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A priori, ce film terminal de plus de deux heuressur la vieillesse, la déchéance et la mort avait de quoi oppresser ceux qui, depuis Funny Games, résument grossièrement les oeuvres de Michael Haneke à de la dissertation punitive, soit du sadomasochisme en bobine. N’ayez crainte ! Il a rangé son fouet au placard. Ça peut sembler un peu bêta de dire ça, mais son Amour a l’évidence des chefs-d’oeuvre. Derrière les atours austères d’un mélodrame rance au goût de formol se cache un grand film d’amour à mort. Sans que l’on sache comment ni pourquoi, on est saisis, dès les premières images, par la dramaturgie qui lie les deux personnages et donc les deux acteurs, sublimes : Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva, qui font passer à travers eux des pans entiers de cinéma. Ensemble, ils luttent pour rester debout et conserver un semblant de dignité, se raccrochent aux souvenirs qui flanchent, aux mots tant aimés et sur lesquels ils achoppent désormais. Certes, la cruauté de Haneke est bien là, notamment dans les éprouvants plans-séquences, et se manifeste d’ailleurs dans une scène cauchemardesque assez angoissante. Mais elle ne bride jamais l’altitude tragique, le pouvoir émotionnel d’une histoire déchirante qui parle de tout ce que l’on peut perdre d’important dans une existence : l’amour, que l’on ne rencontre qu’une seule fois ; la passion, en particulier celle de l’art qui permet de s’extraire du réel et de s’ouvrir aux autres ; et la parole, grâce à laquelle tout s’anime et se disloque. Quand Anne/Emmanuelle Riva, alors paralysée, reconnaît et écoute la voix de Georges/Jean-Louis Trintignant, elle revit, à la fois cadavre, jeune mariée et enfant. Chez Bergman, ç’aurait été une maison isolée en pleine nature. Haneke a opté pour un immense appartement haussmannien, royaume de solitude aux portes verrouillées envahi par des souvenirs lointains, des familiers étrangers et des odeurs nauséabondes. Pour la première fois désarmé face aux deux monstres de cinéma qu’il dirige, le cinéaste autrichien de 70 ans n’a plus besoin de se cacher derrière la démonstration lourde, la manipulation formelle, la provocation de surface. Au gré d’un scénario quasi linéaire, il chemine admirablement vers la simplicité, même secrète. À l’instar de son précédent Ruban blanc, déjà palmé d’or, Amour est un fi lm fantastique – au propre comme au figuré – sur l’inconsolable proximité des fantômes.
Toutes les critiques de Amour
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Une histoire à la fois tendre et dévastatrice sur l’amour et la mort, merveilleusement réalisée.
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(Critique Pour) Pour ceux qui hésiteraient à le voir, Amour n'est pas un enterrement ni une visite de deux heures chez une vieille malade incurable et son mari, mais bien un film (Palme d'or à Cannes). Sous-tendu par le goût de la vie — serait-elle derrière soi — et tendu vers le dehors, qu'Anne et Georges rejoindront finalement comme en rêve. Un film qui, par ses échappées mélomanes et ses gros plans sur les tableaux dans l'appartement, réaffirme aussi la place de l'art, le bonheur d'écouter une musique triste ou de contempler la peinture d'un paysage désolé. Il est permis de prendre plaisir à ce cinéma funeste, de savourer intensément ses ténèbres et d'en sortir heureux.
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Si l’on considère le passé douloureux de Haneke, ce long métrage, peu commun, incroyablement joué par 2 génies, soulève le comportement digne que l’on peut adopter face à l’adversité de l’inévitable cruauté de la nature ; on est 2 fois plus touché.
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‘Amour’ est un film poignant, dévastateur et juste : huis clos sur un couple d’octogénaires, Georges et Anne (superbement interprétés par Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva), face à la mort et au déclin physique. Mais enfin, c’est surtout un film sur l’amour (bien vu), dans ce qu’il a de moins niais, de plus viscéral
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La mise en scène d'Haneke, superbe de retenue, glisse le long du temps qui passe (...) Ce n'est ps une tragédie, c'est une offrande à ceux qui croient que l'amour s'enfuit quand s'allonge la nuit. C'est un cadeau que l'on serre contre soi, bouleversé.
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Bien que clinique, voire empreint de cruauté, Amour est constamment touchant, et parfois bouleversant. À ce stade, il faut parler d’Emmanuelle Riva et de Jean-Louis Trintignant, et ce n’est pas facile de trouver les bons mots, les mots justes, les mots non frelatés, tellement ce qu’ils font et sont ici est génial de puissance, de finesse, de précision, de courage.
