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Que l’on imagine d’abord une mâchoire distendue comme dans un cartoon de Tex Avery, puis le bruit mat du menton au moment où il atteint la moquette. On se fera alors une idée de l’ébahissement progressif, incrédule, paralysant, extraterrestre qui accompagne la vision de ce spectacle. Le scénario, pourtant tiré d’une histoire vraie, transforme le déni hallucinatoire d’un jeune juif, persuadé que sa
famille, envoyée dans les camps de la mort, est toujours à ses côtés, en un Himalaya de maladresse, d’arbitraire et de schématisme mêlés. Reste le bonheur espiègle de voir le film se tirer une balle dans le pied en s’achevant sur une réplique en forme de délivrance : « C’est fini, Louis, il ne faut pas rester là. »
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Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Un mélo pas franchement torride mais plaisamment vaporeux, qui tire son charme discret de ses faux-semblants fantastiques, évoquant vaguement les fables à tiroirs de Raoul Ruiz (dont le musicien attitré, l’impeccable Jorge Arriagada, signe la BO).
En prime, dans le rôle de la jeune diva, la piquante Fanny Valette, sorte de cousine cachée d’Audrey Tautou, dont on s’étonne qu’elle ne tourne pas plus. -
Je ne vous oublierai jamais est un peu au Sixième sens ce que Mademoiselle Chambon est à Sur la route de Madison : une sorte de succédané confirmant si besoin était que dans l'excès comme dans la retenue, le cinéma de genre de chez nous manque trop souvent de ce petit quelque chose que l'on ne saurait nommer. Une conviction ? Plutôt une visée esthétique du scénario. Un grand réalisateur de films de genre semble penser ses histoires bigger than life à partir du spectateur qu'il demeure. Là où d'autres semblent ne se soucier que de lecture, de la juste réception d'un message presque inaudible sur grand écran. Dans « Je ne vous oublierai jamais », on comprend trop bien que le « vous » n'est destiné qu'aux trois femmes de la vie de Levilé. Là où l'on préfèrerait croire encore que face à toute histoire qui se respecte, la nuit appartient avant tout au spectateur.
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Très vite, pourtant, quelque chose d’impalpable vient s’inscrire en faux au creux du scénario : et si seuls les fantasmes de Levilé le guidaient ? Pascal Kané ("Liberty Belle") s’inspire de la vie de son père – c’est dire si le film lui tient à cœur – mais se prend les pieds dans le tapis d’un fatras psychanalytique (imaginaire ou réalité ?) noyé sous une lumière atroce. Les quelques éléments provocants – des victimes de la Shoah montrées comme trois Parques possessives – s’y dissolvent sous un fantastique maladroit et pesant.
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L'ambition du projet est inversement proportionnelle au résultat, et l'on guette en vain que quelque chose se transcende et ne se heurte qu'à la mise en scène poussive d'une dramatique télé. L'auteur rate l'occasion d'évoquer les activités militantes de Varian Fry, cet américain installé à Marseille qui aida de nombreux intellectuels juifs à se cacher et à fuir l'Europe (il n'est mentionné dans le film que très anecdotiquement), et échoue particulièrement dans sa représentation des trois femmes qui hantent l'inconscient du héros.
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Fantasme ? Réalité ? Le cinéaste tente d'entretenir le mystère et de créer une atmosphère. En vain.