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D’abord il y a ce titre – l’un des plus beaux de 2021 – puis ce plaisir de retrouver Samuel Benchetrit dans cet exercice du film choral où il excelle. Après J’ai toujours rêvé d’être un gangster et Asphalte, il a imaginé ces destins croisés de personnages isolés, enfermés sur eux- même et dans une certaine violence, aux vies soudain éclairées par leur rencontre non programmé avec l’art… et l’amour. Il y a chez Benchetrit un art du mélange savamment dosé, un talent à glisser de la loufoquerie dans un récit ancré dans une certaine réalité sociétale, à laisser le silence prendre toute sa place au milieu de dialogues savoureusement pensés pour la bande d’acteurs venus de tous horizons (de Vanessa Paradis à Joey Starr en passant par Ramzy, Vincent Macaigne ou la première apparition de Poppée Baschung). Benchetrit est un styliste de l’écrit comme de l’image. On reconnaît ses films à la première image ou au premier dialogue. Certains (y compris chez Première) peuvent y être réfractaires. Mais il va au bout de ses idées, d’un propos qui peut sembler candide en poussant au bout de leurs logiques des situations improbables et les transformant en feu d’artifice burlesque. A l’image de cette coiffeuse formidablement campée par Vanessa Paradis qui ne perd son bégaiement qu’en montant sur scène pour jouer une comédie musicale… sur la vie de Simone de Beauvoir pour laquelle le personnage de Gustave Kerven, fou d’amour pour elle, abat un à un ses partenaires potentiels afin de tenir, faute de volontaires, le rôle de Sartre lui- même. C’est barré, c’est poétique. Du pur Benchetrit.