Grâce à eux, on est saisis d’émotion à un triple niveau : Anne et Georges, Riva et Trintignant les êtres, Riva et Trintignant les acteurs. -
Porté par les voix de velours d' Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant, ce drame, d'une simplicité extrême et d'une justesse exemplaire a de quoi vous réconcilier avec la mort, et l'Amour aussi.
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Atteignant une maîtrise totale de son art qui force l’admiration, Haneke se renouvelle en explorant le terrain de l’amour auquel il ne nous avait pas habitués jusqu’ici. Dès l’entame de Amour, l’épilogue tragique éclate tel un coup de semonce en plein visage du spectateur ébahi devant une déstructuration du récit aussi audacieuse que brillante.
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Michael Haneke ne déroge pas à son style austère avec un film sur la déchéance et la vieillesse d'un couple. Le duo Riva/Trintignant magnétise et renverse. Et Amour perturbe beaucoup et longtemps....
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Ce sujet difficile est capturé ici avec une justesse incroyable, une pudeur touchante, une simplicité formelle remarquable. et un Jena-Louis Trintignant bouleversant pour une Palme d'Or suintant l'humanité.
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Haneke signe ici ce qui est peut-être son film le plus humain, comme s’il avait enfin fait exploser cette pudeur qui l’a souvent empêché d’exprimer ses sentiments. Il met toute sa science du réalisme dans la restitution du quotidien de ce couple d’exception. Du sentiment sans sentimentalisme, de l’émotion sans mièvrerie, de la réalité sans voyeurisme.
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Un huit-clos généreux et sublime porté par un couple d’acteurs devenu trop rares qui nous assène au final une sacrée leçon de vie.
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Amour est un film immense, un de ces films qui touchent à ce que l'humanité a de plus intime et de plus tragique ; qui vont chercher les larmes au tréfonds de votre être, vous laissent pantelant pendant un bon moment après en être sorti.
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Haneke ne joue pas au plus fin avec son titre : il ne s'agit bien que d'amour, un amour d'une saisissante douceur, d'une saisissante dureté.
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Ils sont rarissimes les films qui vont au bout de la vérité. Ils sont exceptionnels les films qui mordent la vie en parlant des crocs de la mort. « Amour », du réalisateur autrichien Michael Haneke, (...) Tout cela transforme un simple film en (chef-d’) œuvre inoubliable.
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Après Tree of life, une autre Palme d'or sur le sens de la vie, mais sans dinosaure numérique au regard mouillé ni fatras interstellaire... Une Palme d'Or forte et incontestable.
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Grâce à Amour, Michael Haneke a décroché sa deuxième Palme d’or, trois ans après Le ruban blanc. Autrefois provocateur, le cinéaste autrichien met les émotions à nu et dévoile une humanité, une sensibilité, un coeur. Avec une intensité dramatique suffocante, il aborde un sujet tabou et dérangeant, la fin de vie, de manière frontale mais en gardant la pudeur nécessaire. Le réalisateur a su s’entourer d’immenses interprètes: Jean-Louis Trintignant, d’une sobriété et d’une dignité exemplaires, Emmanuelle Riva, très courageuse, dans ce qui reste à ce jour son oeuvre la plus intime.
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Un huis-clos somptueux (...)
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Amour est une invitation à l'intimité d'un couple. Celui-ci, pudique à l'extrême, se livre pas à pas, comme apprivoisé par la beauté minérale du regard de son auteur. Ce qu'on pourrait prendre pour de la distance, voire de la froideur, abrite en vérité une compassion qui touche au coeur. Aussi fort qu'un coup de foufre.
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Histoire bouleversante d'un couple d'octogénaire confronté à la mort. Un punition pour spectateur maso ? Non. Dans le huis clos d'un appartement bourgeois, témoin silencieux de toute une vie, on est touché d'emblée par le drame qui se joue devant nos yeux. Une sorte de miracle orchestré par deux comédies d'exception, Jean-Louis Trintignant et Emmanuelle Riva. (...) Un film choc.
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On est surpris de se laisser haper par ce film a priori austère et déprimant. Et pourtant, tout y est puissant et subtil, magnifique et bouleversant.
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Dans ce récit sans pathos ni complaisance, d’une miraculeuse sobriété (émotionnelle), les silences s’entendent, la violence du quotidien crève le cœur et la déconstruction du couple achève. Une Palme d’or et d’amour portée par une mise en scène au cordeau et deux comédiens d’exception.
