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Mélangeant images d’archives (Jean-Yves a tourné des petits films en super-8 dans sa jeunesse), témoignages, interludes
ludiques et « accidents » techniques (micros dans le champ, dialogues off volés), L’Épine dans le coeur, tout en dessinant le tableau d’une France rurale et laïque en voie de disparition, s’apparente aux films faussement bricolés dont Gondry
a le secret. Ce strip-tease en forme de kaléidoscope met surtout à jour un vieux drame familial dont on mesure encore, avec émotion, les effets sur les différents protagonistes, Gondry inclus.
Toutes les critiques de L'Épine dans le coeur
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Epuré et poétique, l'hommage rendu à la tante se transforme peu à peu en thérapie sauvage, révélant, avec beaucoup de pudeur, les non-dits et la souffrance tue. Impossible de ne pas ressentir la pointe de cette fameuse épine...
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Gondry fait remonter à la surface ces émotions violentes, avec un don de confesseur. Devant sa caméra, Suzette et son fils dialoguent indirectement et disent ce qu'ils ont toujours tu. Mais le spectateur ne se sent jamais voyeur. Car il y a de la pudeur chez Gondry qui se raconte aussi par ricochet. Et on comprend comment cette Suzette, colosse aux pieds d'argile, hors des sentiers battus, a inspiré sa sensibilité artistique si originale qu'on admire le temps de quelques scènes dont une, sublime, dans une cour de récré, au son d'une chanson d'Air. L'épine dans le coeur sait appuyer là où ça fait mal mais ne se transforme pas pour autant en règlement de compte excluant. Savoir susciter une telle empathie sur un sujet si intime touche au génie.
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Dans ce portrait de famille plein de tendresse et sans complaisance, la mort est envisagée comme une composante de la vie, et la souffrance, qui agit par petites décharges, comme le pendant de l'amour et de la joie. L'Epine dans le cœur est un film sur l'héritage - ce que l'on reçoit malgré soi, ce que l'on choisit de prendre. Le film n'est pas sans lien avec la dernière comédie de Michel Gondry, Soyez sympas, rembobinez, où les personnages refabriquent avec des bouts de ficelle de gros films américains à louer dans leur vidéo-club. Il est même la pierre de touche de tout son cinéma.
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Derrière la culpabilité maternelle se glisse ainsi celle, plus étrange, de l'artiste à succès envers son double négatif, un talent brut et méconnu. Cette piste subreptice est le filon précieux de l'oeuvre. (...) Mais, hélas, comme s'il ne savait pas quoi faire de cette pointe effilée, Gondry rétrograde progressivement vers les terres plus convenues d'Etre et Avoir.
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C'est quelque chose qui devient très clair dans une scène bouleversante, vers la fin, où se dévoile l'origine véritable du train de poche qui a guidé tout le film. Alors on comprend que, depuis le début, la miniature est lancée sur des rails qui ne sont pas seulement le récit de Suzette mais, aussi, un possible trait d'union entre Michel et Gondry. Beau voyage, beau film.
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Cette morale de coffre à jouets (“on dirait qu’on serait… des cow-boys !”), qui peut parfois agacer lorsqu’elle n’est amarrée à rien, trouve dans l’écriture documentaire un souffle nouveau et fait de Gondry un auteur décidément attachant. Et de ce film un de ses plus émouvants.
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C’est dans sa nature fluctuante, ses airs de work in progress que réside la beauté singulière de ce film, tantôt biographie d’une femme du siècle dernier au rugueux tempérament cévenol, tantôt peinture de la France rurale, tantôt portrait en creux de Gondry lui-même, tantôt expérience collective questionnant, comme "Block Party" et "Soyez sympas, rembobinez", le rôle de l’individu au sein de la communauté et celui du cinéma comme vecteur de lien social.
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Film modeste et émouvant, «L'Epine dans le cœur» parle à la fois de Suzette, de sa carrière, des relations difficiles qu'elle entretient avec son fils, tout en apportant un début de réponse à la question que l'on se pose souvent : mais où Gondry a-t-il été chercher son univers ? Entre les maquettes de trains de son cousin et les films en 8mm de leur enfance, on se dit qu'on tient une piste.
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Moins naturaliste qu'un Nicolas Philibert avec Etre et avoir, Michel Gondry déploie son habituel sens de la poésie, par exemple dans cette jolie scène où des élèves enfilent des « costumes invisibles » : le cinéaste a gommé leurs corps par un effet spécial malicieux. Egalement témoignage familial, le film peut déranger lorsqu'il « malmène » Suzette : mère d'un fils, Jean-Yves, elle l'a élevé avec dureté et moins d'intérêt qu'elle n'en avait pour ses élèves. Adulte brisé et instable, Jean-Yves est resté pour sa mère une « épine dans le coeur ». Mais l'amour et la bienveillance de Michel Gondry pour sa famille, toujours palpables, corrigent l'indélicatesse qu'on pourrait lui reprocher dans cet hommage quasi filial à une femme et à son métier.
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Michel Gondry décide de raconter l’histoire de sa tante Suzette, institutrice remplaçante qui a enseigné dans de nombreux villages des Cévennes. On suit les retrouvailles de la vieille dame avec ses anciens élèves, on est ému par sa pudeur devant la caméra ou amusé par ses débits de colère. Mais le propos se révèle un peu répétitif. On aurait préféré que Gondry s’intéresse au drame familial que l’on devine en filigrane: Jean-Yves, le fils de Suzette, ne s’est jamais remis de la mort de son père et n’a jamais pardonné à sa mère d’avoir attendu plusieurs jours avant de la lui annoncer.