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Los Angeles, 1970. Le privé Doc Sportello reçoit la visite de son ex, Shasta Fay, inquiète de la disparition de son amant Mickey Wolfmann. Doc entame une enquête qui l’amène à découvrir une mystérieuse organisation dont on ignore si elle est dirigée par des bikers néonazis ou une congrégation de dentistes. Puis Shasta disparaît à son tour... Si, à mi-chemin d’"Inherent Vice", vous réalisez, comme dans un mauvais trip, que vous ne comprenez rien à l’intrigue labyrinthique dans laquelle s’englue le détective jointé joué par Joaquin Phoenix, pas de panique… détendez-vous. C’est fait exprès. On n’y voyait pas beaucoup plus clair en tournant les pages hallucinées de Vice caché, le bouquin de Thomas Pynchon adapté ici, pourtant censé être le plus accessible des écrits du sphinx invisible des lettres américaines. L’intrigue, un hommage surf rock à Chandler passé à la moulinette "Big Lebowski", y servait surtout de prétexte à une élégie sur les idéaux hippies, ce moment où le rêve a viré au cauchemar. Où "tout a foiré", comme le disait Peter Fonda dans "Easy Rider". Pas difficile de comprendre ce que Paul Thomas Anderson est venu chercher dans le livre, lui dont la filmographie raconte la quête erratique de misfits idéalistes poursuivant une chimère qui ne cesse de clignoter et de disparaître sous leurs yeux. Son film, à la fois modèle d’adaptation scrupuleuse et réappropriation personnelle, déploie un tas de formidables équivalences cinématographiques à la poésie marabout-de-ficelle pynchonienne. La photo imaginée avec le chef op Robert Elswit, semi-irréelle, semble regarder avec nostalgie un monde lui-même travaillé par le regret d’un passé immédiat. Ce romantisme en cascade devient vertigineux lorsque le film atteint son pic émotionnel, un flash-back déclenché par une carte postale évoquant le souvenir d’une journée parfaite entre Doc et Shasta, passée sous la pluie à rechercher de la dope au son du bien nommé "Journey Through the Past", de Neil Young. Dans ces moments, l’assurance stylistique du réalisateur semble totale. Suffisante en tout cas pour confier une immense partie de la responsabilité esthétique du projet à Joaquin Phoenix. Après les contorsions expressionnistes de "The Master", l’acteur invente ici une pantomime dépressive, une sorte de burlesque mélancolique. Beaucoup moins funky que ne le laissait supposer la bande-annonce, "Inherent Vice" est aussi drôle que Phoenix peut l’être. Marrant, oui, tordu et absurde, mais surtout bizarre et embarrassant. Et toujours un peu triste quand même. Reste à savoir, une fois qu’on a accepté de se lover dans le film comme on s’enfonce dans une conversation envapée, à quoi fait référence le "vice caché" du titre, ce "défaut inhérent" aux cargaisons les plus fragiles, comme l’explique l’avocat joué par Benicio Del Toro. Une métaphore du rêve soixante-huitard ? De l’Amérique ? Ou de l’amour dans une Californie qui n’a pas réussi à transformer l’essai du summer of love ? Polar tentaculaire, stoner intello, poème à la coule, futur film culte… Quel que soit le bout par lequel vous tentez de l’attraper, "Inherent Vice" ne vous secouera jamais autant que si vous l’envisagez comme une love story ultime. L’histoire de deux grands enfants perdus dans une époque qu’ils ne reconnaissent plus. Comme "The Master", dont il est l’antithèse et le complément idéal, le film s’achève sur une fin ouverte, invitant le spectateur à déterminer la part exacte que s’y disputent la douceur et l’amertume. Une fille, un garçon, de l’amour, un happy end incertain. "Inherent Vice" raconte une histoire assez simple, finalement.
Toutes les critiques de Inherent Vice
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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cette adaptation du roman enfumé de Thomas Pynchon est un chef-d'oeuvre, dont on tombe amoureux instantanément. (...) En attendant de trouver un semblant de sens à l'affaire, Joaquin Phoenix est heureusement là pour assurer le spectacle.
