PHOTOS – La famille Miramax : vingt ans ferme
Billy Bob Thornton
<strong>Casier :</strong> Réalisateur et acteur ; Sling Blade et De si jolis Chevaux. <strong>Implication dans le dossier :</strong> La première réalisation de <strong>Thornton</strong>, Sling Blade (où il joue le rôle principal, un idiot du village qui finit par égorger un homme), a été récupérée par les Weinstein qui en ont fait un gros succès en utilisant la personnalité de <strong>Thornton</strong> à travers des spots promotionnels jouant à fond sur son côté « bouseux monté à Hollywood ». Weinstein lui confie alors l?adaptation du roman de Cormac MacCarthy, De si jolis Chevaux, avec <strong>Matt Damon</strong>. Objectif : en faire un gros film romantique crépusculaire. Le résultat : tout à l?opposé. Une heure de film coupé, et des engueulades homériques avec Harvey. <strong>La phrase qui tue :</strong> Extrait d?une conversation téléphonique avec Harvey Weinstein. <em>« Je vais te planter une fourchette dans le cou, enfoiré, mon nom c?est Billy Bob, je vais te traîner derrière la grange et te casser le cou ».</em>
Bob Weinstein
<strong>Casier : </strong>Producteur et distributeur, Miramax et Dimension Films <strong>Implication dans le dossier : </strong>Toujours vu dans l?ombre de son frère Harvey, Bob Weinstein fut toutefois le chef de Dimension Films, la filiale de Miramax dédiée aux films de genre (comédie, gore, fantastique?). Pourtant, grâce à des succès comme Scream, Sin City, Spy Kids, ce fut bien souvent Dimension qui renflouait les caisses de Miramax. D'aspect plus discet, il est tout aussi "impliqué" que son frère... <strong>La phrase qui tue : </strong><em>« Ca nous rapporte quoi ? »</em>
Martin Scorsese
<strong>Casier : </strong>Réalisateur ; Gangs of New York <strong>Implication dans le dossier : </strong>Première et unique collaboration de <strong>Martin Scorsese</strong> avec Miramax, le projet Gangs of New York le hantait depuis dix ans : l?idée était de faire un film de gangsters ultra épique dans le New York de la fin du dix-neuvième siècle. Et voilà <strong>Scorsese</strong> pris dans deux années épuisantes, englué dans une guerre des nerfs avec <strong>Harvey Weinstein</strong> qui se voyait co-réalisateur. La sortie de Gangs of New York est décalée d?un an à cause du 11-septembre. A l?arrivée, un film bancal qui porte sur son visage les ambitions brisées. <strong>Le détail qui tue : </strong><strong>Scorsese</strong> a fait installer des miroirs au-dessus de la table de montage afin de prévoir l?arrivée inopinée d?<strong>Harvey Weinstein</strong>.
Quentin Tarantino
<strong>Casier : </strong>Réalisateur et acteur ; Reservoir Dogs, Pulp Fiction, Jackie Brown, <em>Four Rooms</em>? <strong>Implication dans le dossier : </strong>Récupéré à Sundance grâce à Reservoir Dogs. Du fait de sa Palme d?or en 1992 grâce à Pulp Fiction, a toujours été chéri par Harvey comme le fils qu?il n?a jamais eu. Tout ce qu?il fait trouve grâce à leurs yeux ; son ego s?en ressent et il plombe le projet de film à sketches Four Rooms, qui enterre les carrières d?<strong>Allison Anders</strong> et <strong>Alexandre Rockwell</strong>. Sa fidélité à Miramax a fait qu?il est resté avec eux à travers The Weinstein Company pour Inglourious Basterds, son plus gros succès public. <strong>Le détail qui tue : </strong>Il a dû lutter bec et ongles pour garder la scène de l?oreille dans Reservoir Dogs.
Matt Damon et Ben Affleck
<strong>Casier : </strong>Acteurs et scénaristes ; Will Hunting <strong>Implication dans le dossier : </strong>Potes d?enfance de Boston, acteurs fauchés rêvant de gloire, ils envoient le scénario de Will Hunting à <strong>Weinstein</strong>, qui engage <strong>Gus Van Sant</strong> pour le réaliser. Le film cartonne au-delà de toute espérance. <strong>Van Sant</strong> en sort sur les genoux, mais <strong>Damon</strong> et <strong>Affleck</strong> deviennent des stars. <strong>Le détail qui tue : </strong><strong>Damon</strong> et <strong>Affleck</strong> ont écrit le rôle du psy dans Will Hunting de façon à ce qu?une grande star puisse l?interpréter : un rôle-clef, sensible et touchant, mais en même temps suffisamment court pour permettre à une grosse légume de le faire pour pas trop cher.
