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Dans un Miami à moitié submergé (dérèglement climatique oblige), Nick Bannister (interprété avec classe par Hugh Jackman) est un ancien soldat devenu détective privé. A l’aide d’une étrange machine, il s’invite dans la mémoire de ses clients qui peuvent revivre des moments de leur propre passé en 3D. Lorsque la mystérieuse Mae (Rebecca Fergusson en femme fatale impénétrable) franchit les portes du bureau de Bannister, elle veut utiliser la machine pour un obscur prétexte. Mae va en réalité embarquer le héros dans une aventure dangereuse où il va devoir affronter politicens véreux, flics corrompus et dealers violents.
Reminiscence est le premier long de Lisa Joy et dès le début, la cinéaste prend bien soin d’afficher ses références, comme des blanc- seings. Depuis la voix off jusqu’à la femme fatale, en passant par le milliardaire cynique et les décors éclairés au néon, Lisa Joy marche sur la trace des grands films noirs. Un peu de Chinatown, beaucoup de Blade Runner un soupçon de Minority Report : le film-hommage est conscient et maîtrisé. La cinéaste joue avec habileté sur les clichés du genre ; elle peut s’appuyer sur un couple de comédiens glamour, et réussit quelques belles séquences d’action (dont une scène sous-marine gracieuse). Mais c’est surtout à Christopher Nolan qu’on pense en voyant Reminiscence. Lisa Joy est la belle-sœur du réalisateur d’Inception, mais elle est surtout obsédée par les mêmes thématiques que son beauf. Son blockbuster-prototype explore ainsi le domaine des rêves, scrute les effets (dévastateurs) du temps et joue avec des couches narratives superposées. Elle télescope les timelines, les réalités, les pulsions de mort dans un ballet parfois confus mais qui cherche toujours à orchestrer la perte des sens. L’ennui, c’est que son techno-thriller ne décolle jamais tout à fait, la faute à des prétextes un peu trop téléphonés (la femme fatale rentre chez le détective privé parce qu’elle a perdu… ses clés), à des personnages inexistants et à un enjeu finalement très mince. Ce n’est qu’à la fin, quand elle touche enfin le rivage de la pure mythologie, qu’elle joue avec des notions finalement plus littéraires que visuelles ou théoriques, qu’elle finit par trouver la note de son film et son émotion – un peu trop tard.