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Lilian s’ennuie mollement entre sa vie de lycéenne et son blondinet de copain, avec qui elle couche sans conviction. Profitant d’un voyage scolaire à Washington, elle se fait la malle de ce quotidien cotonneux en passant de l’autre côté d’un miroir planqué dans les toilettes d’une pizzeria. The Sweet East s’assume d’emblée comme un conte de fées détraqué, une variation autour d’Alice au pays des Merveilles où la fosse à purin remplacerait le terrier du lapin blanc. En chemin, Lilian s’inventera de nouvelles vies en explorant les États-Unis par ses égouts (les complotistes siphonnés et armés, les néo-nazis tendance pédophiles, les islamistes kidnappeurs… ), subissant rarement ce qui lui arrive et s’échappant à peu près quand elle le veut. Sean Price Williams, ancien chef opérateur des frères Safdie (Good Time) et d’Alex Ross Perry (Her Smell), envisage cette coming of age story bizarroïde comme une façon d’ausculter tout ce qui cloche dans son pays, distribuant les coups à parts égales. Épuisant, cynique, inconfortable, bordélique, malsain, lumineux, irrévérencieux… On pourrait lister sur cent lignes les adjectifs qui qualifient le mieux The Sweet East, objet si « indie » qu’il en deviendrait presque parodique par moments. Pourtant le film survit à toutes ses ruptures de ton, grâce à un humour noir féroce et à la performance incroyable de son héroïne : Talia Ryder hypnotise la caméra à la seule force de quelques moues et de ses yeux gris-bleus. Déjà la révélation de l’année.