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Mamane réalise une parabole drôle et grave sur le continent africain.
« Le Gondwana est un pays très exactement situé au Nord de quelque part et au sud de là. » Un pays imaginaire où l’humoriste devenu réalisateur a choisi d’installer sa « République très très démocratique ». Pendant des années, au cours de chroniques aussi courtes que drôles sur RFI, Mamane racontait un monde à géographie variable, où tous les chefs d’Etat africains seraient réunis en un seul « Président fondateur », un leader mégalo, un oppresseur fantoche, dictateur baroque et caricatural. Tout y passait : les magouilles de la Françafrique, la tyrannie des potentats sanguinaires, l’indifférence bien comprises des démocraties occidentales, la soumission des peuples ou la révolte de la jeunesse… Mamane soignait sa colère dans des billets tendres, corrosifs sous les apparences d’une douceur surréaliste. Mais cette colère ne l’a pas quitté et il a aujourd’hui décidé d’en faire un film. Reprenant le principe de ses textes radio, il plonge un Candide au cœur des ténèbres. Accompagné d’un notable français très calculateur (Antoine Duléry), le jeune Julien Franchon (Antoine Gouy) est un énarque du Quai d’Orsay parachuté au Gondwana pour surveiller la mise en place des premières élections libres. Au cours de l’aventure, il rencontrera les différents ministres du Président fondateur, découvrira l’étendue de la corruption, tombera amoureux d’une femme rebelle (sublime Prudence Maidou), et du reggae de Tiken Jah Fakoly. Mais encore plus d’un continent – ce que l’on comprend facilement : on sent à chaque plan du film la moiteur et la beauté sauvage de l’Afrique. Bienvenue au Gondwana ressemble un peu à Tintin au Pays des Soviets. Avec un style ligne claire et un humour loufoque (on pense aux planches de Sempé), Mamane dessine de jolis personnages perdus dans un monde absurde qui les dépasse ; c’est un jeu de piste et une lettre d’amour à un continent, mais c’est aussi (surtout ?) un constat terrible sur la situation politique des pays africains. Mais le réalisateur ne veut surtout pas la ramener : on évoquait le Candide de Voltaire, mais on pense également à La Fontaine - version peule - pour la manière dont Mamane cache sa visée morale sous les atours de la comédie et du conte universels. Le surréalisme et la parabole lui permettent finalement de dire des choses graves et d’éveiller les consciences dans un rire toujours communicatif.