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A la base on trouve un roman de Georges Simenon. Pas une enquête du commissaire Maigret, mais le portrait d’un vieil acteur usé, lassé, qui va mourir. Ecrit en 1950, ce portrait d’un monstre sacré fait partie des romans blêmes de l’écrivain belge, épurés et méditatifs. A la fin de sa vie, Maurice Pialat pense un temps l’adapter et convainc Depardieu de jouer cet acteur envahissant. On voit bien ce qui, dans le roman, avait pu plaire au cinéaste : la brièveté, la progression lapidaire, l'ellipse. Et puis l’homme nu, sans fard. Pialat disparu, le projet s’enlise jusqu’à ce que Jean Becker, vingt ans plus tard, le récupère. Toujours avec Depardieu. Ecrit par Jean-Loup Dabadie disparu il y a deux ans et dont on retrouve ici la nonchalante mélancolie, la passion pour les cafés et les saltimbanques, le film raconte donc l’errance d’un comédien surdoué au seuil de la vie. Futur et passé se télescopent, regrets et angoisses s’imbriquent, et le souvenir d’une femme jadis (mal) aimée (Fanny Ardant radieuse) se recompose quand débarque une jeune femme qu’il ne peut décemment pas séduire… De Paris à la côte méditerranéenne, de courses de taxis en répétions de théâtre, Becker tisse donc le portrait d’un acteur en sursis. Rien de neuf sous le soleil direz-vous, tant réaliser le film testamentaire de Depardieu semble être l’obsession de tous les cinéastes qui l’emploient depuis maintenant des années. Il y a de cela évidemment, mais Becker et Dabadie lui offrent un peu plus que cela. Un espace de liberté où l’on peut enfin le voir jouer, vivre, respirer. Car le scénario volontairement lâche (il s’agit d’une succession de moments de vie), la mise en scène minimaliste, permettent à l’ogre de faire des prouesses. Tour à tour tellurique ou gracieux (la scène du menu), grave ou enjoué, il rappelle ici sa puissance phénoménale.