- Fluctuat
Sur la route, Byron rencontre et prend en auto-stop un homme qui tente de se faire passer pour Elvis Presley. C'est dans la même facilité de la fuite et de la dénégation de la réalité que Byron et Elvis se réfugient depuis la perte de ceux qu'ils ont aimés (sa jeune épouse pour le premier ; sa femme, sa fille et son chanteur préféré pour le second).
Le trajet parcouru ensemble jusqu'à Memphis et le hasard des rencontres favorisent la psychanalyse des personnages, chacun se dévoilant à l'autre petit à petit. La parole devient alors le seul moyen de purger ses souvenirs pour apaiser ses souffrances. Mais ce voyage paraît surtout être un simple prétexte à de longs dialogues filmés en plans fixes, économie d'images quand l'on manque d'invention et de talent. Optant pour le road-movie à l'issue heureuse, David Winckler transforme en terre promise, ce chemin de croix Memphis, ville sacrée où les plaies des vivants se cicatriseront.Respectant l'implicite cahier des charges du road-movie, le réalisateur n'oublie pas les gros plans du volant et de la plaque d'immatriculation de la voiture, de filmer la route qui défile et les incontournables nuits passées dans des motels.
Harvey Keitel interprète un mythomane peu convaincant et souvent agaçant, que seuls des personnages méprisés par leur metteur en scène prennent pour Elvis. Cette identification à Elvis Presley rend inévitable la bande-son truffée de chansons du King.
C'est en voulant trop insister sur la douleur ressentie après la disparition de personnes aimées que David Winckler manque un sujet intéressant qu'il effleure sans réellement traiter : l'étrange fascination de certains pour des idoles qui les pousse à oublier leur personnalité pour devenir ceux qu'ils ne sont pas mais qu'ils auraient voulu être.Road to Graceland
De David Winckler
Avec Harvey Keitel, Bridget Fonda, Johnathon Schaech
Etats Unis, 1998, 1h37.
Road To Graceland