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Antoine Barraud aime distiller du fantastique dans l’apparente banalité du quotidien. Dans Les Gouffres, ce fantastique enveloppait une chercheuse happée par la proximité du vide au fil de son exploration d’une cavité rocheuse. Dans Le Dos rouge, il naissait dans l’esprit d’un cinéaste se perdant dans la préparation d’un film sur la monstruosité. Le tout sans effet, avec le goût du jeu de pistes cérébral et le talent pour le mener à son terme. Madeleine Collins emprunte le même chemin mais Barraud y franchit un nouveau cap en signant son film le plus grand public, sans pour autant lui pré- mâcher les choses. Son intrigue se construit tel un puzzle pour tenter de saisir ce qui se passe dans la tête de son héroïne dont on va comprendre qu’elle mène une double vie amoureuse. Entre la Suisse et la France. Entre Abdel avec qui elle élève sa petite fille et Melvil, avec qui elle a eu deux garçons. Avant que peu à peu le piège se referme sur elle et que la poursuite de ses mensonges doive passer par une fuite en avant. Barraud n’aborde jamais son sujet sur le terrain de la morale mais nous le fait vivre dans la tête de cette femme qui a elle tout parfaitement compartimenté. Il ne cherche pas à expliquer ce va- et- vient, il épouse sa folie dont on ne sait jamais si elle est douce ou manipulatrice. Ce personnage border line tout en intériorité nécessitait une actrice toute en nuances et puissance tranquille. Virginie Efira ne pouvait pas être un meilleur choix tant elle s’y montre magistralement fascinante.