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Benjamin Dupas, créateur de la nouvelle création française de la plateforme, nous raconte sa manière originale d'aborder le genre.

Ce vendredi 20 mars, Netflix dévoile sa nouvelle création française originale. Une autre série fantastique, à base de Vampires, mais à l'atmosphère bien particulière. On y suit une famille de buveurs de sang, dans le Paris des années 2020. Le créateur, Benjamin Dupas, nous raconte sa façon d'aborder le genre.
 

À la base de la série, il y a un livre inachevé de Thierry Jonquet...
Benjamin Dupas : Oui, Netflix a acquis les droits et ensuite, ils m'ont appelé, moi et ma co-auteur Isaure Pisani-Ferry. Ils avaient envie de mettre des vampires dans Paris, dans quelque chose de contemporain, social... L'idée, c'était de revisiter le genre. Nous avons écrit une adaptation très libre du livre, à notre guise, en éliminant toute la partie polar, qui est la signature des romans de Jonquet. On s'est concentré sur l'ADN d'une famille de vampires, qui sont des gens affectés par une mutation génétique, et non des morts-vivants. Ils vivent planqués dans Belleville. Et à partir de là, on a extrapolé. Si vous avez lu le roman, vous verrez qu'il y a, au final, assez peu de choses en commun...

Qu'est-ce qui donne à Vampires sa particularité, par rapport aux autres fictions vampiriques, nombreuses ces derniers temps à la télé ou au cinéma ?
Pour aller à l'essentiel, on peut dire qu'on s'inscrit dans la tradition du genre scientifique des vampires, à base de mutants. C'est différent des vieux vampires des Carpates, cette mythologie des morts-vivants, à la Dracula. On n'est pas dans le même genre de vampires. On est plus proche de Blade ou du film Aux frontières de l'aube (Near Dark) de Kathryn Bigelow. On pourrait dire quelque chose de plus réaliste. Mais surtout, ces vampires, c'est nous. On vit l'histoire à travers leurs points de vue.

Et puis ce sont des femmes, essentiellement...
C'est l'une des particularités majeures de notre série. On est dans l'inversion des rôles : au lieu d'une jeune fille qui arrive au lycée et qui tombe amoureuse d'un mystérieux vampire sexy et transgressif, roulant dans un gros 4x4 Volvo, nous, on présente une jeune fille qui se transforme en vampire. Ça vient d'elle. De sa famille. Ce sont des gens vulnérables. Ils ne sont pas tout puissants. S'alimenter en sang, c'est difficile. Tuer des humains, c'est interdit. Du coup, on change complètement la perspective.

On peut dire que c'est une histoire de vampires à taille humaine ?
Oui, parce que c'est nous qui vivons l’histoire, à travers les yeux des vampires. Ce n'est pas le cas dans Twilight, dans Vampire Diaries, ni même dans True Blood. Les personnages principaux chez nous sont des femmes. Il y a une sorte de prise de pouvoir. On prend l'idée des vampires par un autre biais. Et à partir de là, on décline, en introduisant un peu de romance avec de jeunes hommes, une famille rivale composée de gens beaux et dominants... Là, on joue avec les codes.



Pour aller plus loin dans l'explication de la mythologie de Vampires, ici, c'est la génétique qui est la base de tout. On n'est pas transformé pas des morsures..
Alors on peut dire que nos vampires sont touchés par une mutation génétique, qui fait qu'ils vivent 5 fois plus longtemps que nous. Mais ils peuvent mourir d'une maladie ou d'un accident de voiture, du jour au lendemain. Le sang est leur unique aliment. Leur métabolisme est transformé par rapport au nôtre. Et ils sont un peu plus forts que nous. Mais pas autant que dans Twilight. Ils ne peuvent pas grimper aux arbres sans les mains... Ils ont les sens plus développés en somme. On reste dans un domaine plus réaliste que ce qui se fait souvent dans le genre. Après, ils ne supportent pas le soleil. Ça les brûle, mais pour autant, ils ne sont pas réduits en poussière... Je dirais qu'on respecte le genre, on a vu les classiques du genre, mais on prospère plutôt du côté des variantes alternatives. Plus féministes, plus réalistes, moins folkloriques.

