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"Scorsese, l’exposition" propose de retracer le parcours de Martin Scorsese de façon thématique pour montrer en quoi le réalisateur de Taxi Driver a marqué le cinéma américain des cinquante dernières années. Remontant jusqu’à l’enfance du cinéaste pour y puiser des sources d’inspiration et déceler ses obsessions artistiques, l’exposition présente ainsi une quantité d’images et de documents, parmi lesquels figurent en bonne place les différents storyboards que Marty se plaisait à réaliser à ses débuts. Voici en avant-première les grandes étapes de l’exposition et les objets que l’on peut y découvrir.Partie 1 : De nouveaux hérosMartin Scorsese grandit dans une famille d’immigrés italiens qui va constituer une intense source d’inspiration pour son œuvre. Les parents du réalisateur se retrouveront par exemple au centre du documentaire Italianamerican (1974), présenté juste à côté de la table à manger de la famille Scorsese (autour de laquelle Marty dit avoir reçu plus tard Harvey KeitelJohn Cassavetes ou Sergio Leone), d’une reconstitution de la pieuse décoration de leur appartement et du poste de télévision que regardait beaucoup le petit Martin (asthmatique, il était interdit de sport). Cet espace explore aussi le thème de la fratrie et des rapports hommes-femmes dans la filmographie du cinéaste. On trouve également des pièces amusantes, comme une affiche des Simpson qui parodie Les Affranchis et que Matt Groening a offert en personne à Martin Scorsese. Partie 2 : Crucifixion Plus austère, cette partie de l’exposition aborde les thèmes de la faute, de l’expiation et du pardon en rappelant que Martin Scorsese, qui a toujours reconnu qu'il serait rentré dans les ordres s'il n'avait pas fait du cinéma, a eu recours dès ses premiers films au symbole du Christ crucifié. Extraits de films et photographies montrent ainsi l’importance de l'iconographie chrétienne dans des films comme Boxcar Bertha, Mean StreetsRaging Bull et La Dernière Tentation du Christ, avant que le souvenir de Kundun, la fresque sur la vie du Dalaï-Lama réalisée en 1997, ne vienne clore ce chapitre.>> L'expo Scorsese en images">>>> L'expo Scorsese en images Partie 3 : Au cœur de New YorkAprès une présentation de plusieurs cases du storyboard original de Taxi Driver dessinées par Martin Scorsese lui-même ("J’ai besoin de voir mes dessins originaux pour filmer, car la manière dont j’ai appuyé le crayon sur la feuille m’indique quels doivent être l’axe et le mouvement de la caméra", a-t-il déclaré à la conférence de presse) et une exposition de la Palme d’or (prix que reçut le film à Cannes en 1974), l’exposition fait plonger le visiteur au coeur la cité new-yorkaise. Enfant de Little Italy, Marty a aussi effectué ses études cinématographiques à New York et y ancre la plupart de ses films, de Who’s That Knocking at My Door au Loup de Wall Street, en passant par New York, New York. Une maquette géante présentant une sorte de géographie filmique de la ville trône ainsi au milieu de l’exposition.Partie 4 : InspirationsRevenant sur la grande admiration que voue Scorsese à Alfred Hitchcock, l’exposition projette notamment le court-métrage The Key to Reserva, réalisé en 2007 en clin d'oeil au maître du suspense et rappelle que Marty a travaillé durant sa carrière avec plusieurs des techniciens d’Hitchcock. Evoquant aussi la sauvegarde du patrimoine cinématographique mondial à laquelle Scorsese est attachée (il a fondé en 1990, avec des amis comme Steven Spielberg et Stanley Kubrick, The Film Foundation), cette partie sur les hommages de Scorsese au septième art s’achève avec des objets issus d’Aviator (la robe portée dans le film par Cate Blanchett - et conçue par la costumière Sandy Powell - est exposée, de même que les maquettes de décor peintes par Dante Ferretti) et d’Hugo Cabret, le long métrage de Martin Scorsese consacré à Georges Méliès. Partie 5 : MaestriaSe fixant comme objectif de décrire la virtuosité formelle et stylistique de la filmographie de Martin Scorsese, cette partie s'avère riche en textes et en extraits : Le Temps de l’Innocence est pris comme exemple de la fluidité de la caméra scorsesienne, Raging Bull a droit à un grand écran pour insister sur la minutie du montage de Thelma Schoonmaker (qui reçut en 1981 son premier Oscar grâce à ce film) et la dernière salle de l’exposition est dédiée à l’importance de la musique dans l’œuvre de Marty, avec des extraits sonores et des photos de Bob Dylan ou des Rolling Stones. Parvenant à jeter des ponts entre le passé et le futur du septième art, cette exposition rend donc un hommage appuyé aux passions et aux préoccupations de Martin Scorsese, qui a confié lundi durant la conférence de presse organisée à la Cinémathèque qu’il se faisait "un peu de souci pour la conception que les jeunes générations se font du cinéma" avant de défendre un cinéaste comme Christopher Nolan, capable selon lui d’allier le grand spectacle et un esprit créatif certain. L’exposition de la Cinémathèque réussira-t-elle à attirer les jeunes spectateurs dont parle Scorsese et à leur apprendre ce qu’est la mémoire cinématographique ? C’est tout le bien qu’on lui souhaite.Damien LeblancDu 14 octobre 2015 au 14 février 2016 à la Cinémathèque française.