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Les six saisons de la série de Charlie Brooker passées en revue. À votre avis, qui est le premier ?

Alors que la saison 6 de Black Mirror est disponible depuis peu sur Netflix, l’heure est venue de classer les épisodes de la série de Charlie Brooker selon notre ordre de préférence. Alors, qui est sur le podium ?

Black Mirror, Charlie Brooker : "Je ne pense pas qu’on sera un jour à court d’idées"

28. Haine virtuelle (saison 3, épisode 6)

Une série de meurtres frappe les victimes de bad buzz sur les réseaux sociaux. Des policiers enquêtent pour tenter de démasquer le coupable qui se sert d’abeilles robotisées pour tuer ses victimes. Haine Virtuelle se rêve en techno-thriller haletant aux inspirations nordiques. Dans les faits, l’épisode se perd dans une traque prévisible et mollement subversive qui mélange tout. Un peu nul.

27. Mazey Day (saison 6, épisode 4)

Charlie Brooker fait son Night Call en raté. L'histoire d'une starlette hollywoodienne fragile, Mazey Day, qui disparaît du jour au lendemain après un délit de fuite, attisant les convoitises de tout ce que Los Angeles compte de paparazzi. Dont Bo (Zazi Beetz) photographe de la presse à scandale qui s'était juré de raccrocher de ce métier de charognards, mais ne peut se permettre de passer à côté des 30 000 dollars de récompense pour un cliché de Mazey Day... Drôle d'épisode, mal dégrossi, dont les personnages sont à peine esquissés. Ça part dans tous les sens, rien ne fonctionne vraiment et la résolution, à la frontière de l'absurde, fait penser à ce que Les Contes de la crypte a produit de plus gênant.

26. Le Show de Waldo (saison 2, épisode 3)

Un comédien de seconde zone double un ours bleu en images de synthèse, Waldo, qui acquiert une popularité surprenante au point de se présenter aux élections locales. Démonstration par l’absurde qu’en attisant les plus bas instincts du peuple avec un écrin sympathique, on arrive à tout. Certains diront qu’il prophétisait l’élection de Donald Trump. Bof.

25. Tuer sans état d’âme (saison 3, épisode 5)

Une unité militaire d'élite est chargée d’éliminer des humains dégénérés, les « cafards », qui se cachent un peu partout. Mais un des soldats va découvrir que la réalité n’est pas si simple. Une tentative d’évoquer le stress post-traumatique et la déshumanisation des cibles qui loupe le coche, notamment à cause de son personnage principal un brin caricatural.

24. Bandersnatch (épisode spécial)

Un Livre dont vous êtes le héros à la sauce Black Mirror. Premier (et seul, heureusement) épisode interactif de la série, Bandersnatch permet donc au spectateur de prendre les décisions à la place du héros de l’histoire, un programmeur (Fionn Whitehead) qui bosse sur un jeu vidéo d’aventure. Fable méta plutôt ratée sur le libre arbitre et l’écriture de scénarios, Bandersnatch renferme tout de même quelques séquences assez jouissives, pour peu qu’on ne se lasse pas d’explorer ce sytème d’embranchements. 

23. La Chasse (saison 2, épisode 2)

Une jeune femme se réveille amnésique dans une chambre lugubre. Quand elle sort, tout le monde la filme et ignore ses appels à l’aide alors qu’un homme cagoulé armé d’un fusil commence à lui tirer dessus… La Chasse tient à peu près la route jusqu’à sa révélation finale abracadabrantesque qui détruit totalement ce qui avait été mis en place. Une fausse bonne idée.

22. Joan est horrible (saison 6, épisode 1)

Concept génial : une femme ordinaire, Joan (Annie Murphy), découvre en rentrant du boulot que la plateforme Streamberry - une parodie de Netflix - adapte au jour le jour sa vie quotidienne sous la forme d'une série, Joan est horrible, où Salma Hayek joue son rôle. Toute son intimité est dévoilée au grand public, de ses textos à son ex à ses séances chez la psy. Une charge méta contre Netflix, où Charlie Brooker questionne la volonté des streamers de produire du flux quoi qu'il en coûte, ainsi que l'écriture par l'intelligence artificielle. Ça devrait être punk et irrévérencieux, mais passée la surprise, l'épisode tourne en rond et devient terriblement générique. Sacré gâchis.

