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En Suisse, dans le chalet d’un grand dramaturge récemment décédé, une actrice répète le texte de sa prochaine pièce avec son assistante. Il y a deux versants dans la filmographie d’Olivier Assayas, deux tendances parfois contradictoires que son petit dernier essaie de concilier. D’un côté, le drame néo-tchekhovien, l’envie de se confronter à la pesanteur du temps et de l’histoire – appelons cela sa veine "L’Heure d’été". De l’autre, le goût pour la vitesse et les symboles de la modernité (iPad, Google, Skype...) chargés de faire sens – ça, c’est l’école "Demonlover". "Sils Maria" se situe au carrefour de ces inclinations, dans un entre-deux un peu flou, parfois très mou, qui donne l’impression que le réalisateur n’a pas réellement choisi le film qu’il voulait faire. Obnubilé par l’idée d’être aussi léger et volatil que ses personnages de hipsters globe-trotteurs, il échoue à saisir la densité mémorielle des montagnes suisses de "Sils Maria", contemplées en leur temps par Nietzsche, Proust ou Thomas Mann, mais réduites ici au statut de vignettes décoratives. Il n’est malheureusement pas beaucoup plus inspiré dans sa critique des images contemporaines – voir cet invraisemblable pastiche de blockbuster américain, qui donne l’impression qu’il n’a rien vu dans le genre depuis le "Flash Gordon" de 1981... Ces contradictions, Assayas finit pourtant par les résoudre en envisageant surtout "Sils Maria" comme un film d’actrices, une relecture light d’"Eve" ou de "Persona". Juliette Binoche, très diva, n’avait pas été aussi bien employée depuis longtemps. Et Kristen Stewart, d’une classe folle, est aussi instantanément iconique que dans "Les Runaways". Sa prestation, après celle de Robert Pattinson dans "The Rover", prouvera à ceux qui en doutent encore que les stars fabriquées par "Twilight" sont bien là pour durer.
Toutes les critiques de Sils Maria
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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(...) des images magnifiques et des dialogues brillants, on regrette l’absence de ce grand film au palmarès du Festival de Cannes.
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Sils Maria : Olivier Assayas au sommet de son art. Passé, présent, futur, le temps recomposé d'Olivier Assayas prend toute sa dimension dans ce film aux mille visages, dont on ne retiendra finalement que celui de son héroïne, la vertigineuse Juliette Binoche, qui compose un jeu d'une intensité renversante.
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Attendu au tournant, le réalisateur de Carlos livre un film émouvant et sensible. A mi-chemin entre le huis clos et le film de montagne à la photo spectaculaire, le nouveau Olivier Assayas est un bijou. Il y retrouve une Juliette binoche magistrale (après "L'heure d'été", en 2008), Kristen Stewart, réservée et naturelle, supporte la comparaison. Une réussite.
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L'écriture et la mise en scène d'Assayas atteignent ici une apogée. Si les répétitions peuvent sembler au prime abord répétitives, elles s'imbriquent rapidement dans une identification situationniste entre les deux femmes de plus en plus graduelle. Jusqu'à une mystérieuse conclusion calquée sur la dramaturgie du texte. Juliette Binoche excelle dans son rôle, tout comme Kristen Stewart, des plus talentueuses, mais également Chloé Grace Moretz, en égérie des adolescents, beaucoup plus mature qu'elle n'y paraît et dont les affres postées sur Internet sont d'un comique irrésistible. Avec ce trio, Olivier Assayas réalise un film de femmes, comme nombre de ses autres longs métrages.
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Sils Maria” constitue une magnifique déclaration d'amour au cinéma et à ses actrices. Avec une Juliette Binoche spontanée et juste.
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le réalisateur de Carlos livre un film émouvant et sensible.
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Olivier Assayas signe l’un de ses meilleurs films avec cette réflexion sur l’art du comédien, portée par une sublime Juliette Binoche. Superbe variation autour des thèmes du métier de comédienne, du temps qui passe et des relations professionnelles, Sils Maria est l’une des meilleures réussites d’Olivier Assayas, cinéaste inégal mais ici très inspiré.
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Autour de deux actrices au sommet, le film d'Olivier Assayas éblouit par sa fluidité et sa richesse émotionnelle. "Sils Maria" appartient à la famille des films qui chantent le spectacle, ses charmes puissants et ses vapeurs toxiques. (...) La mise en scène fluide, qui utilise le roulis du train, l'étroitesse des couloirs et la perfection du jeu des actrices, suscite immédiatement l'illusion d'être passé dans les coulisses du spectacle, dans les cuisines où se fabriquent, sans qu'on puisse les distinguer, l'art et les innombrables conversations qu'il inspire, des plus futiles aux plus graves.
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Reptile. Olivier Assayas fait tournoyer le trio d’actrices Binoche-Stewart-Moretz. Dans ce flou alpin intellectuel et vénéneux, le serpent de Maloja, celui du décor nuageux comme l’intrigue de la pièce, se resserre, se mord la queue, happe Maria Enders dans une magnifique asphyxie de cinéma.
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Olivier Assayas, loin du démiurge kéchichien, laisse éclore une énergie brute dans un film dense, épais, parfois pesant, mais toujours enivrant.
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Olivier Assayas tisse un entrelacs complexe de liens entre ses personnages (Juliette Binoche et Kristen Stewart, exceptionnelles) et le monde pour réussir son œuvre la plus contemporaine et la plus bouleversante. "Sils Maria" est un huis clos bergmanien (cf. Persona) traversé sans répit par les grands flux d’images, de commerce et de communication de notre monde. La grande apnée en soi d’une retraite montagnarde y est sans cesse bousculée par le chahut planétaire.
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Véritable film gigogne, SILS MARIA accumule les références pop rigolotes – les rumeurs de casting sur les blockbusters super-héroïques – ou plus ‘militantes’ – l’affirmation du gossip comme information avérée. Pas franchement jeu de massacre non plus (et tant mieux), SILS MARIA peine parfois par excès d’ambition et, peut-être qu’en multipliant les passerelles entre fiction et réalité, Assayas pousse davantage le spectateur à réfléchir qu’à ressentir le destin de ses héroïnes. Il n’en demeure pas moins que le duel Binoche / Stewart, qui constitue 80% du film, fonctionne redoutablement.
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Ce film de femmes transgénérationnel scandé par le ballet 2.0 des réseaux sociaux en appelle à "All About Eve" et à Bergman. Il fallait un réalisateur au faîte de sa maturité pour le réussir. Assayas est sans conteste celui-là.
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On est là au coeur du cinéma d'Assayas, qui brasse, dans un même élan et avec plus ou moins de bonheur selon les films, intimité et romanesque : Maria/Binoche est comédienne, Valentine/Stewart est son assistante-coach-copine-employée ; ensemble, elles répètent une pièce qui éclaire et empoisonne leur relation, leur vie, leurs ambitions -la faiblesse du texte et sa fausse complexité sont le (gros) point faible du scénario. (...) Cette fois, Olivier Assayas trouve justement le bon équilibre. Une façon pertinente d'aborder son sujet en l'attaquant à l'os pour mieux aller se balader sur les chemins montagneux. Réaliste ici, impressionniste, là.
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Film exigeant, sur mesure pour Juliette Binoche, par son propos sur la condition de l'acteur et les jeux de miroir entre fiction et réel, « Sils Maria » crée une curiosité décalée avec la présence, impeccable, de la star de « Twilight ».