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En 2021, la réussite du nouveau Candyman laissait suggérer que la réalisatrice Nia DaCosta avait la capacité de s’exprimer dans une double contrainte : celle de la suite/reboot d’une franchise et celle de la production d’un mastermind (Jordan Peele en l’occurrence). Le générique de ce Candyman se déroulait sur des images troublantes d’immeubles à l’envers (après les logos inversés des studios), s’enfonçant dans un ciel nuageux devenu sol cauchemardesque ; une façon de signifier que le nouveau Candyman s’envisageait comme un drôle de reflet de l’original de 1992, où un spectre vengeur surgissait des miroirs pour effectuer sa sinistre besogne.
Au fond, réaliser The Marvels signifie être assujetti aux mêmes règles que pour Candyman. Mais Kevin Feige n’est pas Peele, et le Marvel Cinematic Universe n’est pas une franchise d’horreur à budget moyen. Nul ne peut pénétrer le système Marvel sans y disparaître totalement -c’est son âme qu’on perd, absolument, et il faut être James Gunn pour arriver à s’en sortir alors que le MCU en est à un tel point de dissolution.
Il est pourtant question de reflets également à l’origine de The Marvels : les trois superhéroïnes du film partagent le même nom et la même source de pouvoir, mais chacune avec son style particulier. La belle blonde christique (Brie Larson somnambulique), la jeune Noire astronaute (Teyonah Parris, déjà dans Candyman) et l’ado fangirl (Iman Vellani, héroïne de la série Miss Marvel).
Et le problème surgit dès le départ : si vous n’avez pas vu ces autres reflets du MCU -à savoir les séries WandaVision et Miss Marvel- il sera très difficile de ne serait-ce qu’accepter les principes de départ de The Marvels et de rentrer dans le film. Il a beau se résumer à une aventure de space opera très simple (une grande méchante veut sauver son monde mourant en employant des moyens pas cool), jamais The Marvels ne réussit à s’affirmer en toute indépendance.
Tout en montrant que décidément, les autres films du MCU sont bien trop longs, sa courte durée (1h45) permet aussi de le réduire aux dimensions d’un épisode de Star Trek : The Next Generation en encore plus cheap, avec ses maquillages nanars, ses fonds verts bâclés, son exotisme pulp et ses répliques impossibles à prononcer sérieusement (extrait du dialogue dans les dix premières minutes : "Que prépare Dar-Benn ? -Le Supremor a déjà atteint Tarnax !").
C’est dommage parce qu’Iman Vellani possède une énergie très justement dirigée : irritante au début à fangirler sur son idole Captain Marvel, elle finit par s’affirmer et trouver une jolie place dans ce space opera finalement très prévisible. L’idée de l’échange des corps lorsqu’elles utilisent leurs pouvoirs n’est qu’une toute petite idée de cinéma, vite évacuée puisqu’elle ne sert qu’à réunir les trois héroïnes ensemble et lancer le film. La vraie belle idée, qui évoque les romans de Jack Vance, c’est de nous faire visiter une planète où les habitants ne communiquent qu’en chantant -là aussi, c’est sympa mais très vite évacué.
Le climax du film ? Balancer dans l’espace des dizaines de chats avec "Memory" en fond sonore, chanson tirée de la comédie musicale Cats. Une idée qui ne fonctionne pas du tout, mais qui utilise la plus belle chanson d’Andrew Lloyd Webber, cachée dans un musical particulièrement WTF. Si seulement The Marvels avait eu l’idée de se singulariser autant au sein d’un MCU de plus en plus déboussolé…