21. Rachel, Jack et Ashley Too (saison 5, épisode 3)

Une superstar de la pop, Ashley O (incarnée par Miley Cyrus), enchaînée créativement par sa tante, se voit obligée de faire la promo d’une poupée connectée censée avoir sa personnalité. Mais quand elle tombe dans le coma, sa conscience se transfère dans l’une des poupées achetée par une fan adolescente. Plus optimiste que la plupart des épisodes de Black Mirror, Rachel, Jack et Ashley Too s’attaque aux dérives de l’industrie musicale. Passé le vertige de voir Miley Cyrus ausculter sa condition dans une fiction (on pense aussi fortement au cas Britney Spears), l’épisode bégaye et n’a finalement pas plus à dire que ce que ses 15 premières minutes encapsulaient parfaitement.

20. Smithereens (saison 5, épisode 2)

Un chauffeur VTC (Andrew Scott) kidnappe un employé d’un réseau social dans le but de parler à son grand patron (Topher Grace), gourou techno-new age. Du Charlie Brooker très faiblard sur l’addiction aux réseaux sociaux et le cynisme des entreprises qui les conçoivent. Épisode assez nul, partiellement sauvé par la prestation intense d’Andrew Scott.

19. Démon 79 (saison 6, épisode 5)

Dans le Nord de l'Angleterre, en 1979, Nida (Anjana Vasan), une humble vendeuse de chaussures d'origine indienne pas du tout du genre à se faire remarquer, convoque malgré elle une entité (Paapa Essiedu, hilarant) qui lui apprend qu'elle doit commettre de terribles méfaits pour empêcher un événement cataclysmique... On n'en dira pas plus. Une comédie horrifique sanglante et rigolarde pour parler racisme ordinaire et émancipation féminine, le tout sur fond de possible fin du monde. Plutôt bien vu, malgré une durée tout à fait déraisonnable - l'un des problèmes récurrents de la saison 6 - qui dessert l'épisode et l'empêche de pleinement décoller.

18. Archange (Arkangel, saison 4, épisode 2)

Une mère s’inquiète pour la sécurité de sa fillette et décide de lui faire implanter un dispositif de surveillance qui permet de voir en temps réel à travers ses yeux. Charlie Brooker trébuche sur un scénario dont les thématiques lui allaient a priori lui allait comme un gant (la relation parent-enfant et l’obsession de la surveillance). Derrière la caméra, Jodie Foster fait le service minimum. Pas foncièrement mauvais, juste une grosse impression de déjà-vu.

17. Chute Libre (saison 3, épisode 1)

Les prémices sont alléchants : dans un monde devenu un Instagram géant (chacun doit attribuer une note aux comportements des autres), Lacie tente de grimper en haut de la pyramide sociale. Quand son amie d’enfance, « likée » de toutes parts, lui demande d'être sa demoiselle d'honneur, Lacie voit l'opportunité d'améliorer sa note et réaliser ses rêves. Porté par une Bryce Dallas Howard légèrement too much, Chute Libre est beaucoup trop démonstratif pour être convainquant.

16. Striking Vipers (saison 5, épisode 1)

Couple à la dérive, Street Fighter, cybersexe, homosexualité refoulée, transidentité, infidélité et addiction au porno : meilleur épisode de la saison 5, Striking Vipers met en scène deux potes (Anthony Mackie et Yahya Abdul-Mateen II) qui jouent à un jeu de combat en réalité virtuelle permettant de ressentir les coups… mais aussi les caresses. Au lieu de se mettre des pains, ils commencent donc à se rouler des pelles. Super concept assez brillamment mis en scène par Owen Harris (qui avait déjà réalisé San Junipero et Bientôt de retour) mais qui manque sûrement d'incarnation pour pleinement retomber sur ses pattes.