Steven Soderbergh
<strong>Casier : </strong>Réalisateur, scénariste, directeur de la photo; Sexe, mensonges et vidéo, Schizopolis, Kafka <strong>Implication dans le dossier : </strong>Il fut le véritable ticket gagnant pour les Weinstein : le jeune <strong>Steven Soderbergh</strong> présente son premier long-métrage, Sexe, mensonges et vidéo, à Sundance en 1989. Porté par un bouche-à-oreille fabuleux, il obtient le prix du jury. Les Weinstein s?en emparent, misent à fond sur l?ambigüité du titre en organisant une promo d?enfer, et leur poulain remporte la Palme d?or à Cannes. Ensuite, vidé, Soderbergh s?abîme dans des films expérimentaux et se met les frères W. à dos. Jusqu?à Erin Brokovich qui lui permettra de faire enfin tout ce qu?il voulait. <strong>La phrase qui tue : </strong>"Je rêvais<strong> </strong>d'une carrière à la <strong>John Huston</strong>..."
Kevin Smith
<strong>Casier : </strong>Acteur, réalisateur, scénariste ; Clerks, Dogma, Jay et Bob contre-attaquent <strong>Implication dans le dossier :</strong> Encore un type de Sundance. Acteur, réalisateur et scénariste du fauché et réjouissant Clerks, <strong>Kevin SmithWeinstein</strong> est malin et ne cherche pas le conflit ouvert avec en acceptant en grande partie ses « conseils » de coupes. De fait, sa loyauté lui a permis de continuer à travailler avec eux, y compris dans la douleur, à travers Dogma, Jay et Bob contre-attaquent, etc. <strong>La phrase qui tue : </strong><em>« Bonjour, monsieur Weinstein. J?ai pris des notes pendant la projection et je crois qu?il faut couper une dizaine de minutes? »</em>
Harvey Weinstein
<strong>Casier : </strong>Surnommé « Harvey Scissorhands » du fait de sa tendance à vouloir couper dans les films. <strong>Implication dans le dossier : </strong>L?histoire de Miramax se confond nécessairement avec celle d?Harvey Weinstein. Gros mangeur, fumeur invétéré, tyrannique, nerveux, agressif. Et pourtant, lorsqu?il croit en un film, il met le paquet, usant et abusant de tous les stratagèmes afin de récupérer les droits de distribution. Il gagne le jackpot avec La leçon de piano, Amélie Poulain, Le Patient anglais? personnalité ambigue, monstre détestable pour certains, artiste frustré prêt à tout pour les autres, il a fait Miramax à son image et a marqué le cinoche américain de la fin du vingtième siècle. <strong>La phrase qui tue : </strong><em>« Si je me suis emporté, c?est parce que j?adore les films. »</em>
Après l’annonce de la fermeture de Miramax par son propriétaire, Disney, retour sur les principaux intéressés qui sont passés par la fameuse compagnie.Miramax, 1979-2010. 30 ans d’existence pour une compagnie qui a régné par le fer et par le feu sur le monde de cinéma dit « indépendant » (i.e., hors des majors comme Warner, la Fox, etc.). Distribution et production : les deux frères Weinstein, Bob et Harvey, jouent très gros en essayant d’arracher les projets qui leur semblent les plus excitant, en montant des campagnes de pub agressives, en croyant aux spots télé dès le début, et en mettant des enchères extrêmes sur les films. Le résultat : des très gros cartons (Scream, Pulp Fiction...), des flopées d'Oscars, des Palmes d'or, et plein de bide; et surtout, la personnalité attachante d'Harvey, véritable ogre tyrannique du cinéma.Le 28 janvier 2010, Disney, propriétaire de Miramax, choisit de liquider la compagnie. La fin d’une époque, tout de même.La source principale, pour ce qui concerne Miramax, est l’incontournable Sexe, Mensonges et Hollywood (éd. Points Seuil), écrit par Peter Biskind, et disponible dans toutes les bonnes crèmeries à vil prix. Le bouquin raconte vingt ans de cinéma indépendant américain, à travers le festival de Sundance (créé par Robert Reford) et l’histoire de Miramax, of course.Retour sur les membres de la « famille Miramax », acteurs, réalisateurs et scénaristes, qui ont croisé le chemin des Weinstein : de Soderbergh à Scorsese en passant par Tarantino, vingt ans de cinoche américain en marge des gros studios. Là où la concurrence et les enjeux sont tout aussi terribles.
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