Quelles sont les références qui ont inspiré la création de Vampires ?
Dans le genre, je dirais Grave, de Julia Ducournau et Aux frontières de l'aube de Kathryn Bigelow, où c'est aussi un femme qui va initier un jeune homme. Elle n'a pas de crocs, elle n'a pas ce côté folklore roumain. Ce sont deux films qui ont aidés à situer nos vampires.

Pourtant, la famille centrale de Vampires, ce sont les Radescu. Il y a là un clin d'oeil à ce folklore roumain de la mythologie vampirique, non ?
Absolument, c'est un peu paradoxal, je le reconnais. Pendant longtemps, on gardé dans le script des origines roumaines à nos personnages, qui sont présentes chez Thierry Jonquet. Et puis au bout d'un moment, dans l'écriture, on s'est rendu compte que, pour rendre le message plus clair, il valait mieux éviter de se référer aux Carpates. Parce que justement, nos vampires étaient plus scientifiques que mythologiques. Mais pour respecter aussi le roman, on a gardé le nom de famille. Après, on a créé une ascendance algérienne, un métissage, qui n'est pas présent dans le livre. Un cosmopolitisme qui est important pour nous.

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La série est aussi très ancrée dans la modernité, il y a un aspect urbain très marqué. Pour être en phase avec l'époque ?
Tout à fait. On a voulu être en phase avec la topographie, le Paris populaire, le Paris dans lequel moi je vis, le Paris dans lequel Thierry Jonquet lui-même vivait, à Belleville. Ça nous tenait à cœur de montrer des vraies rues, que ce ne soit pas un Paris de carte postale. Même si forcément, on ne peut pas ignorer complètement l'aspect iconique de Paris, puisque la série va sortir dans 190 pays dans le monde...

La série se passe en grande partie au lycée. Vous diriez que c'est une série adolescente aussi ?
Notre héroïne est une adolescente, donc c'est une composante de Vampires. Là, on rejoint la schéma d'une "coming of age story", qui est important dans pas mal de séries Netflix. Pour comparer, on est un peu moins teen que Mortels (également sur Netflix), notre histoire est plus chorale et familiale.

Il y a un travail esthétique important à l'image. Vous aviez envie de montrer quelque chose qui ne soit pas glamour ?
Au fond, on utilise le vampirisme comme une métaphore de la clandestinité, de la vulnérabilité, de la double identité. Donc a cherché à avoir des aspérités, c'est sûr. Mais de mon point de vue, notre casting est ultra-glamour ! Elles portent ce message de métissage, de diversité. C'es quelque chose de très important pour nous. Nos trois personnages principaux sont tous les trois à la lisière du vampirisme. Il y en a une qui ne l'était pas et qui le devient. Il y en a un qui ne l'est pas et qui voudrait l'être. Et une autre qui l'est, et qui fait tout pour arrêter de l'être. Ils sont tous les trois à la frontière de quelque chose et l'esthétique devait aussi montrer ça, une fragilité.

Comment avez-vous pensé le côté horrifique, inhérent au genre ?
Faire peur aux spectateurs, ce n'est pas l'émotion primordiale. On cherche plutôt l'empathie. On vit l'histoire à travers eux. Ils sont humains, un peu comme nous, un peu différents. Alors bien sûr, il y a quelques moments de tension, mais le cœur de Vampires, ce n'est pas d'être une série effrayante. On n'est pas dans le genre horrifique.

Vos personnages boivent beaucoup de sang, tout au long de la saison. Mais que boivent les acteurs en réalité sur la plateau ?
C'est une mixture, concoctée par notre chef accessoiriste. Il y a de la betterave, du sirop... C'est une consistance assez épaisse. Assez sucrée. D'après nos comédiens ce n'est pas trop mauvais !