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Ce film noir, drôle et Kafkaïen, tout en hallucinations et en digressions, rend hommage au Nouvel Hollywood, privilégiant l'errance de son protagoniste aux rebondissements de l'intrigue pour que le spectateur partage sa mélancolie existentielle comme sa torpeur hallucinée.
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Il faut le voir comme un film fait pour être vécu plutôt qu'entièrement compris.
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Peu importe l’intrigue. L’atmosphère vous capte, les acteurs sont plus surprenants les uns que les autres. Phoenix crée ici un privé qui fera date. Josh Brolin (...) est lui aussi inoubliable. Quant à Benicio del Toro, il fait une apparition réjouissante en avocat spécialisé dans le droit maritime.
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"Inherent Vice", brillamment mis en musique par Jonny Greenwood, est un trip dans la tête d'Anderson (...) qui vous laisse hébété, confus et même agacé. Mais vous ne doutez pas un instant d'être entre les mains d'un génie.
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Comme la plupart des films de Paul Thomas Anderson, "Inherent Vice" est fait pour être impénétrable. La meilleure approche , quand vous le regardez partir à la dérive, est de savourer les images qui font rêver et les blagues sur la drogue, et de ne plus penser à entrer dans l'intrigue.
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Anderson a condensé le livre avec une précision chirurgicale, abandonnant des intrigues secondaires, des personnages et des lieux tout en conservant le fil rouge sociopolitique de l'histoire ainsi que des détails terriblement drôles.
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Doté d’une magnifique photographie, "Inherent Vice" est un régal de mise en scène. Il n’empêche que ses fulgurances, ses détours et autres embardées fumeuses en dérouteront plus d’un.
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Ce labyrinthe dont les images surréalistes renforcent l'impression d'être ailleurs offre un voyage psychédélique balayé d'angoisses et d'éclats de rire. Il s'agit d'un vrai trip cinématographique aussi fascinant qu'excitant.
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Le septième long métrage d'Anderson est une géniale et très drôle comédie de défonce.
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C'est encore moins cohérent que l'histoire de Pynchon, ce qui est un véritable exploit. Et pourtant, il n'est pas superficiel.
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Paul Thomas Anderson vous convie à un trip hallucinogène profond et entêtant, à condition de se prêter au jeu d'une narration éclatée et d'une intrigue qui part progressivement en fumée.
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Pour raconter cette histoire qu'on croirait écrite sous LSD, le cinéaste a l'intelligence de faire sobre. Pas — ou peu — de plans-séquences virtuoses dont il faisait étalage à l'époque de "Boogie Nights", mais beaucoup de longs plans fixes au plus près de ses acteurs, avec tension érotique à la clé.
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On croisera des surfeurs défoncés, un flic du LAPD névrosé, un saxophoniste infiltré dans une secte étrange, des bikers fascisants, une domestique mexicaine chaude comme la braise, des dentistes évadés fiscaux alliés à un mystérieux "Croc d’Or". Le film est, on l’aura compris, le plus dingue, drôle et sexy qu’on ait vu depuis longtemps. Faites passer…
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C’est un voyage, un trip paranoïaque dans lequel on plonge dès le premier plan… ou pas ! (...) Mais, comme avec l’écriture de Thomas Pynchon, on peut se laisser submerger par l’humour du cinéma de P. T. Anderson, ne pas tout saisir, mais être traversé par la beauté des images et bouleversé par la bande-son !
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Déconcertant et délirant, le film demeurera délibérément hermétique pour ceux qui recherchent une logique au cinéma, à moins de le revoir deux ou trois fois, mais apportera un plaisir unique, même pour ceux qui n’ont jamais fumé d’herbe de leur vie, celle de vivre un trip hallucinatoire, où les personnages et les noms se bousculent, au sein de plans-séquences obsessionnels de tension sexuelle.
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Corseté par la volonté de maîtrise totale de PTA, "Inherent Vice" semble ne jamais se laisser contaminer par la folie et les vapeurs narcotiques dans lesquelles il baigne, tout en restant délibérément allusif et flou dans son propos. A trop protéger son statut d'oeuvre de Classe A, il se ferme sur lui-même et apparaît davantage comme un casse-tête intellectuel que comme un trip vertigineux.
