-
Sans voix off ni interventions d’aucune sorte, Wadimoff se fie à la force des images. Cette confiance aveugle dans le médium cinéma est réjouissante et, de fait, certains plans sont d’une puissance époustouflante. Malgré tout, un peu d’implication narrative n’aurait pas nui – plus de clarté sur les circonstances de ces rencontres, sur certains choix faits au montage. Ce qui est limpide, en revanche, c’est que l’absurdité (« Nous vivons avec la certitude qu’une autre bombe ne nous ratera pas ») le dispute au besoin de croire à nouveau en un avenir possible. « Aisheen », en arabe, signifie « toujours vivant ».
Toutes les critiques de Aisheen, Still Alive in Gaza
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
-
Je peux me consoler en me disant que voir Aisheen restera peut-être pour moi une expérience émotionnelle, morale, voire ophtalmologique. Je m'en serais voulu de ne pas l'avoir vu (...)
-
« Aisheen » signifie « toujours vivant » et c’est la vie que filme le réalisateur, ses chemins émouvants, poétiques, absurdes, captés dans les lieux de tous les jours et le quotidien des habitants : un père et ses fils devant l’oliveraie familiale plusieurs fois centenaire réduite à un tas de bois ; une jeune mère veillant son bébé asphyxié au phosphore ; des pêcheurs sur la plage réunis autour d’un maigre poisson ; au centre de loisirs, des enfants auxquels on ressasse les malheurs de la guerre ; au zoo où lese jeunes gardiens nourrissent les animaux de graines pour oiseaux, et présentent, maladroitement empaillés, ceux qui sont morts de faim ; des rappeurs affrontant la censure de Radio Gaza... Vivants mais, comme le dit un adolescent, désespérant d’avoir des rêves.
-
A la vocation pédagogique et analytique de L'Accord, qui présentait les points de vue de tous les protagonistes de ce conflit, succède un document plus subjectif et impressionniste, qui veut avant toute chose témoigner, aux côtés de la population de Gaza, du désastre, du désespoir et de l'impasse produits par les bombardements israéliens. Ce faisant, le réalisateur gagne en émotion et en sensibilité ce qu'il perd dans l'intelligence de la situation comme dans la possibilité d'en éclairer les enjeux particuliers. Ce genre de postulat, appliqué à un conflit aussi complexe et douloureux, est toujours risqué. On est néanmoins d'autant plus enclin à en admettre le principe que le film est à la fois sensible, juste et touchant et qu'il en va, en dernier ressort, de la liberté du réalisateur de le placer sous de tels auspices.
-
Le combat pour la survie est détaillé avec beaucoup de force, d’autant qu’aucune voix off rassurante n’est là pour dédramatiser les scènes. Toutefois, notre enthousiasme est tempéré par quelques oublis volontaires de la part de l’auteur, alors que ces éléments auraient permis de nuancer le propos et de rendre la démonstration de Wadimoff inattaquable. Ainsi, le réalisateur n’insiste guère sur la provenance des fonds nécessaires au tournage de son documentaire ; à savoir la chaîne pédagogique d’Al Jazeera. Le fait de ne jamais donner la parole aux Israéliens, de ne jamais nommer le Hamas ou encore d’oublier de mentionner que les tunnels qui vont de l’Egypte à Gaza servent aussi à alimenter en armes le parti islamiste, sont autant d’oublis qui orientent forcément la perception des spectateurs. Le cinéaste s’en sort in extremis grâce à quelques séquences dans les vingt dernières minutes qui montrent un jeune groupe de rap palestinien, très critiqué par le régime du Hamas. On peut donc regretter que le cinéaste ne se positionne pas plus clairement vis-à-vis de cette situation, tout en admirant son travail, nécessaire pour mieux comprendre l’état d’esprit d’une population encore sous le choc.
-
Le regard du cinéaste, suisse, est impressionniste. Nul commentaire ni explication, mais une série de rencontres qui semblent de hasard. Deux jeunes garçons qui partent en mer pour pêcher et qui rapportent un unique poisson. Des clowns qui font leur numéro dans une école. Une adolescente s'expliquant sur son désir d'être une martyre....
La caméra saisit parfois des scènes hallucinantes, comme cette distribution chaotique de nourriture où l'on voit une foule écrasée contre les barreaux d'un guichet... La situation globale est loin d'être rose, encore aggravée par la mainmise du Hamas, mais le film échappe le plus souvent au misérabilisme. Il déniche même de l'espoir à travers deux rappeurs, bluffants par leur courage et leur liberté de pensée.