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Vous connaissez le foxtrot ? Un pas en avant, un pas à droite, un pas en arrière, un pas à gauche… et vous voilà revenu à votre point de départ. Oui, malgré l’impression de dynamisme, cette danse vous condamne au surplace. C’est la métaphore filée par Samuel Maoz (Lebanon) dans ce film étonnant, bizarroïde, une réflexion sur les traumas d’Israël (le poids de la mémoire de la Shoah, les destins guerriers auxquels chaque nouvelle génération condamne ses enfants…), mêlangeant drame familial pathétique, farce absurde et film de guerre downtempo. Foxtrot raconte le deuil d’une famille qui apprend la mort de son jeune fils, un soldat chargé de surveiller un check-point au milieu du désert. Un check-point surtout fréquenté par des chameaux égarés… Derrière l’humour à froid, le mélange des styles et des tonalités, le goût pour les embardées poétiques ou musicales, l’inclusion de séquences animées (autant d’éléments qui témoignent de l’influence du génial Valse avec Bachir), Samuel Maoz raconte une société malade, cernée par une violence qu’elle semble d’abord s’infliger à elle-même. Une scène – métaphorique, encore une fois- où des militaires camouflent une bavure en enterrant des cadavres d’innocents à la nuit tombée, a fait grincer des dents en Israël, la Ministre de la Culture ayant été jusqu’à déplorer que Foxtrot représente le pays dans la course aux Oscars. Ce qui n’a pas empêché le film d’être un beau succès en salles, au contraire. Les personnages de Moaz tournent peut-être en rond, mais son film, lui, a l’air d’avoir fait avancer le débat.