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Plus qu’une actrice, Sylvia Kristel fut cette icône lascive, cette femme en bas blancs lovée sur son siège en osier, incarnation éternelle de la libération sexuelle des années 70. Un fantasme avant d’être une personne réelle ou une actrice. Son nom est synonyme de porno soft et d'excitation sexuelle adolescente ; elle brille au firmament de l'érotisme post-68, finalement moins hard que les galipettes de Brigitte Lahaie. Jusqu’au bout, elle assuma ce rôle, mais elle avouait aussi n'avoir jamais réussi à le dépasser. Avoir raté sa carrière... Née en 1953, Kristel avait 21 ans quand elle devint Emmanuelle. L’âge de Marlène quand Sternberg la découvrit sur une pub. L’âge de Marilyn quand elle joua son premier rôle à l’écran (dans Bagarre pour une blonde). Kristel n’a certainement pas eu leur carrière et pour un Sternberg ou un Hawk, elle eut Mocky ou Girod. Mais dans la tête des cinéphiles, l’image du fauteuil reste un fétiche aussi puissant que la robe qui se soulève ou la cigarette de Marlène. Une image culte, et plus : une certaine définition du cinéma et de son époque. C’est pour ça que Premiere fit sa première couverture avec Kristel...  Emmanuelle : la déflagration sensualiste Pourtant, le cinéma ça ne vient pas d'elle, c'est une idée de sa mère. C'est maman qui la pousse à s'inscrire à un concours de Miss en 72. Elle gagne et le reste est classique : une agence de mannequins, deux-trois petits rôles dans des films néerlandais, des auditions à Paris. Rien jusqu’à ce que Just Jaeckin la repère. Le cinéaste cherche son Emmanuelle. La trouve. Sa vie explose. Dans la France giscardienne, le film de Jaekin est une déflagration sensualiste, une provocation interdite qui mettra les ligues de vertus en fureur et fera le délice des bourgeois en quête de sensations fortes. Le film est nul, c’est un fait. Mais elle y est radieuse. Jeune et belle, Emmanuelle est entrainée avec son mari dans une série d’aventures hétérosexuelles ou lesbiennes qui entendent mettre le couple traditionnel hors la loi. Boeing, résidence de luxe, échangisme... ce conte de fée BCBG de la libido change définitivement la société et le cinéma. Kristel va très vite tenter de devenir autre chose que ce mannequin. En vain. Elle tourne beaucoup mais rien ne parvient à estomper son image. Elle restera donc ce fantasme au visage de chatte qui attise les rumeurs les plus folles (sa liaison démentie avec Giscard), sombra dans les excès de toutes sortes (l’alcool, les drogues) et finit par se réfugier dans l’art, la peinture - ses expos de collages eurent un petit succès d’estime à LA. Mais à jamais, Kristel restera Emmanuelle. Et ce fauteuil en osier. Vide.Gaël Golhen