Le film de Ridley Scott revient à la télévision.
En attendant la sortie de Gladiator II, Cstar rediffusera le film historique Kingdom of Heaven, de Ridley Scott. L'occasion de relire les propos de son héroïne Eva Green dans les pages de Première lors de sa sortie au cinéma en 2005. Il s'agissait alors seulement du troisième rôle de l'actrice française (et son premier en anglais).
Kingdom of Heaven : les dessous de la scène du siège de JérusalemÀ la voir s’afficher nue dans Innocents, de Bernardo Bertolucci, on a du mal à croire qu’Eva Green lutte depuis toujours contre une timidité maladive, parfois mal interprétée. "Certains prennent à tort sa distance pour de la froideur. Eva est pro, entière mais aussi très secrète", confie Jean-Paul Salomé qui l’a dirigée dans Arsène Lupin. L’exercice de l’interview est ainsi considéré comme un supplice. Voire une agression. Sur la défensive, elle hésite, bafouille, se reprend. On s’en étonne, elle se referme. "Dans la vie, je suis un peu coincée, admet-elle. Faire ce métier permet de s’ouvrir. Le tournage d’Innocents a agi comme une thérapie en me permettant d’évacuer toute ma 'merde', ma violence. J’ai joué de façon très ingénue. Avec le recul, je me dis qu’il faut tout de même surveiller l’image qu’on véhicule. Je ne veux pas tomber dans le cliché de la femme fatale. Et puis, les questions sur la nudité, ça commence à me saouler..."
Aujourd’hui, Eva Green est en promo pour la sortie mondiale de Kingdom of Heaven, de Ridley Scott. Une évolution logique pour cette comédienne parfaitement bilingue. "Pouvoir jouer en anglais permet d’avoir un choix plus important." L’Hexagone lui semblerait-il déjà trop étroit ? "Ici, on ne me propose rien. Peut-être les gens du métier n’ont-ils pas vu Innocents ?" Sur le tournage d’Arsène Lupin, Eva apprend qu’un casting est organisé à Londres pour le prochain Ridley Scott. Elle s’y rend, débite deux tirades, puis rencontre le réalisateur anglais. Il lui parle des croisades, elle l’écoute religieusement. Trois semaines plus tard, nouvel essai, en costumes. Impressionnée, elle craque. Scott la prend dans ses bras. "Ridley s’est montré très patient. Je me trouvais moche avec mes bouclettes, je connaissais mal mes répliques..." Deux mois passent et la bonne nouvelle tombe : elle obtient le rôle. Dans Kingdom of Heaven, Eva incarne Sybille, reine chrétienne de Jérusalem à une époque où chrétiens et musulmans se respectent malgré tout. "Le film montre les musulmans sous un jour très positif, glisse-t-elle. Il célèbre la bonté humaine et stigmatise la futilité de la guerre." Le Pentagone appréciera...
Mariée à un va-t-en-guerre qu’elle déteste, Sybille tombe amoureuse d’un forgeron (Orlando Bloom), bientôt adoubé chevalier. Le jour où le conflit entre les deux communautés éclate, son personnage traverse de nombreuses épreuves. "Il souffre de multiples frustrations, dit-elle. C’est une héroïne, pas une potiche." Eva Green est-elle partie pour faire aussi bien que sa maman, Marlène Jobert, dont la filmographie traduit un éclectisme du meilleur goût ? "Comme elle, j’aspire à tourner avec de grands metteurs en scène. Je l’admire dans Nous ne vieillirons pas ensemble [Maurice Pialat]." De nature moins pétulante, elle se destine peut-être à des emplois plus sombres. Un profil à la Adjani, son idole...
Le risque de s’abîmer ne l’effraie-t-il pas ? "Si le réalisateur est un bon directeur d’acteurs, tout se passe bien, soutient-elle du haut de ses trois films. J’apprécie d’avoir une certaine autonomie. Je préfère me sentir perdue plutôt que contrainte par de mauvaises indications." Ou par la goujaterie de certains réalisateurs. Tel Oliver Stone. "Ce monsieur me demande d’apprendre n’importe quel texte pour un essai, se souvient-elle. Je choisis Mademoiselle Else, d’Arthur Schnitzler. Pendant mon monologue, il hurle: 'Plus fort, je ne comprends rien!' Puis: 'J’ai rien compris!' Et il se casse. Ça ne se fait pas." Et Eva de s’en prendre à la jungle des castings, propre à vous dégoûter du métier. "On y est traité comme du bétail. Du temps de ma mère, on faisait confiance aux gens." Marlène Jobert se définissait comme une emmerdeuse. Eva se reconnaît-elle en elle ? "Je n’ai pas encore assez de couilles !" conclut-elle.
Interview Christophe Narbonne et Jean-Baptiste Drouet
Depuis 2005, Eva Green a multiplié les rôles à Hollywood (Casino Royale, Penny Dreadful, Dumbo...) et a pris d'avantage confiance en elle, comme on peut le lire dans une interview plus récente :
Eva Green en femme fatale : "C'est très amusant à jouer"
Commentaires