On s’est longtemps demandé si James Franco n’était pas une imposture. Il aura fallu attendre son 20efilm pour être persuadé du contraire : s’il tape tous azimuts, ça n’empêche pas pour autant l’acteur/réalisateur/écrivain de taper juste en adaptant du Faulkner réputé inadaptable. Dans As I Lay Dying, Franco parvient à retranscrire à l’écran les visions de l’auteur sudiste dans un film ambitieux et radical, fidèle à l’œuvre d’origine.C’est qu’il n’en est pas à son coup d’essai. Depuis 2005 donc, époque à laquelle il commence à se faire un nom d’acteur grâce aux Spider-Man de Sam Raimi, la star de 127 heures a réalisé 20 films. Ok, retirons 7 courts métrages et 3 documentaires (encore que, il a notamment filmé les coulisses du Saturday Night Live ce qui est sans aucun doute digne d’intérêt), il reste toujours 10 longs métrages de fiction. Et pourtant, As I Lay Dying est le premier à sortir dans les salles françaises. Ironiquement, il sortira directement en DVD aux Etats-Unis.En 2005, après la comédie Fool’s Gold dont on ne sait pas grand chose, il réalise ce qui semble être à première vue une version simiesque de Ted. Dans The Ape, il se met en scène en jeune écrivain névrosé qui quitte le foyer familial pour avoir un peu de tranquillité, et se retrouve à partager un appart avec un gorille parlant, portant des chemises hawaïennes et désireux de partager ses vues sur la vie, l’amour et le magnétisme animal. Fun fact 1 : même quand il réalise une comédie, James Franco expose au monde son amour de la littérature (il s’invente en écrivain persuadé d’être le nouveau Dostoïevski). Fun fact 2 : en 2011, il est la star du reboot de la Planète des singes, dans lequel il partage aussi sa vie avec un primate. Après un drame autour de deux jumeaux brillants qui s’éloignent quand l’un devient un grand chirurgien et l’autre sombre dans la drogue (Addiction, 2007), il porte à l’écran la vie du poète américain Hart Crane, suicidé en 1932 à l’âge de 32 ans. Il se réserve bien sûr le premier rôle et embarque avec lui Michael Shannon dans cette aventure tournée en 15 jours en noir et blanc et sortie confidentiellement sur le territoire américain.  La même année, ce sont les dernières heures de Sal Mineo, star d’un jour pour avoir partagé l’écran avec James Dean dans La Fureur de vivre (le jeune Plato) et assassiné en 1976 que filme (en 9 jours) James Franco. Une sortie encore très limitée et une tournée de festivals. L’artiste touche-à-tout réalise ensuite un film-hommage à River Phoenix (le frère de Joaquin, mort en 1993), avant de réimaginer à l’écran les scènes coupées de La Chasse de William Friedkin (thriller dans lequel un Al Pacino flic s'infiltrait dans les milieux gay underground) dans Interior. Leather Bar, nouvel objet destiné aux festivals et passé relativement inaperçu lors de la dernière édition de Sundance, mais qui sortira dans quelques salles françaises le 30 octobre.  Car 2013 est une année très chargée pour Franco réalisateur. Il n’a pas moins de quatre longs métrages réalisés, sortis ou sur le point de sortir. Outre les deux précédemment cités, il a également trouvé le temps d’adapter - avec succès - Child of God de Cormac McCarthy, ou la descente aux enfers d’un homme violent et à moitié fou qu’il a présentée à Venise, Toronto, New York et Austin cette année. Laissant quand même penser qu'il allait falloir commencer à le prendre au sérieux. Toujours guidé par son tropisme littéraire, il a également mis en boîte une histoire de la jeunesse du poète Charles Bukowski, qui n’a pas encore de date de sortie. Et a par ailleurs réalisé un des courts métrages du projet Venice 70 pour les 70 ans de la Mostra, auquel ont aussi participé Claire Denis, Bernardo Bertollucci, Atom Egoyan ou encore Abbas Kiarostami. Et si l’on en croit sa fiche IMDB, Franco a actuellement un film en post-production (Black Dog, Red Dog, autre projet collectif), un autre en pré-production (The Sound and the Fury, nouvelle adaptation de Faulkner dans laquelle il embarque Jon Hamm). Et il aurait également décroché les droits d’American Tabloïd, le premier volet de la trilogie Underworld USA de James Ellroy.Il a donc fallu 20 films pour dépasser l'image d'un acteur/artiste trop touche-à-tout pour être honnête. A condition qu'ils dépassent les circuits de festivals et arrivent en France, les trois prochains pourraient établir une bonne fois pour toutes que James Franco est un cinéaste. De ceux qui méritent une exposition en salles.Vanina Arrighi de CasanovaAs I Lay Dying, avec James Franco, Tim Blake Neslon, Danny R. McBride, actuellement dans les salles :James Franco : "Voyager chez Faulkner, c'est un peu comme aller à Disneyland"