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Les vertus documentaires d'Indigènes, indéniables, s'adressent à nos consciences. Rachid Bouchareb l'a voulu ainsi. Il l'a écrit, le montre et le revendique. Pour cela, le film déborde du cadre du cinéma. N'empêche. Indigènes est d'abord un film de guerre digne, tourné de façon spectaculaire. Avec des personnages forts, compagnons d'armes réunis pour des motivations différentes auxquels on s'attache immédiatement. Ils ont leurs propres fragilités, leur foi et leur courage pour nous convaincre. Ils ont aussi des comédiens formidables à leur service. Au-delà du discours, Rachid Bouchareb n'a pas raté son coup. Le casting, qu'il fallait réunir, est impeccable. A tel point qu'on en oublie (et c'est la première fois) le comique Jamel Debouzze pour découvrir le petit Saïd qui sommeillait en lui. A tel point, faut-il le rappeler, que les cinq comédiens d'Indigènes ont reçu, à Cannes, un prix d'interprétation on ne peut plus légitime.
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- Fluctuat
Oser dire ce que d'autres voudraient cacher. Jamel Debbouze, Samy Nacéri, Roschdy Zem, Sami Bouajila rendent hommage à leurs ancêtres oubliés. Mettent le doigt là où ça fait mal. Un film douloureux, discutable (lire le point de vue de Manuel Merlet qui dénonce une certaine manipulation), mais nécessaire, tant « il met des mots sur des non-dits », avec force et humanisme.
- Indigènes en images : la galerie photos
- vos impressions ? discutez du film Indigènes sur le forum cinémaSetif, Algérie, 1943. Les bataillons de tirailleurs s'alignent. Tous volontaires, ils ont rejoint l'armée pour prêter main forte à la France et libérer la « mère patrie ». A peine entraînés, portés par leur dévouement pour ce pays qu'ils considèrent leur, les hommes sont menés au combat. Algérie, Provence, Vallée du Rhône, puis les Vosges et l'Alsace... Dans la poussière, sous les tirs ennemis, en sandales dans le froid et la neige, ils avancent. Parmi eux, Saïd, Yassir, Messaoud et Abdelkader. Quatre hommes, quatre regards sur la guerre, quatre souffrances croisées filmées au plus près.Indigènes, musulmans, « bougnouls », esclaves... Ils encaissent les appellations, sous l'oeil et la plume de Rachid Bouchareb, qui dévoile pour nous les contours de l'Histoire. Peu glorieuse. Où ceux qui se sont battus pour la France n'ont pas eu la reconnaissance méritée. N'ont pas eu les mêmes droits que les combattants français, pas les mêmes permissions, pas les mêmes chances de prendre du galon, pas les mêmes repas. Portés par un intense patriotisme, les « indigènes » de l'armée française n'eurent droit qu'à un traitement indigne. Incompréhension, revendication, détresse ou rage rentrée, les protagonistes incarnent chacun une facette de la même révolte. S'inspirant de faits authentiques (faut-il le préciser ?) le réalisateur a voulu « plonger au coeur de l'humain, [...] au-delà de toutes les différences ». Banco. Magnifiquement tenue, cette belle promesse s'avère la meilleure manière de nous toucher au coeur.D'hier à aujourd'hui
En ces temps de lutte anti-terroriste acharnée, d'amalgames douteux entre musulmans et terroristes, de reconduites à la frontière, c'est la crème des comédiens français d'origine maghrébine qui s'y est collée. Prix collectif d'interprétations masculines au dernier festival de Cannes, Jamel Debbouze, Samy Nacéri, Roschdy Zem, Sami Bouajila rendent hommage à leurs ancêtres oubliés. Mettent le doigt là où ça fait mal. Les quotas d'antan freinaient l'évolution des tirailleurs dans les échelons militaires ? Ceux d'aujourd'hui veulent freiner l'entrée en France d'étrangers non choisis. Le langage administratif reste détestable, et long le chemin vers l'acceptation de l'autre. Fonctionnant par chapitres qui suivent le cheminement des troupes, le film ouvre chaque nouvelle partie sur une image en noir et blanc, qui se remplit peu à peu de couleurs. Passage de l'Histoire des livres aux faits grandeur nature. Message que tout ça n'est pas si loin. Pour preuve, c'est en 2001 seulement que le Conseil d'Etat a rendu un jugement contre le gel des pensions des tirailleurs, qui avait été décidé en... 1959.Grandeur nature, les scènes de guerre le sont aussi. Les champs de bataille explosent de toutes parts, les mitrailleuses mitraillent, les grenades trouent, les hommes tombent. « Indigènes » se donne les moyens du réalisme. Et tout sonne juste. Des attitudes aux dialogues, déclamés en arabe par les comédiens, des situations aux sentiments, des chars aux costumes. La force de Rachid Bouchareb, c'est d'atteindre la vérité de toute chose. Sans jamais mentir, il pose un regard humaniste sur l'histoire, déterre un sujet fort bourré de résonances, dépeint l'injustice révoltante. D'après Jamel Debbouze, « il met des mots sur des non-dits ». Oser dire ce que d'autres voudraient cacher. Raconter ce qui est oublié. Voilà la marque d'un grand cinéaste, qui nous offre ici un film à son image : sincère, courageux, indispensable. Et que chaque français devrait voir.Indigènes
Réalisé par Rachid Bouchareb
Avec Jamel Debbouze, Samy Naceri, Roschdy Zem
France, 2006 - 128mn
Sortie en France : 27 Septembre 2006
[illustrations© Mars Distribution]Note : La rédaction n'est pas unanime. Pour ceux qui ont vu Indigènes à Cannes (cf. chronique), il aurait un peu trop tendance à tordre le passé pour parler à tout prix aux « descendants », à ceux qui aujourd'hui peinent à s'intégrer ou à obtenir un visa. Pour les autres, l'oeuvre est forte, émouvante et nécessaire. Le débat ne fait que commencer... et se prolonge sur le forum Indigènes.
Sur Flu :
- Lire la chronique de Indigènes publiée dans Ecrans, le blog cinéma à sa présentation au 59e Festival de Cannes.
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- le site officiel