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Un jeune garçon en pleine nature joue avec un oiseau tombé du nid. De ses douces mains, il caresse le volatile apaisé. Cette action inaugurale, on le sait, traduit tout ce qui va suivre. Cet oiseau devenu docile va bientôt s’incarner en une jeune fille, Gloria, qui ressemble comme une soeur à Paul, son protecteur. Fabrice du Welz, à l’instar d’un Malick, par exemple, pour peu que le bagage ne soit pas trop lourd à porter, filme cette rencontre comme une caresse. Le monde est un éden, le temps d’un instant. Pour prolonger cet effet foudroyant, il faut fuir. Gloria, prisonnière d’un institut psychiatrique où travaille la mère de Paul, convainc ce dernier de tenter le road-movie. Adoration, le titre ne ment pas. Ces deux-là s’aiment, certes, mais d’un amour pur et chaste tel que le voudraient les dieux. La promesse est belle mais trop partiellement tenue. Il fallait de l’audace pour remettre sur l’ouvrage le genre éculé du road-movie en forme de trip initiatique. Les deux interprètes sont au diapason de l’ensemble. Thomas Gioria, découvert dans Jusqu’à la garde, dégage à nouveau un calme et une sensibilité étonnants au milieu du tumulte. Face à lui, Fantine Harduin (révélée par Happy End d’Haneke) a plus de boulot et doit savoir gérer les tempêtes intérieures de son personnage, qui ont la mauvaise idée de s’extérioriser lors de deux scènes poussives déséquilibrant cette fragile entreprise. Comme un aveu d’échec, la présence forcément encombrante de Benoît Poelvoorde en colonel Kurtz, dans le dernier tiers, vient brouiller les pistes d’un film qui ne sait plus très bien où il doit aller, ni quoi faire de cette jeunesse déboussolée.