- Première
Un nouveau Kôji Fukada ? Oui et non. Car bien qu’inédit en France, cette Comédie humaine, remonte à 2008, bien avant donc qu’il se fasse connaître du public français avec Au revoir l’été, Harmonium ou Fuis moi je suis/ Suis moi je te fuis. A cette occasion, le cinéaste, issu d’une formation littéraire, adaptait pour la deuxième fois (après son court métrage d’animation La Grenadière en 2005) une œuvre d’Honoré de Balzac. Et comme le titre l’indique, il y met donc en scène la condition humaine, ses tergiversations universelles qui rongent les protagonistes. La solitude, la communication et l’état de conscience sur cette fatalité commune – des sujets sensibles abordés dans un triptyque social avec une forme qui fait écho à Contes du Hasard et Autres Fantaisies de Ryusuke Hamaguchi où plusieurs actes sont dédiés à des destins disparates qui s’entremêlent subtilement.
La première histoire implique une place de théâtre égarée et gracieusement remplacée par une inconnue qui subit le lapin posé par son compagnon. Dans la seconde, on y voit une photographe blessée par l’échec public du vernissage de sa nouvelle exposition, se raccrochant à l’infime espoir que quelqu’un daigne combler cette pièce. La dernière, aborde la récente amputation du bras droit d’un homme et la place que le malheureux souhaite accorder au membre mutilé. Faut-il l’inhumer ? Faut-il le maintenir en vie par le syndrome du membre fantôme ?
Dans La Comédie humaine, la qualité des volets va crescendo jusqu’à sa dernière ligne droite qui aborde une vie ordinaire au destin extraordinairement perturbé où, brutalement privé de son bras droit, un jeune marié doit aussi composer avec l’heureux évènement à venir dans son couple alors que son infertilité a été prouvée. Et où il est habilement suggéré que l’arrivée de l’enfant d’un autre doit compenser avec la disparition de son membre, celui qui fut la chair de sa chair. Le réalisateur y esquisse parfaitement cette profonde solitude face à des situations improbable d’embarras qui n’octroie aucune échappatoire. Et rien que pour ce segment- là, La Comédie humaine vaut le détour.
Manon Bellahcene