15. USS Callister (saison 4, épisode 1)

La nuit, Robert Daly est le capitane sans pitié de l’USS Callister, un vaisseau de Space Fleet. Le jour, il est le cofondateur brimé et timide d’un jeu vidéo en ligne à succès. L’hommage de Black Mirror à Star Trek et aux sitcoms des années 60 tourne à la tarte à la crème : toute réflexion potentiellement intéressante a déjà été étudiée dans d’autres épisodes. Reste la parodie et un chouette casting. C’est peu.

14. Loch Henry (saison 6, épisode 2)

Alors qu'ils pensaient réaliser un documentaire sur la nature, un jeune couple découvre qu'un petit village écossais a été traumatisé par un tueur en série qui kidnappait des touristes de passage pour les torturer dans sa cave. Ils décident alors de changer de sujet et de faire un docu true crime beaucoup plus vendeur... Un Black Mirror petit cru mais pas inintéressant sur notre rapport très glauque aux histoires criminelles et à la façon dont Netflix en a standardisé l'imagerie pour faire son beurre. Mais comme dans Joan est horrible, Brooker ne peut pas s'empêcher de tirer en longueur et d'éventer son twist avant l'heure, sans forcément retrouver l'acidité des premières saisons.

13. Tête de métal (saison 4, épisode 5)

Dans un futur apocalyptique où les robots sont devenus des machines à tuer, une femme lutte pour sa survie. Joli épisode en noir en blanc tout en tension signé David Slade (30 Jours de nuit). Un exercice de style entre Terminator et Métal Hurlant. Mais est-ce que tout ça rentre vraiment dans le folklore de Black Mirror ?

12. Playtest (saison 3, épisode 2)

Un jeune homme accepte de tester jeu vidéo révolutionnaire en réalité augmentée, directement relié à son cerveau. L’expérience horrifique va s’avérer plus intense qu’il ne le pensait. Finement réalisé (Dan Trachtenberg de 10 Cloverfield Lane est derrière la caméra), Playtest joue avec le thème de la maison hantée et capture les frissons des joueurs du premier Resident Evil. Mais sur le plan du scénario - très prévisible - on repassera.

11. Black Museum (saison 4, épisode 6)

Une touriste tombe par hasard sur un musée proposant des artefacts criminels rares. Le proprio lui fait faire le tour des lieux et en profite pour raconter les sordides histoire liées aux objets. Un épisode à part, entre Les Contes de la crypte et les Horror Show d’Halloween des Simpson. Rafraîchissant et malin.

10. 15 millions de mérites (saison 1, épisode 2)

Dans un monde où les moins riches passent leurs journées à pédaler sur un vélo d’appartement pour gagner de l’argent et espérer être sélectionnés pour une émission de télé-réalité genre X-Factor, Bing Madsen se rebelle. Un épisode un peu long, volontairement kitsch mais dont la conclusion suffit à elle seule à rattraper de grosses lourdeurs. Ou comment le système finit irrémédiablement par dévorer ses contestataires en les faisant goûter à ses privilèges.

9. Mon coeur pour la vie (saison 6, épisode 3)

Dans une version alternative de l'année 1969, deux astronautes en mission pour six ans au fin fond de l'espace ont à disposition une machine leur permettant d'uploader leurs consciences sur Terre, dans des clones robotiques imitant à la perfection leurs corps. Malgré l'éloignement physique extrême, ils peuvent donc maintenir un équilibre entre vie de famille et boulot. Jusqu'au jour où tout déraille pour l'un d'eux... Comme dans tout bon épisode de Black Mirror, technologie et drame humain s'entremêlent et existent sur le même plan. Vrai petit film (il dure 1 h 20), Mon Coeur pour la vie doit aussi beaucoup aux prestations impeccables de son casting (Aaron Paul, Josh Harnett et Kate Mara).

