-
Une fresque historique sur trois jours, c’est possible ? Un « Il était une fois en Géorgie » de poche, du Cimino à petite échelle ? Ça tient à peu de chose, en réalité : un casting de petites gueules sublimes, une scène de mariage sensationnelle, un « paysage » d’URSS 1983 parfaitement restitué (papier peint terne, femmes en collants, KGB qui traîne) sans oublier le parfum romanesque de la fuite guerre froide, un truc qui marche à chaque fois. Ils ont vingt ans, font partie de l’élite de Tbilissi, certains sont célèbres, certains sont en couple, il y a une cousine, des potes, et ils décident de passer à l’Ouest. L’occasion : le mariage de deux d’entre eux. L’avion pour la lune de miel qui décolle le lendemain semble rendre le coup possible. « Inspiré » par une histoire réelle de détournement aérien qui tourne mal, Hostages est le récit d’un fiasco terrible. Ses gamins pirates sont des privilégiés qui écoutent les Beatles et fument des cigarettes US chopées au marché noir, persuadés que le monde les attend et que la liberté se choisit. Entre inconscience et responsabilité, entre courage et caprice, entre jeunesse et immaturité, Rezo Gigineishvili n’a pas besoin de trancher. Il ne magnifie rien, ne maquille ni l’échec en héroïsme, ni les coupables en victimes. Il raconte, dur, factuel mais jamais neutre, attaché à créer une mise en scène qui capte les regards de ses personnages. Ceux qui brûlent de désir de vivre, ceux qui perdent leur sang froid et ceux qui semblent s’interroger, hébétés, sur le moment où la situation leur a échappé.