Spirit : moins un film misant sur sa sensualité visuelle que son envie et besoin de narration. Rien n'a donc changé, c'est pire, The Spirit est un film archi écrit. Il y a là une volonté de respecter l'oeuvre de Will Eisner, mais peu importe. Car du passage de l'écrit pour la bande dessinée au scénario, Miller n'a pas conscience des différences de format. Au final, il ne fait pas du cinéma, d'ailleurs il n'en a absolument aucune idée. Pour cette raison, Sin City et plus encore The Spirit, sont noyés dans un océan de dialogues, jusqu'à l'overdose. Ses tunnels de bavardages interminables nuisent à l'action et au récit qui ne peuvent s'en passer. Mais en dépit de ces faiblesses, l'artificialité du film, le jeu des acteurs, tous absolument faux ou grotesques (volontairement ou non) renvoient à une ambiance et une esthétique de vieille série B télévisée. Ce côté fauché et très théâtral, sur une structure pleine de ruptures de tons (émaillée d'un comique absurde et grotesque plaisant), donne au film un charme collant aux fantasmes néo noir de Frank Miller - en un sens, il réinvente le film de studio. Au final une oeuvre personnelle, radicale, pas évidente, parfois limite voire laborieuse, mais sans hésitation la plus passionnante de son auteur sur un écran.The SpiritDe Frank MillerAvec : Gabriel Macht, Samuel L. Jackson, Scarlett JohanssonSortie en salles le 31 décembre 2008 Illus. © Lions Gate Films Exprimez-vous sur le forum cinéma
Le JDDpar Stéphanie BelpêcheN'évitant pas les longueurs ni les gags scato indignes de lui, Franck Miller peine à se renouveler.