8. Crocodile (saison 4, épisode 2)

Une architecte réputée tente de masquer un meurtre alors qu’une technologie permet de lire dans ses souvenirs. L’histoire d’une femme lancée dans un engrenage meurtrier, et prête à tout pour conserver l’îlot de confort qu’elle s’est construit au milieu des paysages désertiques de l’Islande. Une spirale de violence qui met KO.

7. Pendez le DJ (saison 4, épisode 4)

Frank et Amy se rencontrent grâce à une application qui décide du début et de la fin d’une relation (un jour, un mois, un an…). Chaque nouvelle histoire d’amour est un test avant que le système ne les mette en contact avec leur âme soeur. Un Tinder puissance 1000 souvent hilarant, avec un couple ultra attachant et Charlie Brooker qui décharge sa bile acide sur les applications de rencontre. Simple, mais très efficace.

6. Tais-toi et danse (saison 3, épisode 3)

Plusieurs personnes se font pirater et sont menacées de la publication d’informations très compromettantes à leur sujet. Le jeune Kenny doit suivre les consignes absurdes des hackers et rencontre Hector, un homme avec qui il est forcé de faire équipe. Un truc horriblement brut et sombre sur les trolls et les conséquences du harcèlement en ligne. Avec un twist final qui vous laisse les jambes tremblantes.

5. Blanc comme neige (Christmas Special)

Ça commence comme un petit thriller intimiste (deux hommes coincés dans une cabane au fond des bois le soir de Noël) avant de se transformer en réflexion sur le ghosting adapté à la vraie vie et les droits des intelligences artificielles. Quand Black Mirror commence à se poser des questions existentielles (si un ordinateur se prend pour un humain, en est-il un ?). Brillant.

4. L’Hymne national (saison 1, épisode 1)

La princesse de la famille royale britannique est kidnappée et son ravisseur demande au Premier ministre d’avoir des rapports sexuels avec un porc en direct à la télévision pour la libérer. L’épisode fondateur pousse directement tous les curseurs dans le rouge, mais ce qui aurait pu n’être qu’un produit d’appel au pitch transgressif dépasse la simple provocation pour devenir une fable grinçante sur notre rapport au voyeurisme. Le moins technologique des épisodes de Black Mirror, mais définitivement l’un des plus grands.

3. San Junipero (saison 3, épisode 4)

Attention, bug dans la matrice. Loin des obsessions habituelles de la série, San Junipero est une love story dans l’au-delà numérique, où deux femmes défient le temps et l’espace pour vivre leur histoire. Loin des obsessions de la série, l’épisode met en avant une technologie bienfaitrice, quasi divine, qui résout le problème de la vie après la mort. Une anomalie comme on aimerait en voir plus souvent dans Black Mirror et qui doit beaucoup aux prestations impeccables de Gugu Mbatha-Raw et Mackenzie Davis. Love is in the air.

2. Retour sur image (saison 1, épisode 3)

Que se passe-t-il quand une puce permet d’enregistrer chaque seconde de sa vie et de se repasser n’importe quel moment en un clin d’oeil ? Dans ce futur pas si éloigné, un homme (le formidable Toby Kebbell), persuadé que sa femme (Jodie Whittaker) le trompe, mène l’enquête et sombre doucement dans la folie. The Entire History of You frappe directement au plexus : bien mieux qu’un simple message d’avertissement, l’épisode met abus technologique et drame humain au même niveau. Black Mirror est vraiment né.

1. Bientôt de retour (saison 2, épisode 1)

Aux funérailles de son petit ami, Martha apprend qu’un service permet de reconstituer une partie de l’être aimé à travers son historique Internet. Quand elle commence à échanger des textos avec lui, elle met le doigt dans un engrenage dont elle ne reviendra pas. Un vrai drame sur l’incapacité de faire son deuil en présence des traces numériques qu’on laisse derrière nous, et un parfait objet SF qui brouille les frontières entre la vie et son simulacre technologique. Magistralement interprété par Hayley Atwell (de loin le meilleur rôle de sa carrière) et Domhnall Gleeson, Be Right Back est beau à pleurer.