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"Inherent Vice" est un Raymond Chandler maladroit. Avec trop d'importance donnée à la partie qui ne tient pas debout.
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On ne peut pas dire que l’on prenne un plaisir dingue à déambuler dans ce fatras ou alors il faudrait que soit distribué à l’entrée de la projo un peu de la marijuana colombienne qui fait plisser les yeux de Doc et friser ses rouflaquettes.
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"Inherent Vice" est non seulement le premier film de Pynchon, mais il pourrait être aussi le dernier. C'est le meilleur film mais le plus exaspérant que nous n'aurons jamais.
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Le bât blesse dans une narration confuse où les digressions s'enchaînent les unes aux autres avec une cohérence des plus lâches. Le tout dans un flot de paroles ininterrompu au détriment d'une action soporifique sur une durée de deux heures et demie.
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Anderson tire son épingle du jeu en oscillant constamment entre humour décalé et polar classique. "Inherent Vice" s’adresse toutefois à un public de cinéphiles avertis.
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Impossible, ou presque, d’en suivre l’intrigue : l’expérience du film se résume bien vite à la contemplation d’un magma en mouvement où les personnages, les odeurs, les matières, les informations, tournoient toutes ensemble et reproduisent à l’infini la même confusion. (...) il y a dans "Inherent Vice" beaucoup à savourer, pas grand-chose à retenir.
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Le film, brillamment mis en scène, croule sous les dialogues interminables, les scènes faussement grinçantes, l'intrigue totalement incompréhensible, mais so chic qu'elle excite le bobo baba.(...) L'ennui comme un film sans fin.
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Tout part en fumée et l'écran ne fait pas illusion. PTA, sûr de son fait, maquille ses séquences comme autant de vignettes pop censées faire joli. (...) "Inherent Vice" peut se voir comme un remake caché et raté du Privé de Robert Altman. Aux coupables, les mains vides.
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Le scénario s'étiole vite. Reste des numéros d'acteurs, un petit jeu dans lequel Joaquin Phoenix s'en sort bien.
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Ce long métrage fait passer "Le Grand Sommeil", le légendaire film déroutant d'Howard Hawks, pour un modèle de cohérence narrative.
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"Inherent Vice", même avec les méandres habituels d'Anderson, est facilement son pire film. Un test d'endurance soporifique de près de 2 heures et demie.
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Un film noir pur jus – voix off très écrite comprise – vaguement déguisé en comédie, où le burlesque hilarant de quelques situations ne sert qu’à surligner le caractère tragique et désespéré de l’ensemble.
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Le film n'est pas complexe, mais incompréhensible. Au bout d'une demi-heure, on est largués, sans désir de raccrocher, tant le vaniteux cinéaste prend un malin plaisir à nous enfumer.(...) Joaquin Phoenix s'en tient à une seule expression, celle d'un bovin hébété
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Ce qui dure et perdure, c’est l’ennui de regarder un objet vaniteux, beaucoup trop long, fermé sur lui-même, superbement ouvragé mais n’accueillant pas la possibilité du spectateur, porté par des acteurs excellents mais perdus dans une histoire imbitable, un film dont l’unique sujet et raison d’être semble l’exposition de la virtuosité formaliste de son auteur.
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Les acteurs, au top, sont méconnaissables. Mais cela ne suffit pas à donner de la consistance à une intrigue opaque, hermétique, fragmentée, dont les nombreux sketches cassent le rythme. Trash et improbable, ce polar confirme cependant la radicalisation et la prise de risques de Paul Thomas Anderson.
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Après son hermétique "The Master", le cinéaste lorgne du côté de la comédie absurde ou de "Las Vegas Parano". Il reste hélas trop bavard, et l’on est bien loin de la puissance d’un "Magnolia" ou d’un "There Will Be Blood" avec ce nouveau film trop étouffant qu’on aurait aimé plus aimer.