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C’est un film qui a été rattrapé par l’actualité lors de sa présentation dans la section Un Certain Regard du dernier festival de Cannes. Car l’assassinat du Président d’Haïti Jovenel Moïse par un commando armé fait évidemment écho au portrait de ce pays qu’esquisse l’haïtienne Gessica Généus, pour son premier long métrage de fiction qui en dit long sur la tension régnant sur ces terres. L’action de Freda se situe en 2018, soit 8 ans après le tremblement de terre ayant meurtri cette île et dont elle ne s’est toujours pas remise, entre une aide internationale qui arrive au compte- gouttes et la corruption qui y règne en maître. Au milieu de ce chaos et d’une violence prête à surgir à tous les coins de rue, la cinéaste a choisi de raconter un trio de femmes – une mère et ses deux filles – tentant de résister tant bien que mal au patriarcat dominant et à joindre les deux bouts avec la petite échoppe de rue qu’elles possèdent. Une mère dévote, sa fille aînée insouciante pensant échapper à son destin par un mariage avec un riche sénateur et la cadette, la Freda du titre, la plus politisée de toutes, se battant au quotidien pour que les choses changent. Trois personnages que le scénario ne cessera d’emmener loin des archétypes en jouant avec leurs ambiguïtés, leurs contradictions. La force de la fiction est telle ici qu’elle rend même factice les moments de vraies manifestations que la réalisatrice a inutilement glissé dans son récit. Mais ces imperfections ne gâchent pas la puissance du film jusqu’à son dénouement très malin qui ne sacrifie pas au banal happy end.