John Malkovich, Ben Stiller... Quand Hollywood se payait les frères Menendez
NBC/SNL/Columbia Tristar

Avant la série de Ryan Murphy, Lyle et Erik Menendez ont déjà inspiré des films, séries ou sketchs à Hollywood.

Qu'on apprécie ou non les séries "true crimes" de Ryan Murphy (et Ian Brennan), on ne peut pas retirer au créateur d'American Crime Story son ambition de proposer au public de revenir sur de sordides faits divers de la manière la plus complète possible.

Chez Première, on n'a pas autant accroché à la deuxième saison de Monstres consacrée aux frères Menendez qu'à ses shows The People vs. O.J. Simpson, The Assassination of Gianni Versace et Monstres – L'histoire de Jeffrey Dahmer. Répétitive et conçue de telle sorte que ce soit au public de se faire sa propre opinion sur la culpabilité de Lyle et Erik Menendez, à coup de récits choc qui se contredisent les uns les autres, elle nous a semblé moins tenue que ses aînées, qui avaient toutes (au moins) un point de vue fort à développer : raconter les travers de la médiatisation des procès pour O.J., faire le portrait d'un menteur compulsif pour Versace et parler des failles de la police, du racisme et de l'homophobie ambiants et redonner la parole aux victimes pour Dahmer.

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Avec cette histoire de jeunes frères ayant assassiné leurs parents, on retrouve un petit peu de tous ces éléments : des meurtres très sanglants, des accusés possiblement menteurs, deux procès suivis en direct à la télévision, des victimes qui ne sont plus là pour se défendre... Avec en plus des réflexions sur les violences sexuelles faites aux enfants.

Parmi tous les éléments évoqués au cours de ses neuf épisodes, les deux derniers mettent l'accent sur le changement de ressenti du public devant cette affaire. Si les spectateurs avaient pu s'attacher aux deux frères et croire à leur traumatisme après la révélation des crimes, lors du déroulement du premier procès, l'opinion publique a peu à peu basculé. Pour illustrer ce changement, dans l'épisode 8 est mentionné très rapidement un sketch du Saturday Night Live avec John Malkovich en Erik et Rob Schneider en Lyle. Entre deux noms de stars hollywoodiennes qui pourraient, selon les deux frères, les incarner au cinéma.

Saturday Night Live avec John Malkovich en Erik Menendez et Rob Schneider en Lyle
SNL/NBC

Le sketch du SNL (1993)

Le sketch date pile du moment où la chaîne Court TV avait décidé de diffuser le procès des frères Menendez en direct. Il est conçu comme un gag de répétition dans lequel le présentateur, joué par Myke Myers, présente les deux suspects comme menteurs et pleurnichards. Ils s'inventent ici deux autres frangins, Danny et Jose Menendez Jr., qui répondent aux questions des avocats pour tenter de déterminer s'ils existent réellement. S'enchainent alors les tentatives de démontrer qu'il s'agit en fait de Lyle et Erik déguisés en Danny et Jose Jr. Face à l'insistance de leurs interlocuteurs, ils finissent à chaque fois par éclater en sanglots.

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Ce sketch, laissant totalement de côté la gravité des révélations du procès, illustre parfaitement l'idée selon laquelle au cours de sa couverture très médiatisée, l'opinion publique a changé, et les gens ne croyaient plus à la défense d'Erik et Lyle Menendez. Un gag qui peut aujourd'hui choquer par son manque d'empathie.

Ses créateurs ne sont d'ailleurs pas les seuls à s'être "payés" cette affaire des frères Menendez.

Disjoncté de Ben Stiller (1996)
COLUMBIA TRISTAR

Disjoncté, de Ben Stiller (1996)

Trois ans après le procès, Ben Stiller s'est lui aussi emparé de ce scandale pour en tirer une parodie dans son film Disjoncté. Pas tellement pour se "moquer" des deux frères, pour le coup, mais davantage pour dénoncer la surmédiatisation de leur procès. Comme celui d'O.J. Simpson, il était un moyen idéal de pointer du doigt l'attention énorme donnée à de terribles faits divers, rediffusés en boucle sur les chaînes d'infos et "consommés" en famille comme un quelconque divertissement. Ici, ce ne sont pas deux frères qui ont assassiné leurs parents, mais un jeune homme qui a tué son frère jumeau, et qui voit sa triste histoire faire l'objet d'un procès surmédiatisé, donc, mais aussi accaparé par Hollywood, qui en tire immédiatement un film d'action pétaradant avec Eric Roberts.

Développée en arrière plan durant toute sa comédie dénonçant la surconsommation de la télévision, la référence fait mouche, mais attention aux spoilers : son dénouement coïncide avec celui du film.

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Law and Order : l'affaire Menendez

En 2017, une série dérivée de Law & Order a été conçue autour de l'affaire Menendez. Sans être à proprement parler une parodie -elle penchait même plutôt pour les arguments de Lyle et Erik Menendez, elle avait été pensée comme une « réponse » à la première saison d'American Crime Story. Malgré un casting solide (Eddie Falco des Soprano en avocate, Anthony Edwards d'Urgences en juge...), elle n'avait pas conquis Première en tombant trop souvent dans la surenchère. Voici notre critique publiée au moment de son arrivée sur 13e rue en France, début 2018. Elle est aujourd'hui visible en DVD.

Law and Order True Crime : L'Affaire Menendez (2017)
NBC

La réponse de Dick Wolf au American Crime Story de Ryan Murphy est un festival de perruques à crever de rire, pas très Law and Order.

Positionnée par Dick Wolf comme le dernier spin off de son infatigable franchise Law and OrderThe Menendez Brothers n’en assume pas moins sa nature de plagiat. Mieux que Waco ou The Murders of Tupac and The Notorious Big, elle témoigne de l’empressement avec lequel les chaînes se sont jetées sur les reconstitutions prestigieuses de crimes célèbres après le succès de The People Vs OJ Simpson (première saison de American Crime Story).

Ce bon vieux Dick ne manque pas d’air ; L’affaire choisie (le meurtre au shotgun de leurs parents par les jumeaux Menendez, dans leur villa de Beverly Hills) se passe à quelques pâtés de maison et ne précède que de quelques années le cas Simpson, recoupant certains des mêmes thèmes (culture naissante de la célébrité) et protagonistes (coucou le juge Ito et le procureur Garcetti). Comme Sarah Paulson dans American Crime Story, Eddie Falco porte une perruque permanentée qui devient l’image symbole du procès…

Là où l’anthologie de Ryan Murphy se déguisait en soap à sensations pour sonder l’histoire raciale du pays, TMB ne garde que le soap hirsute, accroc à sa propre titillation et indifférente au contexte. Une série non pas « tirée de crimes qui défraient la chronique », comme l’exige la tradition Dick Wolf, mais qui épluche la chronique, refusant la satire (elle est partout !) au profit du compte-rendu tabloïd, et délivrant les faits les plus grotesques et les plus sordides avec un sérieux papal. Pas facile de se passionner pour tout ça, mais impossible aussi de détourner le regard. Quelque part, une bonne définition de la Trash TV.

Notez que l'affaire Menendez n'a pas fini de faire du bruit : les deux frères se sont insurgés contre la série qui dépeindrait selon eux un récit qui est loin de la vérité. Entre deux réponses des créateurs ou des acteurs du show, Netflix tease déjà la diffusion d'un documentaire pour accompagner la sortie de sa série à succès, comme cela avait déjà été fait pour Dahmer, entre autres.


Les acteurs de Monster répondent à leur tour aux frères Menendez