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Reparti de Cannes cette année avec la Palme d'Or, tout comme "Le Rubal Blanc" en 2009, "Amour" est la belle preuve que Michael Haneke a réalisé un deuxième chef-d'oeuvre. Un film qui, tout en allant vers la mort, nous aide à vivre.
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Amour est de ces films, ennemis de l'eau de tiède, qui rappellent pourquoi on aime le cinéma.
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par Sarah Merlino
(...) une dernière valse aussi forte qu'une étreinte sauvage. Bouleversant.
Ce film, immense (...), on s’apprêtait à le subir : quel spectateur normalement constitué a envie d’affronter, deux heures durant, l’agonie d’une femme veillée par son mari aimant, fussent-ils joués par deux admirables revenants (Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant) ? Or Michael Haneke, cinéaste austère féru de grandes questions philosophiques (dénonciation de la violence, réflexion sur l’image, autopsie du mal), réussit à rendre ce récit sur l’abominable condition humaine à la fois indispensable et bouleversant.
Face à ces deux comédiens géants, Haneke (...) n'a peut-être jamais été aussi délicat, sensible, nuancé. Mieux : il semble totalement dépassé et submergé par l'émotion.
Rarement un film aura autant fait corps avec ses personnages et ceux qui les regardent. Emmanuel Riva et Jean-Louis Trintignant sont au coeur de leur rôle, si proche qu'on veuille les aider avant de comprendre qu'ils vivent leur amour pour eux.
Michael Haneke signe un film tout près d'être parfait sur le plan formel – si tant est que l'expression ait du sens, au-delà de la sensation d'extrême cohérence qu'elle traduit.
Ce film dépouillé, ramassé malgré ses 2h07, va droit à l'essentiel, sans réfléchir, ni frémir. Il montre ce qui fait tourné la tête dans la société actuelle : la maladie qui progresse, la mort qui vient, mais aussi l'amour qui reste.
"Amour". Où, à la maîtrise usuelle de Haneke, s'ajoute une empathie inédite. Comme son nom l'indique, et plus qu'une oeuvre sur la déchéance (physique autant que mentale), un grand film d'amour.
Dans Amour, Michael Haneke accorde un nouvel espace pour l’imaginaire du spectateur, et insuffle, sans la forcer, une émotion inédite dans son oeuvre.
Sur le thème de la déchéance de la vieillesse, Haneke filme un huis clos dépouillé à l’extrême, terriblement humain. Jean-Louis Trintignant, en mari aimant, est magnifique. Avec Emmanuelle Riva, il forme le duo poignant de ce drame d’une portée universelle. Palme d’or 2012.
Cet "Amour" de Michael Haneke (...) est un grand film qui n'est pas facile parce qu'il nous oblige à regarder en face ce qui nous attend (...) mais c'est bien la seule grande perversité de ce grand réalisateur.
Comme Caché qui s'ouvrait sur un remake de Lost highway, comme Funny games qui démarquait l'idée qu'Haneke se faisait alors du cinéma américain, Amour pourrait être lu, simplement, comme une reprise rigoriste et gérontophile de L'Exorciste.
D'habitude asphyxiante, la direction d'Haneke est ici brillante, comme s'il prenait enfin la peine d'écouter les autres, plutôt que d'asséner sa vérité.
A force de distance, aussi élégante soit-elle, Maître Haneke ne suscite qu'une lente mais solide frustration. C'est peut-être, et même sans doute le but recherché. Le spectateur, averti, a le droit de passer son chemin.
Haneke ne fait que jouer sur la tension et le soulagement : "Amour" est un "funny game" qui ne dit pas son nom.
(Critique contre) Bien sûr que Haneke a du talent : Benny's Video, autrefois, Le Ruban blanc, récemment, l'ont prouvé. Seulement voilà : c'est un sombre. Un sévère (Cioran, à côté, c'est Feydeau). Un moraliste moralisateur, donneur de leçons angoissantes. Ses films, on les suit la peur au ventre, tassé dans son fauteuil, en se demandant, à chaque instant, si on supportera jusqu'au bout son sadisme. Et si oui, pourquoi... En fait, Haneke aurait tout pour égaler Bergman. Il lui manque seulement la compassion, qu'il remplace par de la rigueur. Mais la rigueur comme la sensiblerie, quand elles sont exacerbées, c'est de la pure complaisance.