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Bécassine en 2018, excepté un air de Chantal Goya, ça ne dit plus grand-chose aux moins de 50 ans (60?). La bonne Bretonne est passée de mode comme les sucres d’orge et les soldats de plomb. Son revival par Bruno Podalydès obéit néanmoins à une certaine logique de la part de cet admirateur de Tintin, sur qui l’œuvre popularisée par Caumery et Pinchon eut une influence manifeste – la ressemblance physique, la ligne claire, les personnages secondaires pittoresques. Sans déguiser sa nature naïve et rêveuse pour la rendre moderne, Podalydès en fait une héroïne plus ancrée dans la vraie vie à travers sa relation maternelle avec Loulotte, la fillette adoptive de la marquise de Grand Air – qui a embauché Bécassine comme nounou à tout faire. C’est le fil rouge d’une comédie charmante, un brin ronronnante, où les maîtres sont gentiment inconséquents, les domestiques un peu ronchons et les escrocs sympathiques ; où on laisse des mots dans la forêt pour prévenir les animaux d’une chasse imminente et où les roquets font des crottes aussi grosses qu’eux ; où les trucages à l’ancienne se mêlent naturellement aux effets visuels dernier cri ; où, enfin, un spectacle de marionnettes tout pourri suscitant l’émerveillement des spectateurs devient la vitrine d’un film qui carbure au faux premier degré et à la poésie modeste mais efficace. Dans le rôle-titre, Émeline Bayart, ses grands yeux bleus remplis d’amour et sa silhouette ultra graphique, s’intègre merveilleusement à cet univers léger… comme une bulle.